Misère de la recherche

À part une occurrence dans une obscure revue allemande de pédagogie de l’art, le mot « talentologie », que mon correcteur orthographique souligne en rouge, ne renvoie, sur le Web, qu’à des noms de domaine à vendre. La « géniologie », elle, ne semble sérieusement pratiquée qu’en Suisse, par l’Institut royal de géniologie, « créé par Sa Majesté Helvétius Moins Quatre au temps lointain où les Lumières étaient vraiment des lumières ». Quant au mot « réussitologie », il n’apparaît que dans un texte québécois, paradoxalement consacré à la défense de la langue française : « Nos experts en “réussitologie” auront jugé qu’il serait possible de devenir assez bon journaliste, même si on connaît assez mal son principal outil de travail, c’est-à-dire la langue dans laquelle on s’exprime. » Books, dont l’une des missions est de proposer des idées nouvelles, consacre le dossier de ce mois aux questions que tout le monde se pose sur les raisons cachées des réussites exceptionnelles. Malgré les sept livres brillamment passés en revue, il faut bien l’admettre : aucune de ces questions n’appelle une réponse claire. Aussi suggérons-nous la création, à la Sorbonne, d’une chaire de talentologie, au CNRS, d’un laboratoire de géniologie, et, à l’EHESS, d’un département de réussitologie. Seul moyen, pensons-nous, de tenter sérieusement de savoir ce qu’il faut entendre par « âme bien née » et « tête bien faite », ou encore de creuser cette formule de Pascal, génie précoce autant que mature : « Les mêmes degrés se rencontrent entre les génies qu’entre les conditions. »

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