Publié dans le magazine Books n° 68, septembre 2015. Par Olivier Postel-Vinay.
Quand deux grands intellectuels, Français d’adoption, acceptent de répondre aux mêmes questions sans connaître leurs positions respectives, ils dessinent de concert le portrait lucide d’une France qui a perdu son optimisme et vit obsédée par la question de son identité, dont ils révèlent les paradoxes. Mais si l’un souligne la nécessité de se redonner un destin collectif, l’autre appelle à une société affranchie du désir d’imposer ses mythes.
D’origine mauricienne, Sudhir Hazareesingh est spécialiste de notre pays est parfaitement francophone. Il a notamment publié en français La Saint-Napoléon : quand le 14 Juillet se fêtait le 15 août (Tallandier, 2006) et La Légende de Napoléon (Tallandier, 2007), ainsi que Le Mythe gaullien (Gallimard, 2010).
Tzvetan Todorov a quitté la Bulgarie à 24 ans pour la France. D’abord théoricien de la littérature, il s’est ensuite tourné vers l’histoire des idées et la réflexion sur la démocratie et l’humanisme. Ses deux derniers ouvrages sont Goya à l’ombre des Lumières (Flammarion, 2011) et Les Ennemis intimes de la démocratie (Robert Laffont, 2012). Tzvetan Todorov est membre du comité éditorial de Books.
Vous êtes l’un et l’autre, chacun à sa manière, des Français d’adoption. En quoi la France vous attirait-elle, au temps de votre jeunesse ?
Sudhir Hazareesingh. C’étaient les années 1970, et j’étais fasciné par la vie intellectuelle française, ses grandes figures, son allant – quel panache ! – et sa prodigieuse ...