« J’ai vu le cadavre d’un chien dans un arbre »

C’est l’histoire d’une ville où les snipers font joujou avec les civils, où les blousons ensanglantés jonchent les rues, où l’on défaille à la vue d’une boîte de corned-beef tant la faim tenaille. Mais où l’on tombe amoureuse aussi, quand on a 14 ans, l’âge d’Anne Frank. Et celui de Polina au moment où elle décide de raconter dans un journal sa vie à Grozny sous les bombes. Extrait de ce témoignage inédit, avant sa sortie chez Books éditions en septembre.

6 février 2000 Il fait froid. Nous sommes à la maison. Nous dormons emmitouflées dans plusieurs vieux manteaux. Cela fait des semaines que je n’ai pas quitté mes chaussures. Le poêle-lessiveuse chauffe à perte notre appartement sans vitres. Il crache de la vapeur, comme s’il était dehors. Nos mains sont rouges de froid, on dirait des pattes d’oie. Ce matin, je n’ai pas mal à la jambe droite. Le gros éclat a abdiqué. Fais dodo, mon petit camarade en fer ! Des soldats sont venus chez nous. Ils ont vérifié nos papiers. Ils ont inscrit les noms de tous les habitants et ont dit brutalement : – Si des tirs proviennent de vos immeubles ou de vos jardins sur notre position, nous vous abattons tous ! – Ceux qui tiraient sont partis depuis longtemps, a répondu maman. Nos immeubles ne sont habités que par des civils épuisés par la guerre ! Il y a des vieillards, des enfants. Il n’y a pas de combattants ici ! Les soldats ne nous ont pas injuriés. Ils étaient sobres. Dès qu’ils sont arrivés, je me suis carapatée chez les grands-mères d’à côté. Je n’...
LE LIVRE
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Le Journal de Polina de « J’ai vu le cadavre d’un chien dans un arbre », Books éditions

Dans le magazine
BOOKS n°123

DOSSIER

Faut-il restituer l'art africain ?

Chemin de traverse

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Edito

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Bestsellers

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