Publié dans le magazine Books n° 44, juin 2013. Par Takis Théodoropoulos.
Grec d’Alexandrie, Cavafis était un pur produit de sa ville. Parlant le français, l’anglais et l’arabe, connaissant le latin et le grec ancien, il est aujourd’hui reconnu comme un très grand poète. Homosexuel discret, passionné par le passé, il tourna le dos aux péripéties de son temps, envoyant ses poèmes à un petit cercle de lecteurs choisis.
Il m’est difficile de parler d’une œuvre dont la lecture m’est devenue au fil du temps comme une deuxième nature littéraire. La poésie de Cavafis – j’ai du mal à parler de « poèmes » – est une constante dans l’idée de la littérature qui s’est incrustée dans mon subconscient d’écrivain où elle se juxtapose à Dostoïevski, à Kafka, aux premiers dialogues de Platon, ainsi qu’au goût romanesque du XIXe siècle français. Des matières bien hétéroclites, je l’admets, mais que je me refuse à soumettre au travail de l’analyse. Depuis l’âge de 14 ans, quand j’ai ouvert pour la première fois les deux volumes de ses œuvres, la lecture de Cavafis est devenue une habitude, un peu comme la cigarette. J’ai trop fumé dans ma vie mais pourtant je n’hésite pas à allumer la énième cigarette chaque fois que je me retrouve devant les cylindres élégants et dociles qui n’attendent que mes doigts pour se consumer.
Je lis Cavafis au fur et à mesure, en ouvrant le livre au hasard. Dans la plupart des cas je m’arrê...