Retour à l’utopie socialiste

Le parti socialiste a installé cette semaine sa direction collégiale chargée d’établir une nouvelle feuille de route du parti après la débâcle des élections présidentielles et législatives. Si un PS fort semble aujourd’hui relever de l’utopie, l’utopie a elle longtemps inspiré le socialisme de par le monde. Pour ses partisans britanniques (et Tony Blair), News From Nowhere, publié en 1890 par William Morris, est à cet égard un roman incontournable.

Lui-même militant, Morris écrit au moment où le socialisme britannique se trouvait miné par les guerres entre factions. La synthèse semble impossible entre l’aile anarchiste prônant l’usage de la violence pour provoquer le changement et l’aile parlementariste décidée à gagner par la voie des urnes. News From Nowhere paraît initialement sous forme de feuilleton dans le journal de la Ligue socialiste. Dans un article intitulé « Creating a utopian future », le professeur de littérature Marcus Waithe précise qu’il était destiné à un lectorat d’amis, de camarades et de rivaux.

Comme Morris, son héros William Guest est désabusé par ces affrontements internes. Au sortir d’une réunion houleuse, il s’endort pour se réveiller dans le futur. Il découvre alors peu à peu que son idéal s’est réalisé. L’argent a été aboli, tout comme « l’esclavage salarial », ainsi que le mariage et la domination masculine. Le Parlement et le gouvernement ont été remplacés par un système informel de coopérations. Le travail et l’environnement ont été radicalement transformés par la suppression de la course aux profits. Les conditions de vie sont meilleures et l’art est partout au point de ne pouvoir le distinguer des tâches quotidiennes. Cette métamorphose de la société britannique a été obtenue grâce à une révolution sanglante menée en 1962. A la fin de sa vie, Morris a renié ce passage par la violence, mais pas le changement et la société idéale qu’il avait imaginés.