Le cancer : histoire d’un combat inachevé

 

Le cancer est sans doute la maladie sur laquelle la médecine moderne tend le plus à être jugée. Sa maîtrise complète et définitive serait interprétée comme la démonstration de la puissance de la médecine scientifique et le symbole de son triomphe ; sa persistance massive autour de nous est considérée comme un défi au savoir-faire médical et le signe de ses limites. Une telle perception est à la fois fondée et injustifiée. Elle est fondée parce que le cancer est aujourd’hui, dans le monde développé, la première ou la deuxième cause de décès après les maladies cardio-vasculaires selon les pays, qu’il y frappera une personne sur deux au cours de son existence et que son traitement, lorsqu’il est possible, demeure le plus souvent long et pénible. Elle est injustifiée parce qu’en moyenne, grâce aux progrès accomplis au cours des cinquante dernières années, on guérit aujourd’hui environ un cancer sur deux, et que si la maladie est à l’origine d’une telle mortalité, il y a à cela d’excellentes raisons : le cancer est une maladie compliquée, son incidence augmente avec l’âge et nous vivons de plus en plus vieux, surtout, si tant de gens meurent aujourd’hui du cancer, c’est qu’ils ne meurent plus d’autre chose, et l’apparente défaite dans le combat contre lui est en quelque sorte le revers de l’écrasante victoire remportée sur de nombreuses affections autrefois fatales, à commencer par les maladies infectieuses.

Parce qu’il est omniprésent et représente une source importante de souffrances physiques et psychologiques, parce qu’il constitue, en conséquence, une des grandes sources d’angoisse dans une société qui n’accepte plus aussi facilement que par le passé les réalités de la maladie et de la mort, le cancer est un sujet qui suscite un intérêt inquiet que rien ne semble capable d’épuiser. Sans doute faut-il voir là une des raisons du succès remporté par le livre récent de Siddharta Mukherjee The Emperor of All Maladies – A Biography of Cancer, qui a été accueilli dans le monde anglo-saxon par un concert d’éloges et couvert d’honneurs et de récompenses, dont le prestigieux prix Pulitzer. Mais ce n’est pas la seule explication. Étonnante réalisation d’un homme encore jeune, l’ouvrage est de grande qualité et se lit remarquablement bien.

La longue tradition des médecins-écrivains

D’origine indienne, comme son nom l’indique, actuellement professeur adjoint au département de médecine, section oncologie, de l’université Columbia à New York, Siddhartha Mukherjee, qui a aujourd’hui 42 ans, est devenu écrivain scientifique un peu par hasard, stimulé, raconte-t-il, par la demande d’une de ses patientes qui l’avait invité à lui décrire le mal contre lequel elle se débattait. Familier de la littérature, il n’en a pas moins dû tâtonner quelque peu avant de trouver sa méthode de travail. Pour l’essentiel, ce gros livre de presque 500 pages a été rédigé au lit, sans contraintes horaires, les seules conditions, apparemment, dans lesquelles le blocage qui paralysait initialement son auteur pouvait être levé.

S’inscrivant dans le sillage d’une longue tradition de médecins-écrivains, Siddhartha Mukherjee, qui indique avoir été fasciné par les écrits du médecin, essayiste et poète Lewis Thomas, appartient à cette catégorie de docteurs américains qui pratiquent un genre à mi-chemin de l’histoire populaire et du journalisme. Différents en cela des ouvrages des grands savants humanistes et lettrés du passé comme William Osler, Peter Medawar, Santiago Ramón y Cajal ou, plus près de nous, Jean Bernard, pour ne citer que quelques noms, leurs livres mêlent inextricablement exposé historique et études de cas : ils enseignent l’histoire (history) en racontant des histoires (stories). Sherwin Nuland, auteur, notamment, des célèbres How We Die et How We Live, est le plus brillant représentant de cette famille, qui compte aussi parmi ses membres Jerome Groopman, Atul Gawande ou le fameux neurologue Oliver Sacks. Sujet à part, c’est aux livres de tels auteurs que fait penser celui de Siddhartha Mukherjee, bien davantage qu’à ceux des grands cancérologues européens comme Lucien Israël, Maurice Tubiana ou Umberto Veronesi, au contenu en partie identique mais de conception très différente.

The Emperor of All Maladies entrelace histoires de médecins et histoires de malades. Celle de Carla, par exemple, une patiente atteinte de leucémie lymphoblastique aiguë, un type de cancer du sang curable dans un tiers des cas. On fait sa connaissance au début du livre et on la retrouve vivante à la fin de celui-ci, parce qu’elle a bénéficié d’une de ces rémissions si longues que les médecins les assimilent à la guérison. Tous les patients de Siddhartha Mukherjee n’ont pas eu cette chance, et le livre se referme sur la note sombre de la mort d’une autre malade, dont le combat courageux, déterminé et stoïque contre une tumeur gastro-intestinale est présenté comme une espèce de métaphore de celui que les médecins mènent avec opiniâtreté contre le cancer depuis plusieurs décennies.

Bousculant la chronologie, en sautant souvent en avant et en arrière dans le temps en fonction des sujets évoqués, Mukherjee passe rapidement sur les deux premiers millénaires de l’histoire du cancer : l’Antiquité égyptienne, où l’on savait déjà le reconnaître sans que ceci ait la moindre conséquence pratique (« Il n’y a pas de traitement » concluait laconiquement un papyrus décrivant les tumeurs du sein) ; Hippocrate, chez qui apparaît pour la première fois le mot  « cancer », (« karkinos »), inspiré de l’image du crabe qu’évoquait dans son esprit l’aspect des tumeurs (sous ce vocable, les Grecs, qui ignoraient le mécanisme de prolifération anarchique des cellules qui caractérise la maladie, désignaient toutes les tumeurs visibles, sans faire la différence entre les malignes et les bénignes) ; Galien, qui voyait dans le cancer le produit d’un excès de « bile noire », une des quatre « humeurs » fondamentales du corps distinguées par sa doctrine – sa théorie influença profondément la vision du cancer durant des siècles, même après qu’André Vésale, à la Renaissance, eut mis en évidence, grâce aux premières dissections, l’inexistence des humeurs en question.

L’histoire moderne du cancer commence au XVIIIe siècle avec l’identification, par le médecin anglais Percival Pott, du premier cancer professionnel, le cancer du scrotum qui affligeait les jeunes ramoneurs exposés à la suie de charbon dans les conduits étroits des cheminées. Elle se poursuit au XIXe siècle avec l’élucidation, par le physiologiste allemand Rudolf Virchow, dans le prolongement de sa découverte du phénomène de la division cellulaire, de la véritable nature de l’affection du sang qu’il baptise « leucémie ». Elle s’accélère au début du XXe siècle avec la pratique systématique de l’exérèse chirurgicale des tumeurs, l’introduction de la radiothérapie après qu’on a découvert les effets physiologiques des radiations ionisantes, enfin, le développement de la chimiothérapie, suite à l’observation fortuite, à la fin de la Seconde Guerre mondiale, des effets du gaz asphyxiant dit « gaz moutarde » sur les globules blancs, à l’occasion de l’explosion accidentelle d’un fût qui en contenait, dans le port de Naples en 1944.

Deux moments forts

Telle que la raconte Siddhartha Mukherjee, l’histoire contemporaine du cancer a deux moments forts auxquels sont respectivement associés deux séries de noms. Les premiers sont ceux du pédiatre de Boston Sydney Farber, fondateur de l’hôpital dans lequel Mukherjee a commencé sa carrière, qui est considèré comme le père des traitements chimiothérapiques des leucémies infantiles, et de l’activiste Mary Lasker, créatrice de la fondation philanthropique qui porte son nom. Durant plus de vingt ans, ils ont œuvré en collaboration à mobiliser des fonds pour la recherche sur le cancer, en un effort dont sortira la fameuse « Guerre contre le cancer » (parfois appelée « croisade ») lancée par Richard Nixon ; une initiative au succès très contesté (« Selon tout critère de bon sens, la guerre contre le cancer a été perdue » décrète le rédacteur en chef du Lancet Richard Horton), dont Mukherjee rappelle qu’elle s’est traduite par une campagne d’essais cliniques à grande échelle d’un nombre très important de substances toxiques administrées souvent à des doses extrêmement élevées.

Le second moment clé est celui de l’apparition, à partir des années 1980, des thérapies « ciblées », dans le prolongement des premiers progrès de la génétique qui ont conduit à l’identification des « proto-oncogènes » déclenchant la maladie, et des « gènes suppresseurs » qui commandent l’élimination des cellules cancéreuses. Contrairement aux chimiothérapies classiques, dont le mode d’action s’appuie sur des propriétés générales de toutes les cellules, saines ou malades (caractéristique à l’origine de leurs fréquents effets secondaires), les nouvelles thérapies exploitent des mécanismes génétiques spécifiques des cellules cancéreuses, dont elles tentent de bloquer le fonctionnement. Avec l’achèvement du séquençage du génome humain, cette approche a pris davantage d’ampleur encore. James Watson, le co-découvreur de la structure de l’ADN, et l’actuel directeur des National Institutes of Health Francis Collins s’en sont faits les hérauts, et parmi les scientifiques qui l’ont illustrée figurent Harold Varmus (avec lequel Siddhartha Mukherjee a travaillé), Robert Weinberg et Bert Volgelstein. Siddhartha Mukherjee relate en détail comment, dans le prolongement de leurs recherches, ont été mis au point l’Herceptine, qui vise une protéine impliquée dans certains cancers du sein, et le Glivec, efficace contre la leucémie myéloïde chronique, deux des médicaments « ciblés » les plus connus avec l’Avastin, utilisé notamment dans le traitement du cancer du côlon.

À juste titre, on a reproché à Siddhartha Mukherjee de raconter une histoire essentiellement américaine, voire bostonienne, du cancer. En dépit de quelques excursions en Europe pour les périodes les plus éloignées, son attention tend en effet à se concentrer sur les travaux réalisés aux États-Unis et les personnalités de la côte Est. L’idée exprimée dans le sous-titre de l’ouvrage (une « biographie » du cancer), en contradiction flagrante avec la vision actuelle du cancer comme d’une famille de maladies plutôt qu’une maladie singulière, conduit par ailleurs Mukherjee à se livrer par endroits à une espèce de personnification du cancer, efficace en termes dramatiques mais malheureuse au plan scientifique. On pourrait aussi regretter le peu de place accordé aux technologies médicales, plus particulièrement les techniques d’imagerie, dont le développement a eu  impact considérable dans ce domaine, en autorisant des diagnostics très précoces. Siddhartha Mukherjee donne également une image sans doute trop négative de la chirurgie et de la radiothérapie, en montant en épingles les méthodes cruelles de mastectomie radicale que pratiquait et préconisait à la fin du XIXe siècle William Stewart Halsted, et les dégâts occasionnés par les doses massives de rayonnement. En dépit de l’usage parfois brutal qui a pu en être fait, ces deux techniques ont tout de même contribué à sauver des centaines de milliers de vie.  

L’engouement de la médecine pour la génétique

Inversement, tout en restant généralement très prudent, Siddhartha Mukherjee fait montre d’un optimisme peut-être un peu excessif au sujet de l’avenir des thérapies ciblées. L’apparition des premiers traitements de ce type avait allumé des espoirs énormes, qui se sont parfois traduits en affirmations pour le moins imprudentes. En écho aux propos triomphalistes de James Watson, Andrew von Eschenbach, à l’époque où il était directeur du National Cancer Institute américain, annonçait ainsi l’élimination pure et simple du décès par cancer avant 2015. Une déclaration contre laquelle le cancérologue britannique Paul Nurse mettait en garde, soulignant combien ce genre de propos téméraires pouvait contribuer à saper la confiance du public et du monde politique envers les chercheurs. De fait, les perspectives ouvertes par la génétique semblent aujourd’hui moins idylliques. Si des dizaines de gènes impliqués dans la cancérisation ont été identifiés, la cascade de réactions moléculaires qui conduit la cellule à mettre en œuvre un programme aberrant s’avère à l’examen d’une terrible complexité. À l’instar de ce qui se passe avec les chimiothérapies classiques, on observe de surcroît des phénomènes de résistance aux thérapies ciblées au cours du traitement.

L’engouement de la médecine pour la génétique, stigmatisé notamment par James Le Fanu dans The Rise and Fall of Modern Medicine, est l’expression de cette conviction solidement ancrée dans les esprits contemporains qu’un traitement efficace doit nécessairement être basé sur la compréhension parfaite des mécanismes à l’origine de la maladie ou impliqués dans celle-ci. La plupart des traitements aujourd’hui sur le marché ont pourtant été développés à l’aide des techniques classiques de la pharmacologie sur une base souvent empirique. « Là où la biologie moléculaire peine à proposer des alternatives », rappelle Gérard Lambert dans La légende des gènes, « une approche traditionnelle, voire empirique, de la pathologie peut donner d’excellents résultats ». Comme le faisait remarquer Susan Sontag (souvent citée par Siddhartha Mukherjee) dans La Maladie comme métaphore, chaque époque se fait du cancer une image différente liée aux représentations dominantes du moment. Dans les années de la guerre froide, c’était celle d’un envahisseur sournois et déterminé qu’il fallait combattre sans merci par des armes d’extermination et la violence. Aujourd’hui, reconnaît Siddhartha Mukherjee, nous pensons le cancer dans les termes de la génétique.

Un certain nombre de cancérologues commencent toutefois à se demander si, en s’appuyant exclusivement sur les découvertes de la biologie moléculaire, ils n’ont pas été un peu trop loin. C’est notamment le cas de Robert Weinberg, pourtant un des pionniers de cette approche. La perspective génétique a grandement contribué à désagréger le cancer en une multitude de maladies spécifiques prenant une forme singulière chez chaque malade, à faire rêver, par conséquent, de traitements personnalisés strictement dessinés en fonction du profil génétique des patients. « Le plus grand espoir pour les futurs traitements », affirme pourtant aujourd’hui Weinberg « réside dans la prise en compte des traits communs des différents types de cancer », par exemple la propriété qu’ont les tumeurs solides de stimuler le développement de vaisseaux sanguins autour d’elles pour assurer leur croissance (c’est le phénomène d’angiogenèse). Il rejoint en cela le cancérologue français Laurent Schwartz, qui déplorait qu’on ait perdu de vue ce qu’il fait l’unité du cancer, qui pourrait résider selon lui dans le dérèglement du métabolisme cellulaire, sous la forme de l’inflammation chronique.

L’idée que le cancer est une maladie métabolique, plus précisément une perturbation du métabolisme du glucose et de l’oxygène pour la production de l’énergie cellulaire, avait été avancée par le biochimiste Otto Warburg au début du siècle dernier, puis oubliée. Dans un entretien publié en postface à l’édition paperback anglaise de The Emperor of All Maladies, Siddhartha Mukherjee la mentionne, en soulignant qu’elle pourrait ouvrir une intéressante piste de recherche, à côté, notamment, de l’étude du « micro-environnement » des tumeurs et de l’immunothérapie du cancer. Dans cet entretien, conçu à l’évidence pour répondre à certains commentaires suscités par l’édition américaine, il revient en effet sur plusieurs questions abordées dans son livre et évoque certains aspects qui n’y figuraient pas, quitte à expliquer pour quelles raisons il a omis de les traiter.

Traitements extraordinairement chers

Un de ces aspects est la question de la prévention. Siddhartha Mukherjee décrit longuement la manière dont les Anglais Richard Doll et Austin Bradford Hill, il y a soixante ans de cela, ont mis en évidence le lien de la consommation de cigarettes et du cancer du poumon, dans le prolongement des travaux pionniers de John Hill sur les méfaits du tabac à priser, au XVIIIe siècle. Il ne dissimule rien des difficultés auxquelles ils se sont heurtés pour convaincre la communauté médicale de la nocivité du tabagisme, ni des multiples manœuvres entreprises par les industriels du tabac pour jeter le doute sur les résultats épidémiologiques obtenus et contrecarrer l’adoption de mesures légales en la matière. C’est toutefois le seul aspect de la prévention sur lequel il s’étend (il ne mentionne pas beaucoup d’autres agents cancérigènes ou soupçonnés de l’être), contrairement, par exemple, à Maurice Tubiana, dont une partie importante des livres sur le cancer est consacrée à ce sujet. Mukherjee ne dit rien non plus du dépistage, qui soulève pourtant toute une série de questions liées à sa fiabilité, son coût, son efficacité et aux problèmes sociaux, psychologiques et éthiques que pose plus particulièrement la disponibilité de tests de susceptibilité génétique. Dans son excellent compte rendu du livre, le sociologue des sciences de Harvard Steven Shapin les met brillamment en lumière, en évoquant le spectre d’un monde où la vie s’organiserait en fonction des « facteurs de risque », et où chacun d’entre nous se verrait comme un « pré-cancéreux ».  

Siddhartha Mukherjee est également muet sur la dimension économique : les coûts en explosion des nouveaux médicaments anti-cancéreux (souvent de l’ordre de plusieurs dizaines de milliers d’euros par an) ; l’inégalité d’accès aux traitements avancés qui en résulte (Steve Jobs n’aurait-il pas été un des hommes les plus riches du monde, il n’est pas sûr du tout qu’il aurait encore été vivant sept ans après le diagnostic de son cancer du pancréas) ; le poids croissant que le traitement du cancer fait en conséquence peser sur les systèmes de sécurité sociale ; last but not least, les profits gigantesques que représente le traitement du cancer pour l’industrie pharmaceutique : selon Marcia Angell, ancienne rédactrice en chef du New England Journal of Medicine, les seules ventes du Taxol, le médicament contre le cancer le plus vendu dans l’histoire – il est le traitement de première intention dans les cancers de l’ovaire et utilisé comme adjuvant dans celui de certains cancers du sein – rapportent entre 1 et 2 milliards de dollars par an à la société qui le commercialise, sur la base de recherches essentiellement financées par le secteur public. De manière générale, on ne peut d’ailleurs éviter de s’interroger sur l’intérêt et le caractère approprié, en termes médicaux, humains et sociaux, de traitements extraordinairement chers et parfois très pénibles, qui prolongent de quelques jours seulement en moyenne la survie des patients atteints.

Mais ces questions complexes, sur lesquels existent de nombreux rapports, tombent en dehors du champ d’intérêt de Siddhartha Mukherjee, dont le point de vue sur le cancer n’est pas celui d’un spécialiste de la santé publique mais bien d’un clinicien intelligent et cultivé. Songeant à la fois à sa prévalence objective et à la place centrale qu’il occupe dans l’esprit et les préoccupations de nos contemporains, l’historien de la médecine anglais Roy Porter, dans sa splendide fresque The Greatest Benefit to Mankind – A Medical History of Humanity, disait du cancer qu’il est « la maladie moderne par excellence ». Siddhartha Mukherjee médite, lui, sur le fait qu’avec le cancer, contrairement aux maladies infectieuses, on n’a pas affaire à un ennemi extérieur : « Les gènes activés par les cellules cancéreuses sont les mêmes gènes qu’utilisent les cellules normales [...]. Rien n’est inventé ; rien n’est étranger. La vie du cancer est une récapitulation de la vie du corps, son existence est un miroir pathologique de la nôtre. » Cette caractéristique du cancer explique largement qu’il soit si ardu de le maîtriser. Siddhartha Mukherjee raconte avec beaucoup de talent et de savoir-faire, dans une langue précise et élégante, l’histoire de quelques grandes étapes de l’entreprise de longue haleine engagée dans ce but. Et il décrit avec finesse, sensibilité et empathie la vie des patients qui souffrent et des médecins qui s’efforcent de les soulager et les guérir. En se souvenant que ce livre est loin d’épuiser ce qu’il est possible et nécessaire de dire sur le cancer et les problèmes qu’il pose à la société, on lira donc The Emperor of All Maladies avec intérêt, sympathie et admiration. 

Michel André

LE LIVRE
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The Emperor of All Maladies. A Biography of Cancer de Siddhartha Mukherjee, Scribner Book Company

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