Les étranges us et coutumes de “l’Europe des rois”
« Quiconque a eu l’occasion d’observer combien des personnes parfaitement rationnelles à titre individuel peuvent faire avec la plus grande conviction des choses qui, trois siècles plus tard, nous semblent complètement absurdes, celui-là devrait y réfléchir à deux fois avant de tenir pour normal ce que tout le monde fait autour de lui. » L’historien Leonhard Horowski a étudié dans son dernier livre les cours royales et princières d’Europe sous l’Ancien régime. Sa phrase fait allusion à ces règles de préséance dont nous nous demandons aujourd’hui pourquoi les contemporains les jugeaient si essentielles.
Obtenir un tabouret à côté d’une reine, assister au lever du roi, être le premier à saluer un monarque n’avait rien d’anodin. Horowski raconte qu’en 1685, à Londres, l’ambassadeur du Brandebourg causa un véritable événement en écartant l’ambassadeur vénitien qui prétendait complimenter le roi Jacques II avant lui. Ce qui se reflétait là, c’était le nouveau rapport de force en Europe : le déclin de la Sérénissime, la montée en puissance de la Prusse… «L’Europe des rois » fourmille de ce genre d’anecdotes. « Ses vingt chapitres commencent tous par une petite scène dont personne ou presque n’a jamais entendu parler », note Stephan Speicher dans Die Zeit. Les Allemands adorent : malgré ses 1000 pages, l’ouvrage est déjà sur la liste des meilleures ventes du Spiegel.