Un lamento sans vision politique

Michael Sandel a raison de dénoncer la montée en puissance de l’argent dans des domaines inattendus de la vie privée et plus encore dans la gestion de services publics naguère assurés par l’État. Mais son appel à stimuler la vertu, comme s’il s’agissait d’un muscle, est stérile. Il lui manque l’analyse historique et la théorie politique capables de changer le cours des choses.

La dénonciation des effets corrupteurs de l’argent et de la cupidité sur la vertu républicaine ne date pas d’hier. Elle remonte aux critiques stoïciens des derniers temps de la République romaine [lire « Ce que disaient les Anciens », ci-dessous]. En Occident, le langage de la vertu et de la corruption façonne depuis toujours le débat sur ce que l’argent fait à notre âme et à notre vie publique. Après la chute de Rome, le christianisme reprit le combat contre l’empire de l’argent. Jésus chassant les marchands du temple a inspiré deux millénaires de juste colère contre la profanation du sacré par l’argent. Puis, quand le capitalisme est apparu en Europe au début de l’époque moderne, le christianisme s’est consacré au domaine privé, à l’effet corrosif de l’argent sur les âmes, tandis que le domaine public devenait l’affaire du langage républicain de ...

LE LIVRE
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Ce que l’argent ne saurait acheter de Michael Sandel, Le Seuil, 2014

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