À contre-courant
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Le Nobel ne couronne pas les meilleurs


Walter Sydney Adams, Albert Abraham Michelson, Walther Mayer, Albert Einstein, Max Farrand, Robert Andrews Millikan (1931)

L’Académie des Nobel a égrené tout au long de la semaine les noms des lauréats de ses prestigieux prix pour l’année 2017. Et si ses choix dans le domaine scientifique ne sont pas contestés, l’historien des sciences Robert Friedman rappelle dans The Politics of Excellence que c’est loin d’avoir toujours été le cas. « Ce livre détruit l’illusion que le prix Nobel couronne impartialement et objectivement les meilleurs travaux de physique et de chimie », écrit-il dans la préface.

Ses recherches dans les archives du Nobel lui permettent d’affirmer que dans la première partie du XXe siècle, au moins, l’enjeu de ces prix était moins l’excellence que la promotion d’un petit groupe de scientifiques suédois et de leurs idées. Certains de leurs choix se révèlent purement patriotiques ou politiques, à l’exemple des récompenses décernées à l’inventeur suédois Gustaf Dalén (en 1912) et au physicien suédois Manne Siegbahn (en 1925).

En jeu également, une certaine conception de la physique. Les instructions laissés par Alfred Nobel dans son testament instituant les prix sont très vagues. Leur interprétation a toujours été soumise à controverse. Longtemps le conflit entre une science cantonnée aux expériences pratiques et une conception plus libre de la notion de « découverte » laissant la place aux travaux purement théoriques a fait rage. Pour cette raison, certains récipiendaires, comme l’américain Albert Michelson en 1907 primé pour ses instruments optiques de précision et les études menées grâce à ces appareils, semblent incongrus. Tandis que des travaux déterminants, mais relevant de la seule théorie, n’ont jamais été reconnus. Albert Einstein en est le plus célèbre exemple. Le comité a longtemps résisté à l’idée de voir un juif, pacifiste et qui plus est physicien théoricien récompensé pour ses travaux. Un de ses membres affirmait même que jamais Einstein n’aurait le Nobel. Sous la pression populaire, il lui sera quand décerné en 1921, pour son explication de l’effet photoélectrique, et non la théorie de la relativité.

A lire dans Books : Stupides, ces Nobel, novembre 2015.

LE LIVRE
LE LIVRE

The Politics of Excellence: Behind the Nobel Prize in Science de Robert Friedman, Henry Holt & Company, 2001

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