Contradictions africaines

Une photo récente montre Hillary Clinton, hilare, serrant chaleureusement la main du Premier ministre éthiopien. L’Éthiopie est l’un des principaux bénéficiaires de l’aide occidentale et, par ailleurs, des investissements chinois. C’est aussi une dictature. Les prisons sont pleines de journalistes et de dissidents et les sites Web contestataires bloqués. Les reportages sur les enfants mal nourris sont interdits. « L’Afrique s’éveille », disons-nous. Il ne faut pas voir là une manifestation de crédulité naïve, encore moins de condescendance, mais une référence au point de vue d’une nouvelle génération d’Africains, pour qui l’heure est à la mise en place de formes modernes de gouvernance. En finir avec le clientélisme, la corruption et l’exploitation perverse de l’aide extérieure. Faire progresser la démocratie au sens plein du terme et la notion d’État de droit, permettant aux citoyens de s’informer et de s’exprimer, aux entreprises de prospérer dans un environnement assaini. Pour ne parler que de l’Afrique francophone, la récente mise à l’écart par les urnes d’un chef d’État au Sénégal, la destitution par les armes, en Côte d’Ivoire, d’un despote au profit d’un économiste de haut niveau régulièrement élu, voilà de très bonnes nouvelles. Sur la majeure partie de ce continent de plus d’un milliard d’habitants, les signes d’essor et d’ouverture se multiplient. Mais, comme l’illustre le cas éthiopien, les forces contraires sont légion. Sait-on que les livraisons d’armes russes et chinoises continuent d’alimenter le conflit du Darfour ? Qu’une guerre pour le contrôle de puits de pétrole se déroule au sud du Soudan ? Qu’en Somalie on coupe les mains et on lapide ? Qu’au Cameroun on emprisonne les homosexuels ? Que la Chine, désormais le principal partenaire commercial du continent noir, forme des fonctionnaires africains aux techniques de contrôle des médias ? Cinquante ans après la parution du livre de René Dumont, la question de savoir si l’Afrique est bien partie reste ouverte.  

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