Démonter la mécanique du complot en trois étapes
Publié le 9 février 2016. Par La rédaction de Books.
Poster Serbe, deuxième Guerre mondiale, Université du Minnesota
Comment éviter aux jeunes d’être séduits par les théories du complot ? Le ministère de l’Education nationale a organisé aujourd’hui une journée d’études sur le sujet, pour mieux contrer l’influence des thèses conspirationistes qui ont refleuri après les attentats de novembre. Le moment est tout désigné pour relire le grand classique (publié en 1964) de l’historien américain Richard Hofstadter, Le Style paranoïaque. Il y explique notamment que la théorie du complot est, depuis des siècles, une composante à part entière de la vie politique des démocraties, aux Etats-Unis comme en Europe. Ce mode de pensée étant particulièrement prisé par les mouvements protestataires, de gauche comme de droite. Voici les trois principales caractéristiques du discours paranoïaque, selon Richard Hofstadter :
- L’histoire est mue par un vaste complot.
C’est le trait distinctif du phénomène : les adeptes de ce type de rhétorique ne se contentent pas d’identifier des complots çà et là dans la vie des sociétés. A leurs yeux, « la force motrice des événements historiques » est une vaste conspiration.
- L’ennemi est un parfait modèle de méchanceté.
« Il est une sorte de surhomme amoral : maléfique, omniprésent, puissant, cruel, versé dans les plaisirs de la chair, attiré par le luxe », écrit Hofstadter. Surpuissant, il contrôle notamment la presse et dispose de moyens financiers illimités.
- Le discours conspirationniste est cohérent, trop cohérent.
Dans le monde analysé par une pensée paranoïaque, tout s’explique. Pas de place pour le hasard, les ambiguïtés ou les échecs qui sont au cœur de la réalité. La rhétorique complotiste se présente comme guidée par la plus grande minutie, le plus grand soin apporté aux détails factuels. « Ce qui caractérise le style paranoïaque, conclut Hofstadter, n’est pas l’absence de faits vérifiables (même s’il arrive parfois que le paranoïaque dans sa folle passion pour les faits les fabrique lui même), mais plutôt ce curieux saut dans l’imaginaire qui se produit toujours au moment décisif de la description des événements. »