L’ambassadeur du futur

Tom Fletcher dénote, parmi les diplomates de Sa Majesté. En 2011, il est nommé ambassadeur au Liban et devient, à 36 ans, l’un des plus jeunes Britanniques à occuper un tel poste. Avant cela, ce diplômé d’Oxford avait eu le temps de conseiller trois Premiers ministres (Tony Blair, Gordon Brown et David Cameron). Au Liban, l’homme a bousculé tous les codes : il a alimenté un blog et, surtout, posté sur Twitter une photo de lui en train de donner son sang pour venir en aide aux victimes d’un attentat contre l’ambassade d‘Iran à Beyrouth, en novembre 2013. Fletcher a ainsi pu ajouter une ligne à son impressionnant CV : premier diplo­mate occidental retweeté par un président iranien. En quoi la présence d’un ambassadeur sur les réseaux sociaux Twitter ou Facebook est-elle importante, ou même souhaitable ? Tout dépend du point de vue. Le critique de la Literary Review a par exemple très peu goûté le livre dans ­lequel Fletcher (qui a entre-temps ­quitté le corps diplomatique) livre sa ­vision de l’ambassadeur du ­futur. On dirait « l’équivalent pour la diplomatie d’un tract d’évangélisation d’Eric Schmidt [l’un des dirigeants de Google] pour la voiture sans chauffeur », assène Michael Burleigh. L’ambassadeur selon Fletcher ne devra plus être diplomate de métier. Il aura eu et aura à nouveau, une fois son office achevé, d’autres activités (comme « lobbyiste, conseiller en communication, entrepreneur, militant, avocat »). Son rôle majeur sera de défendre, via les réseaux sociaux, les droits de l’homme et la société civile. Ses missions d’information sur la situation du pays hôte seront réduites par la nature même des réseaux, ouverts et mondialisés (« Qui se préoccupe de notre homme à La Havane quand nous pouvons tous suivre la dissidente Yoani Sánchez en direct sur Twitter ? », rapporte Burleigh). Autant d’évolutions qui, pour le Guardian, auront pour conséquence de rendre la diplomatie plus « créative » et plus en phase avec les citoyens. Anthony Sattin a en tout cas été conquis. Comme il l’écrit dans les pages du quotidien : « Plus j’avançais dans ma lecture, plus ce livre m’est apparu comme un nouveau manifeste et j’ai fini par penser que je ne serais pas surpris de voir Fletcher finir à la tête du Foreign Office, ou même du pays. »
LE LIVRE
LE LIVRE

La diplomatie à nu de Tom Fletcher, William Collins, 2016

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