Mon corps, ce trophée
Publié dans le magazine Books n° 106, avril 2020. Par Baptiste Touverey.
« Quand au juste est-il devenu normal de courir un marathon ? D’aller au travail à vélo, de passer son samedi après-midi dans une salle de sport et ses vacances en retraite de yoga ? » s’interroge Maja Beckers dans l’hebdomadaire allemand Die Zeit. En 1970, ce n’était pas encore le cas. Cette année-là, seules 127 personnes (dont une femme) participèrent au premier marathon de New York. En 2019, on en dénombrait 50 000.
Le corps, symbole de la réussite
Que s’est-il donc passé entre-temps ? Dans Das Zeitalter der Fitness, l’historien allemand Jürgen Martschukat, lui-même passionné de cyclisme, raconte comment, à partir des années 1970, le corps est devenu le symbole de la réussite et de la performance. Car avec le fitness tel que l’entend Martschukat, il n’est plus question, comme lorsqu’on pratique le football, le basket ou le tennis, de jouer et de passer un bon moment. Il ne s’agit même plus de remporter une médaille, mais « d’obtenir un corps bien entraîné », résume Tobias Becker dans l’hebdomadaire Der Spiegel