Quintessentiellement français !
Voici un livre “quintessentiellement” français. Je le dis sans intention péjorative, ni méliorative non plus. Disons simplement qu’un livre est français pour le meilleur et pour le pire. Car la France est non seulement le pays où les hommes politiques écrivent des livres, mais celui aussi où les intellectuels font de la politique », ironise dans Letras Libres le politologue espagnol Manuel Arias Maldonado au sujet de la traduction espagnole du livre des Glucksmann, père et fils, Mai 68 expliqué à Nicolas Sarkozy, paru en février 2008 aux éditions Denoël. « Un livre français de plus, donc, sur Mai 68. Sur ces événements brefs qui secouèrent Paris et furent étrangement érigés en épitomé de la contestation globale du système – sans qu’il semble très important à ce stade de savoir au nom de quoi se soulevèrent exactement les uns et les autres, ni au juste contre quel système. »
Le 29 avril 2007, en plein meeting de campagne présidentielle, Nicolas Sarkozy se lançait dans une violente diatribe contre Mai 68. Ce livre est une réponse au désormais président de la République française, en forme de défense de 68. Défense qui débouche sur un terrain où les soixante-huitards n’auraient jamais pensé se retrouver un jour : celui du libéralisme. « Selon Glucksmann père, l’anti-autoritarisme radical du soulèvement de Mai aurait eu pour fondement une fuite hors du politique. Cette négation de la réalité par toute une génération se serait ensuite manifestée de diverses façons. Au niveau philosophique, elle se serait traduite, avec les Derrida & Co., par la fin de la suprématie de la Raison et de la Vérité au profit de la notion d’interprétation. Du point de vue historique, elle aurait débouché sur l’avènement d’une Europe aux principes moralisateurs mais impuissante à agir : Rwanda, Tché-tchénie et Balkans. Enfin, au niveau politique, elle aurait engendré la désaffection croissante des citoyens pour l’État et l’intérêt public au profit des libertés individuelles », résume le politologue. « Soyons sérieux : les quelques journées parisiennes de Mai ne méritent pas tant. Ce sont les sempiternels débats intellectuels sur ces événements qui ont fini par leur attribuer une valeur démesurée, par en faire la cristallisation symbolique de transformations sociales bien plus larges : celles engendrées par la démocratisation des sociétés post-industrielles de masse ». Loin de constituer un acte décisif du processus de libéralisation des sociétés occidentales, 1968 fut au mieux, pour l’Espagnol, une « mise en scène des temps nouveaux qui s’annonçaient ». Une « épiphanie libérale », en somme. Mais certainement pas une « expérience philosophique collective » comme le suggère André Glucksmann, qui y voit la réactualisation de l’insubordination de la philosophie face à la politique. Quelque part entre la subversion socratique et le scepticisme montaignien… Vu depuis un pays qui vivait alors sous la dictature franquiste, « Mai 68 n’est qu’un fétiche français de plus ».
Le 29 avril 2007, en plein meeting de campagne présidentielle, Nicolas Sarkozy se lançait dans une violente diatribe contre Mai 68. Ce livre est une réponse au désormais président de la République française, en forme de défense de 68. Défense qui débouche sur un terrain où les soixante-huitards n’auraient jamais pensé se retrouver un jour : celui du libéralisme. « Selon Glucksmann père, l’anti-autoritarisme radical du soulèvement de Mai aurait eu pour fondement une fuite hors du politique. Cette négation de la réalité par toute une génération se serait ensuite manifestée de diverses façons. Au niveau philosophique, elle se serait traduite, avec les Derrida & Co., par la fin de la suprématie de la Raison et de la Vérité au profit de la notion d’interprétation. Du point de vue historique, elle aurait débouché sur l’avènement d’une Europe aux principes moralisateurs mais impuissante à agir : Rwanda, Tché-tchénie et Balkans. Enfin, au niveau politique, elle aurait engendré la désaffection croissante des citoyens pour l’État et l’intérêt public au profit des libertés individuelles », résume le politologue. « Soyons sérieux : les quelques journées parisiennes de Mai ne méritent pas tant. Ce sont les sempiternels débats intellectuels sur ces événements qui ont fini par leur attribuer une valeur démesurée, par en faire la cristallisation symbolique de transformations sociales bien plus larges : celles engendrées par la démocratisation des sociétés post-industrielles de masse ». Loin de constituer un acte décisif du processus de libéralisation des sociétés occidentales, 1968 fut au mieux, pour l’Espagnol, une « mise en scène des temps nouveaux qui s’annonçaient ». Une « épiphanie libérale », en somme. Mais certainement pas une « expérience philosophique collective » comme le suggère André Glucksmann, qui y voit la réactualisation de l’insubordination de la philosophie face à la politique. Quelque part entre la subversion socratique et le scepticisme montaignien… Vu depuis un pays qui vivait alors sous la dictature franquiste, « Mai 68 n’est qu’un fétiche français de plus ».