Publié dans le magazine Books n° 35, septembre 2012. Par Edward Rothstein.
Existe-t-il chez tous les artistes au grand âge un « style tardif », qui serait comme une apothéose ? Dans cet ensemble de textes écrits précisément à la fin de sa vie, Edward Said se penche sur les cas de Beethoven, Genet ou Glenn Gould. Et voit dans leurs dernières œuvres l’expression du tourment plus que de la sagesse accumulée.
Quel artiste n’aspire pas, un jour, à posséder un « style tardif » ? Un style qui refléterait une vie d’apprentissage, la sagesse qui naît de l’expérience, la mélancolie qui naît de la sagesse et une parfaite maîtrise de son art. Un style qui récapitulerait les thèmes d’une vie, reviendrait sur les problèmes résolus et commencerait à en aborder d’autres, appelés à rester en suspens.
Même lorsque ce genre d’apothéose n’a pas été accordée à un artiste, les critiques s’obstinent à vouloir en discerner une. Nous tenons à être rassurés sur le fait que l’esprit humain progresse. Nous voulons croire que, lors de cette confrontation finale avec notre condition de mortels, quelque chose de profond se produit. Lorsque la fin approche, nous voulons que l’œuvre en témoigne, par une perspicacité inédite.
Peut-être est-ce ce type d’élan qui a poussé Edward Said à s’intéresser au style tardif durant les années qui ont précédé sa mort, en 2003. Vers le début de sa carrière, il avait écrit
Beginnings. Intention and Method (« Commencements. Intention et ...