La civilisation est née du poisson-chat
Publié le 19 janvier 2018. Par La rédaction de Books.
Le Parlement européen s’est prononcé, mardi, pour l’interdiction de la pêche électrique. Cette méthode contestée réinvente la seule façon d’obtenir de la nourriture à n’avoir presque pas évolué depuis des milliers d’années. Le filet, la lance, le piège, la ligne et l’hameçon étaient déjà utilisés pendant la préhistoire. Mais les historiens ont longtemps considéré que la pêche était une activité périphérique, une simple affaire d’opportunisme contrairement à la chasse, la cueillette, l’élevage et l’agriculture. Jusqu’à ce que les outils des scientifiques, et notamment les tamis, deviennent plus fins et permettent de récupérer systématiquement les arrêtes de poisson, explique l’archéologue Brian Fagan dans Fishing.
Des arrêtes de poissons-chats retrouvées en Afrique de l’est, dans des sédiments vieux de 1.75 million d’années dans la Gorge d’Olduvai ou dans des dépôts du Lac Turkana datant de 1,95 million d’années, attestent de sa consommation. Cette espèce qui s’attrape facilement dans les mares éphémères crées par la crue annuelle de certains fleuves en fait une ressource prédictible. Mais pour Fagan, la pêche n’est pas qu’un simple moyen de subsistance. « Elle a créé le monde moderne », assure-t-il.
Il voit dans le fait que les habitants des côtes sud-africaines il y a 165 000 ans aient transformé les coquilles des mollusques qu’ils mangeaient en ornements « le signe le plus ancien d’une évolution qui a abouti à nos facultés cognitives actuelles ». La pêche a été le prétexte des premiers voyages maritimes et aussi, il y a 17 000 ans, le fondement de la hiérarchisation des sociétés. Devenue lucrative, elle a permis aux communautés de se sédentariser et de se spécialiser. Elle était d’ailleurs vitale pour nombre de civilisations antiques. Sans elle, « les pharaons n’auraient jamais bâti les pyramides de Gizeh », assure Fagan. Inventeurs de la pêche à la senne, les marins égyptiens fournissaient les rations de poisson-chat séché pour les esclaves et les travailleurs.
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