Rien à cacher !

C’est le refrain préféré des avocats de la surveillance : si vous n’avez rien à vous reprocher, vous n’avez rien à craindre des incursions des autorités dans votre vie privée. L’État protège les citoyens respectueux des lois et ne menace que les criminels. Un argument simpliste et plus dangereux qu’il y paraît.


Essai de technologie biométrique par Delta Airlines, 2018. (Photo by John Paul Van Wert/Rank Studios 2018)
Bien des gens ne se disent pas inquiets de ce que les autorités récoltent sur eux des informations personnelles. « Je n’ai rien à cacher, déclarent-ils. Seuls ceux qui ont quelque chose à se reprocher ont des raisons de s’alarmer, et ceux-là ne méritent pas que leurs agissements soient tenus secrets. » Cet argument imprègne l’ensemble du débat sur la vie privée. Selon l’expert en sécurité des données Bruce Schneier, c’est la « réplique la plus couramment opposée aux défenseurs du respect de la sphère personnelle ». « Ce refrain n’est que trop répandu », constate pour sa part le juriste Geoffrey Stone (1). Sous sa forme la plus impérieuse, le raisonnement minimise tant l’importance de la vie privée que, face aux enjeux de sécurité, celle-ci perd nécessairement la partie. L’argument du « rien à cacher » est partout. En Grande-Bretagne, le gouvernement a ainsi installé des millions de caméras de surveillance dans les lieux publics des villes, petites et grandes, dont les images sont examinées par des fonctionnaires de police via un système de télévision en circuit fermé (2). « Si vous ...
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Secrets and Lies: Digital Security in a Networked World de Bruce Schneier, John Wiley & Sons, 2004

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