L’écrivain et le chancelier

La correspondance entre Günter Grass et Willy Brandt, premier social-démocrate à gouverner l’Allemagne après 1945, révèle des destins étonnamment croisés : l’un est hésitant et mélancolique, l’autre est résolu et d’une rare intelligence politique. Devinez qui est qui…

Sur le tarmac ruisselant de l’aéroport de Berlin-Tempelhof, ce 6 septembre 1961, deux hommes montent dans un minuscule biréacteur affrété spécialement. Quatre semaines plus tôt, la RDA a verrouillé dans la nuit sa frontière avec l’Ouest ; le drame de la partition allemande a commencé – en pleine campagne électorale. Les passagers qu’un pilote anglais conduit à Stuttgart sont des vedettes de la jeune République fédérale : le social-démocrate Willy Brandt, alors âgé de 47 ans et maire de Berlin, est candidat à la chancellerie, pour prendre la succession d’Adenauer ; il emmène avec lui en meeting un romancier de 33 ans qui vient de secouer le pays avec Le Tambour, son premier roman. Il s’appelle Günter Grass. La veille au soir, lors d’une rencontre avec un groupe d’écrivains, Brandt a demandé si l’un d’eux avait par hasard des idées pour ses discours. « Moi, la terreur des bourgeois, se souvient Grass [dont la réputation d’anarchiste était bien établie], je fus le seul à lever le doigt. » Il devait par la suite lever le doigt un nombre incalculable de fois. Ces deux hommes furent l’un ...
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Correspondance de G. Grass et W. Brandt de L’écrivain et le chancelier, Steidl

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