Pourquoi Ionesco n’a pas eu le Nobel

Disciple de Ionesco, Harold Pinter a reçu le Nobel de littérature en 2005. Pourtant son théâtre ne fait pas le poids au regard de l’œuvre de son maître. Lire une pièce de Pinter après une représentation est toujours une déception. Avec Ionesco c’est le contraire, tant le texte est feuilleté de significations multiples, psychologiques et politiques.

Toutes les carrières politiques, dit-on, se terminent en échec, et toutes les tendances littéraires dégénèrent, parfois très vite. Dans ses entretiens avec Eugène Ionesco, publiés en 1966, Claude Bonnefoy lui demandait si les jeunes auteurs dramatiques devaient prendre Beckett comme modèle. Ionesco répondit avec sa subtilité caractéristique : « En tout cas Beckett cultive ses disciples… Avoir des disciples, c’est dangereux, parce que l’école est toujours inférieure au maître. En même temps, s’il n’y a pas de disciples, cela peut signifier que la nouvelle expression stylistique n’est pas ancrée dans la réalité vivante. Ce sont là les contradictions de la littérature. » Beckett et Ionesco furent les deux personnalités majeures de ce que Martin Esslin, critique dramatique britannique d’origine hongroise, appela le « théâtre de l’absurde », expression qui fut rapidement adoptée et se généralisa pour désigner l’œuvre d’auteurs en révolte contre les pièces naturalistes, les « pièces bien faites » comme celles de Terence Rattigan ou d’Arthur Miller, qui dominaient encore les scènes d’Europe et d’Amérique. Aprè...
LE LIVRE
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La Cantatrice chauve de Eugène Ionesco, Gallimard, 1970

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