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Naissance d’une immortelle

L’Académie française a perdu l’un de ses célèbres résidents cette semaine après le décès de Jean d’Ormesson. Son fauteuil vacant accueillera bientôt un ou une nouvelle immortelle élue par ses pairs. Hélène Colobry est candidate dans Le Vingtième siècle d’Albert Robida. Mais dans ce roman d’anticipation l’Académie a beaucoup changé.

 

« Et puisque c’est résolu, dit M. Ponto, puisqu’Hélène se lance dans la littérature, elle va dès demain matin présenter sa candidature à l’Académie française !

— Ma candidature à l’Académie ! s’écria Hélène.

— Sans doute ! il faut commencer sérieusement !

— Je ne savais pas qu’il fallût déjà… je croyais…

— Quoi ?

— Mais c’est au moins trop tôt… je débute… je n’ai même pas encore débuté !

— C’est le vrai moment au contraire !… Et c’est l’usage général. Du moment où vous vous lancez dans la littérature, vous avez intérêt à poser votre candidature de bonne heure, parce qu’on est admis à l’Académie au choix et aussi à l’ancienneté…

— À l’ancienneté ! s’écria Hélène.

— Sans doute ! vous ignorez donc cela ? La constitution de l’Académie française subit un remaniement complet en 1925. À l’origine, dans la nuit des temps, lorsque la France comptait à peine quatre-vingts ou cent littérateurs, on s’était contenté de quarante fauteuils ; mais quand le nombre des littérateurs se trouva plus que centuplé, l’Académie devint beaucoup trop étroite. Après bien des tergiversations, après avoir ajouté d’abord quarante tabourets et quelques divans pour académiciennes, on en vint à une mesure depuis longtemps réclamée par la presse. On démolit le palais de l’Institut pour le reconstruire dans des proportions convenables, avec une très vaste salle des séances, des salons particuliers et même quelques boudoirs pour les académiciennes. Puis, un décret du pouvoir exécutif porta le nombre des académiciens à quatre cents et fixa lé nouveau mode de recrutement. C’était déjà gentil, mais ce n’était pas assez ; si l’on avait voulu rester dans les proportions du xviie siècle, il aurait fallu quatre mille fauteuils. La presse entreprit une campagne dans ce sens ; mais, vu les difficultés matérielles, on ajouta seulement aux quatre cents fauteuils de la nouvelle Académie deux cents strapontins d’attente.

— Et je dois poser dès maintenant ma candidature ?

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— C’est l’usage. Votre candidature posée, l’Académie a les yeux sur vous ; si vous avez des succès, elle vous appellera dans son sein ; si vous n’y arrivez pas au choix, vous y entrerez par l’ancienneté, après trente ou trente-cinq ans de stage… voilà pourquoi vous avez intérêt à vous faire inscrire de bonne heure… vous ferez vos visites demain. »

Hélène se retira dans sa chambre sur cette parole. Elle s’endormit joyeuse d’en avoir fini avec le Conservatoire, et se vit déjà en rêve assise sur un fauteuil à palmes vertes, sous la grande coupole de l’Institut.

Ponto la réveilla le lendemain matin de bonne heure par la sonnerie de son téléphone de chevet.

« Dépêchez-vous, disait-il, mettez-vous en toilette de cérémonie, vous commencez vos visites tout de suite ; j’ai demandé par téléphone au concierge de l’Institut l’adresse des académiciens à visiter… »

Hélène se hâta de s’habiller. Elle endossa une toilette délicieuse, à la fois élégante et sérieuse, une jaquette bleu lophophore avec jupe à retroussis, relevée au genou et laissant voir les culottes de velours et les bas de soie noire.

Elle déjeuna seule, ses cousines Barbe et Barnabette étant à leurs bureaux de la Banque et Mme Ponto déjà partie. M. Ponto redemandait un supplément de renseignements au concierge de l’Institut. Il arriva bientôt avec une longue liste d’adresses.

« Voici, dit-il, tous les renseignements qui vous sont nécessaires.

— Est-ce qu’il faut que je voie les quatre cents membres de l’Académie ?

— Non, vous comprenez que la vie des candidats se passerait en visites… vous n’avez à voir que les chanceliers ; chaque groupe de quarante académiciens a un chancelier, cela fait dix chanceliers, car vous n’avez pas à vous occuper des deux cents strapontins… Voici les noms et adresses, avec quelques petits renseignements sur les œuvres de ces messieurs… vous aurez soin de semer adroitement quelques titres d’ouvrages dans la conversation…

— Et j’y vais seule ? demanda timidement Hélène.

— Sans doute !

— Oh ! que c’est loin ! fit Hélène en consultant sa liste : voici un académicien qui demeure à Bordeaux…

— Une heure par le tube de Paris-Madrid-Oran, avec la course pour la gare…

— Et un autre à Dunkerque.

— Un quart d’heure de tube… Les autres sont à Paris même ou dans les environs, à Orléans… Compiègne… En trois jours vous pouvez en avoir fini avec vos visites. Commencez par l’académicien de Bordeaux. »

Un aérocab de M. Ponto conduisit Hélène à la gare de Paris-Madrid-Oran. Un train demi-express partait toutes les heures pour Oran, où la ligne se raccordait avec celle de Tombouctou-Koumassie et le Grand-Central africain des lacs Nyanza et Tanganika.

Que les esprits grincheux se plaignent encore de la lenteur des voyages, les tubes n’en sont pas moins une des plus merveilleuses conquêtes modernes. Sait-on ce qu’il fallait jadis d’heures pour aller à Madrid ? C’est inimaginable ! Aujourd’hui le tube vous y transporte en une heure et demie par train omnibus et en moins d’une heure par le grand express.

La gare du Midi est une des plus animées ; c’est une gare aérienne comme presque toutes d’ailleurs, puisque les tubes arrivent à Paris sur de longs viaducs de fer. Elle s’élève au-dessus du plateau de Montsouris sur de légères, mais solides arcatures de fer. Les voyageurs arrivant à l’embarcadère par les voies aériennes n’ont qu’à entrer dans le tube, les autres montent par les ascenseurs électriques toujours en mouvement.

Hélène arriva juste pour le départ du train. Elle avait son carnet de timbre-tubes qui servent à payer les voyages sur n’importe quelle ligne, comme les timbres-poste pour les lettres, elle n’eut donc qu’à monter en tube. Chaque train se compose d’un certain nombre de cylindres creux et capitonnés, vissés les uns aux autres ; ces cylindres communiquent entre eux par une allée et l’on entre par le dernier.

Chaque cylindre porte, écrit en grosses lettres, le nom de la station où il doit s’arrêter ; par un mécanisme ingénieux, en arrivant à cette station, il se détache de lui-même, pendant que le train continue sa course sans le moindre arrêt.

Hélène s’assit dans le cylindre à destination de Bordeaux. Elle sentit les cylindres se mouvoir pour entrer dans le tube, une manœuvre terriblement compliquée qui s’exécute pourtant en une minute et demie et soudain les puissantes machines électro-pneumatiques de la gare ayant joué, elle sentit ou plutôt elle devina que le train tout entier était lancé dans le tube.

Quelle formidable puissance que celle qui projette ainsi quarante cylindres et huit cents voyageurs avec une vitesse de quatre cents lieues à l’heure et, ce qu’il faut noter, avec la plus complète sécurité pour les personnes entassées dans les cylindres ! Quel progrès réalisé depuis les capilotades de voyageurs du temps des chemins de fer ! Dans les tubes on n’a rien à craindre. Pas de déraillements et pas de chocs avec des trains venant en sens inverse, puisque sur chaque ligne il y a deux tubes parallèles affectés l’un à l’aller, l’autre au retour.

Le pis qui puisse arriver, c’est de passer sa station, quand par suite d’un manque d’huile dans les pas de vis, un cylindre ne se détache pas au moment voulu, ou bien, ce qui est excessivement rare, lorsqu’un train en retard se trouve tamponné à l’arrière par le train suivant.

Ceci arriva justement au train d’Hélène. Par suite d’une petite distraction de l’ingénieur au moment de la fermeture du tube et de la mise en communication avec les machines, le train avait été lancé avec un dixième de perte dans la force réglementaire. Il en résulta que le grand express parti vingt-cinq minutes après rattrapa le train en retard un peu avant Bordeaux et le poussa violemment en avant.

Hélène, placée dans le dernier cylindre, ressentit une secousse qui la fit vaciller sur ses voisins ; une dame qui se levait pour prendre sa valise dans le filet s’assit par terre, et ce fut tout.

« Bon, nous sommes tamponnés par l’express ! dit un monsieur, nous allons à Madrid… C’est ennuyeux, moi qui suis attendu à déjeuner à Bordeaux !

— Comment ! nous ne nous arrêterons pas avant Madrid ! s’écria Hélène.

— Nous sommes lancés, nous ne pouvons plus nous arrêter ! Nous pourrons reprendre le tube de midi 55 à Madrid, mais nous n’arriverons à Bordeaux qu’à 1 h. 20 ! J’ai manqué mon déjeuner ! un déjeuner d’affaires ! j’intente un procès à la compagnie ! »

Hélène attendit philosophiquement que le train voulût bien s’arrêter. Une demi-heure après, en gare de Madrid, le grand express cessant de pousser, le train de Bordeaux s’arrêta. L’ingénieur de la gare fit bifurquer

les cylindres et les embrancha dans la ligne de retour. Il était midi deux. Hélène avait cinquante-trois minutes pour visiter Madrid ; elle prit un aérocab et donna l’ordre au mécanicien de la conduire aux endroits intéressants. Elle visita — aériennement — le Prado, les musées, le Palais-Royal, avec un petit crochet de quelques lieues vers Tolède et descendit acheter quelques oranges à la Puerto del Sol. Il eût été désagréable de venir en Espagne sans voir au moins une course de taureaux. Comme elle avait encore dix-huit minutes avant le départ, son mécanicien lui proposa de la conduire au-dessus de la plaza de taureaux où se donnait justement en matinée une grande corrida au bénéfice de l’œuvre des jeunes danseuses.

Hélène y consentit. En quelques minutes son aérocab la conduisit à 35 mètres au-dessus de l’arène. Un taureau noir courait après les banderillos, il venait d’éventrer quatre chevaux et d’étourdir deux picadors. Hélène, en frémissant, le vit jeter en l’air un malheureux chulo ; épouvantée, elle donna l’ordre à son mécanicien de repartir bien vite, mais elle avait affaire à un dilettante qui ne consentit à marcher qu’après la course.

Il était midi 54 lorsqu’Hélène descendit à la gare ; elle n’eut que le temps de monter dans le cylindre et le train partit.

Le seul inconvénient des tubes, c’est que l’on ne peut admirer le paysage. Il faut se résoudre à traverser les plus belles contrées sans même les entrevoir. On parle bien d’employer dans la confection des tubes le verre épais, mais transparent, à la place du fer ; mais ce progrès n’est pas près de se réaliser, les compagnies reculant devant l’énorme dépense.

Hélène, regrettant de n’avoir pu apercevoir les vertes Pyrénées, arriva enfin à Bordeaux. — L’académicien était à Paris et ne devait revenir que pour le dîner. Il fallut encore attendre.

Quand, un peu avant l’heure du dîner, elle se présenta chez l’immortel, elle fut immédiatement admise.

« Monsieur, lui dit-elle, je viens vous prier de m’inscrire sur la liste des candidats à l’Académie ; si vous vouliez me faire l’honneur, à l’occasion, de m’accorder votre voix, je serais heureuse et fière de m’asseoir un jour à côté de l’illustre… »

La jeune candidate s’arrêta un instant, elle ne se rappelait plus si l’immortel était historien, poète ou simplement orateur. Troublée par l’accident du tube, elle avait oublié de consulter la note de M. Ponto contenant les renseignements indispensables.

« Du grand homme, reprit-elle, tournant la difficulté, dont les œuvres sont dans toutes les mains… »

Le mot était à peine parti qu’elle se souvint tout à coup que l’immortel était un grand orateur de la Chambre. Elle aurait dû dire dans toutes les oreilles. Mais l’immortel n’avait pas bronché, dans toutes les mains ne l’avait pas choqué, ses discours étant publiés en plaques phonographiques pour servir aux études des aspirants orateurs.

L’académicien ouvrant un tiroir de son bureau en tira un gros volume sur la couverture duquel Hélène lut les mots : Académie française.

— Voici mes listes, dit l’académicien, je vais vous inscrire… Voyons, vous avez le numéro 46,892.

— 46,892 ! s’écria Hélène, mais alors…

— Rassurez-vous, dit l’académicien ; on a commencé en 1925 et nous en sommes maintenant au numéro 38,722… à la promotion du mois prochain nous avons quatorze fauteuils ou strapontins à garnir, nous nommerons sept académiciens au choix et nous en prendrons sept à l’ancienneté… Ce sont les numéros 38,722 et suivants qui passent ! vous voyez que vous avez de l’espoir, dans trente ou trente-cinq ans au plus, ce sera votre tour…

— Monsieur, agréez tous mes remerciements…

— Il n’y a pas de quoi… je souhaite vivement, mademoiselle, répondre à votre discours de réception… dans trente-cinq ans ! »

L’aspirante immortelle reprit le tube pour Paris, heureuse d’être inscrite sur les registres de l’illustre Compagnie.

Pour se reposer de son voyage en Espagne, Hélène résolut de ne visiter le lendemain que les académiciens domiciliés à Paris. L’un d’eux, justement, demeurait dans le quartier de M. Ponto, du côté de Bougival. Hélène commença par celui-là ; mais avant de sortir, se souvenant de son embarras de la veille, elle demanda un supplément de renseignements sur l’académicien à son tuteur.

— M. Camille Gildas ? dit M. Ponto, c’est comme reporter qu’il est de l’Académie française, section des journalistes. Vous devez avoir souvent lu ou entendu de sa prose : le quadruple assassinat de la rue *** à *** ou bien, découpé en petites tranches étiquetées : Le théâtre du crimeLe drameDécouverte des cadavresNos présomptionsLa piste de l’assassin ! ou encore :

« La catastrophe de Tripoli. Six cents cadavres. Parti en toute hâte par train spécial du tube transméditerranéen, nous arrivons à Tripoli une heure et demie seulement après l’explosion ! Le quartier manufacturier est en flammes ; l’horreur du spectacle nous pénètre malgré nous à cette première minute, mais, nous revêtons notre costume incombustible et, la hache à la main, nous nous lançons à travers les flammes en déroulant derrière nous le fil qui vous transmet cette dépêche… »

« Bien, dit Hélène en montant en aérocab, je sais ce que je dirai… »

Son aérocab la porta en trois minutes au débarcadère de la maison de M. Camille Gildas.

« Que désire madame ? demanda le concierge en sortant de son petit belvédère.

— M. Camille Gildas ? demanda Hélène.

— Il est sorti, répondit le concierge.

— Quand rentrera-t-il ?

— Je ne sais pas ; il vient de partir il y a dix minutes pour Buenos-Ayres.

— Quel ennui ! fit Hélène contrariée.

— Attendez, le ballon transatlantique lève l’ancre à onze heures, vous n’avez qu’à vous rendre aux docks aériens d’Asnières, vous pourrez encore voir M. Gildas.

— Aux docks des transatlantiques à Asnières, vite, dit Hélène à son mécanicien. »

En approchant d’Asnières, dix minutes après, Hélène put voir se balancer, à deux cents mètres en l’air, trois grands transatlantiques en partance. Une animation extraordinaire régnait autour de ces ballons monstres, des myriades d’aérocabs amenaient les voyageurs, des gabarres aériennes et des chalands montaient les caisses de marchandises ; des ingénieurs de l’administration, en aéronefs, faisaient une dernière inspection de la coque et de toutes les manœuvres des énormes aérostats. C’était un va-et-vient formidable entre les ballons et la terre. L’aérocab d’Hélène se glissa parmi l’escadre volante.

« Quel est le ballon en partance pour la République argentine ? demanda Hélène en passant devant une gabarre de l’administration.

— Le Tissandier ! » répondit un matelot.

Le Tissandier, un des plus beaux ballons de la Compagnie transatlantique, se balançait au souffle du vent entre le Nadar, en partance pour Melbourne, et la Landelle, chargée de marchandises pour Java, Bornéo et la Nouvelle-Guinée.

Le petit aérocab aborda le Tissandier par les échelles de tribord. Hélène, au milieu de la foule des voyageurs en train de faire leurs adieux à leurs familles, trouva enfin un officier du bord.

« Je voudrais voir un de vos passagers, M. Camille Gildas, de l’Académie ? dit-elle.

— Il est dans sa cabine, en train d’arrimer ses effets, répondit l’officier ; je vais vous y faire conduire. »

Hélène, guidée par un matelot, arriva en escaladant des montagnes de colis, en se faufilant parmi les groupes, jusqu’aux cabines de première classe.

« C’est ici, dit le matelot en montrant une porte ouverte. »

Hélène passa la tête par l’entre-bâillement en commençant une phrase de politesse.

« Je prie monsieur Camille Gildas, de l’Académie française, d’excuser… »

Elle s’arrêta stupéfaite.

L’occupant de la cabine avait un casque de scaphandre sur la tête, avec un long tuyau se balançant comme une trompe à la hauteur du nez. Parmi des amoncellements de caisses ouvertes, d’ustensiles éparpillés, de paquets jetés sur le plancher, solidement campé sur les jambes, il essayait de rattacher la trompe de son scaphandre au réservoir à air qu’il portait sur son dos comme un sac de soldat.

Était-ce bien un académicien qu’elle avait devant elle ? Hélène eut quelques doutes.

« Est-ce bien à M. Gildas, de l’Académie française, que j’ai l’honneur de parler ? demanda-t-elle.

— À lui-même, répondit le monsieur avec une voix qui sortait du tuyau à air.

— Monsieur, c’est comme candidate que je me présente devant vous. Je viens vous prier d’agréer ma candidature et de vouloir bien m’inscrire sur les listes de l’Académie… Je vais débuter dans la littérature et j’espère, par mes efforts, arriver à me rendre digne du grand honneur de m’asseoir sous la coupole de l’Institut, non loin de l’illustre journaliste que…

— Prenez un siège, je vous prie, mademoiselle, dit l’académicien qui venait de réussir à rattacher les courroies de son réservoir à air, je suis à vous immédiatement… vous voyez que je suis en train de vérifier le contenu de mes malles… on oublie toujours quelque chose… Je n’emporte que le strict nécessaire, les objets indispensables… revolvers, scaphandres, costume d’incendie, paraballes, parapluie-tente, hélicoptère de voyage, etc. Je vais à Buenos-Ayres pour la huit cent douzième révolution… j’aurais pu prendre le tube maritime pour New-York et gagner la République argentine par les tubes terriens, mais j’ai préféré la voie aérienne ; la révolution n’est annoncée que pour la semaine prochaine, le président m’a téléphoné que j’avais le temps…

— Ah ! monsieur, dit Hélène, j’ai été si souvent troublée en lisant vos articles et vos dépêches, je vois que je puis encore me préparer à de violentes émotions !

— Nous disons donc, reprit Camille Gildas en tirant son carnet, candidate à l’Académie, mademoiselle ?…

— Hélène Colobry…

— Dans quel genre comptez-vous briller ?…

— Je ne sais pas encore, balbutia Hélène embarrassée.

— Bon, cela ne fait rien, je vous inscris… si vous n’avez pas de préférence, je vous conseille le journalisme ; les autres branches de la littérature ont fait leur temps ; la poésie, l’histoire, le roman sont bien usés… pensez-y, mademoiselle.

— Je vous remercie, monsieur, et je vous souhaite un bon voyage. »

L’académicien tendit cordialement la main à la candidate.

« Avez-vous fait toutes vos visites, mademoiselle ; non ? Ne vous donnez donc pas tant de peines, allez cette après-midi à l’Académie, il y a grande séance ; vous trouverez tous mes collègues réunis, vous ferez ainsi vos visites en bloc.

LE LIVRE
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Le Vingtième siècle de Albert Robida, Georges Decaux, 1883

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