Fra Angelico redécouvert
Publié dans le magazine Books n° 3, mars 2009. Par Martin Warnke.
Longtemps considéré comme rétrograde, le moine-peintre, plus peintre que moine, apparaît désormais sous un jour nouveau : celui d’un homme bien de son temps.
Le peintre du Quattocento Fra Angelico [mort en 1455] est à ce jour le seul artiste canonisé (1). En 1984, le pape Jean-Paul II l’a promu saint patron des peintres, non sans exhorter les artistes à suivre l’exemple de cet homme pieux. Saint Luc, qui a tenu cette charge pendant tout le Moyen Âge, n’est plus reconnu comme peintre depuis le xviie siècle (2). C’est donc seulement depuis peu que les artistes ont de nouveau un saint susceptible d’intercéder en leur faveur. Ils le doivent, pour l’essentiel, au père de l’histoire de l’art, Giorgio Vasari. Dans La Vie des plus excellents peintres, sculpteurs et architectes, publié en 1550, il raconte que Fra Angelico était considéré comme l’« égal des anges ». Le frère « priait toujours avant de saisir son pinceau », et peignait alors des personnages semblant « tout droit venus du paradis », à l’aide de couleurs si lumineuses qu’on pouvait croire l’ensemble « exécuté de la main d’un saint ou d’un ange ». Vasari voulait mettre en valeur un peintre dont les tableaux révèlent l’âme, l’opposant au maître de Raphaël, le Pérugin, qui ...