Est-il bon ? Est-il méchant ?

Ayant appris le sujet de notre dossier, un ami philosophe me dit : « Connais-tu le livre passionnant d’Olivier Maurel intitulé Oui, la nature humaine est bonne !, paru chez Laffont l’année dernière ? Ce livre suggère que l’origine du mal n’est pas dans les gènes mais dans l’éducation, et plus spécifiquement dans les punitions corporelles infligées aux enfants. » L’idée que l’origine du mal serait « dans l’éducation » a dominé la pensée philosophique et psychologique occidentale depuis le XVIIIe siècle. Ce n’est pas tellement que l’homme serait bon par nature ; il naîtrait comme une cire molle que le bon éducateur pourrait pétrir à loisir. Une bonne éducation, avec ou sans fessées, et voilà notre homme bon. Une mauvaise éducation, et le voilà méchant. Ce courant de pensée tend aussi à assimiler la cire molle de l’enfant à celle de l’homme sauvage, supposé être à l’état de nature. Rousseau : « Il n’est pas réfractaire à la société ; mais il n’y est pas enclin. Il a en lui les germes qui, développés, deviendront les vertus sociales, les inclinations sociales ; mais ils ne sont que des puissances. La perfectibilité, les vertus sociales et les autres facultés que l’homme naturel avait reçues en puissance ne pouvaient jamais se développer d’elles-mêmes. » Cette question était déjà débattue à sa manière par Socrate, qui retournait en tous sens la question de savoir si la vertu pouvait s’enseigner, et admettait ne pas connaître la réponse. Et si la doctrine rousseauiste a effectivement dominé la pensée occidentale et continue de l’imprégner, elle s’est heurtée dès l’origine à des voix dissidentes. La plus profonde était celle de Hume, l’exact contemporain de Rousseau, pour qui la morale procède de dispositions naturelles propres à l’« espèce humaine ». Notre dossier montre que ce débat essentiel a été complètement renouvelé par les résultats de la recherche scientifique.

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