Publié dans le magazine Books n° 44, juin 2013. Par Rudolf Neumaier.
On se passionne outre-Rhin pour la très sérieuse, très érudite, mais très sulfureuse histoire d’un couvent italien du XIXe siècle. Où l’on apprend comment un théologien allemand apôtre de l’obéissance – il inspira le dogme de l’infaillibilité du pape – fut aussi un parangon de vices peu orthodoxes. L’affaire aujourd’hui redécouverte avait été étouffée par le Vatican.
« Obéissance », même en italien ce mot est laid : « obbedienza ». Qui n’obéit pas, qui agit suivant sa volonté ou sa conscience, commet un péché. L’ordre est tout ce qui compte – surtout lorsqu’il vient du Ciel. Mais si un démon s’y est insinué, ou une démone ?
À l’heure décisive, Maria Luisa dut se montrer obéissante. Un ordre de Dieu, lui avait-on dit. La jeune fille, alors âgée de 13 ans, se tenait devant une femme nue qui aurait pu être sa grand-mère : l’abbesse, la maîtresse du couvent. Elle était allongée sur son lit et une autre femme, la prieure, chuchotait à Maria Luisa comment elle devait s’y prendre pour toucher les parties intimes de l’abbesse. L’enfant dut ensuite se signer avec ses doigts humides. Sur le front, sur les lèvres.
Dès lors, Maria Luisa n’eut plus rien d’innocent, de saint, en elle.
Les actes du procès qui lui fut intenté des années plus tard, contenant notamment ses aveux, sommeillaient à Rome, dans les archives de la Congrégation pour la doctrine de la foi, qui veille au respect du ...