Dans un article fouillé et nuancé, le journaliste et essayiste américain Christopher Caldwell est revenu dans la
London Review of Books sur le scandale créé par le livre de Pierre Péan sur Bernard Kouchner. Il s’étonne que le gros du débat ait porté sur les allégations de corruption portées à l’encontre de l’actuel ministre des Affaires étrangères, alors que l’ouvrage pose en profondeur (bien qu’avec partialité) la question fondamentale de la légitimité du droit d’ingérence pour motif humanitaire. Les relations douteuses que Kouchner a entretenues avec le groupe Total en Birmanie ainsi qu’avec les autorités gabonaises ne font guère de doute, mais après tout, souligne Caldwell, elles ne dérogent pas vraiment à une tradition française bien établie de compromission des personnalités publiques. Beaucoup plus stimulante est l’analyse que fait Péan de l’itinéraire idéologique de sa bête noire.
La carrière humanitaire de Kouchner a commencé, on le sait, avec son départ pour le Biafra dans le cadre d’une mission de la Croix-Rouge. C’est là qu’il se départit de ...