Publié dans le magazine Books n° 54, mai 2014. Par Akash Kapur.
Il s’appelle R. Sathyanarayanan, mais tout le monde, dans ce village du sud de l’Inde, l’appelle Sathy. Issu d’une famille de féodaux de haute caste, le fermier marié à une femme de la ville observe la modernité chambouler les comportements, les valeurs et les hiérarchies sociales de son pays. Partagé entre l’enthousiasme et l’effroi.
Molasur se trouvait à quelques centaines de mètres en retrait de la grande voie de circulation. On y accédait par une petite route criblée de nids-de-poule ; elle n’avait pas été goudronnée depuis des décennies. La maison de Sathy se dressait à l’entrée du village. C’était une maison traditionnelle, bâtie au XIXe siècle, avec des murs blanchis à la chaux, un toit de tuiles et des sols de ciment toujours frais, même en été.
À chacune de mes visites, Sathy me servait un délicieux café préparé selon la méthode de l’Inde du Sud. Il y ajoutait un peu de lait frais tiré au pis de la vache attachée dans une cour derrière la maison. La mère de Sathy était en générale assise à la cuisine, dans un fauteuil en rotin installé sur le seuil de la porte donnant sur cette cour, juste assez près du soleil pour en avoir la lumière, mais pas la chaleur.
Sathy habitait dans cette maison avec sa mère, une sœur et plusieurs autres membres de la famille. Sa chambre, à l’étage, possédait un balcon couvert ...