Réchauffement climatique

A l’approche du sommet de Copenhague, Charlie, en bon citoyen, se dit qu’il doit mettre ses idées au clair sur la question du réchauffement climatique. Il se rend donc sur Google, tape « réchauffement climatique » et voit apparaître en tête de gondole, comme il se doit, l’article de Wikipédia consacré au sujet.

Il a d’abord un mouvement de découragement, car le total, les 184 notes comprises, représente plus de 132 000 signes. Prenant son courage à deux mains, il imprime le tout. Nous sommes le 13 novembre 2009 à 12h 41.

Alerté par les problèmes rencontrés lors de ses premiers démêlés avec des articles de Wikipedia, Charlie se penche d’emblée sur la question des sources. Il a en tête la formule présentée par Wikipédia dans l’article consacré à elle-même : « La neutralité de point de vue consiste à présenter objectivement les idées et les faits rapportés par des sources extérieures vérifiables et notoires, indépendamment des préjugés des rédacteurs des articles».

La question du réchauffement climatique étant pour l’essentiel de nature scientifique, Charlie s’attend à trouver principalement des sources relevant de la littérature scientifique. Ce n’est pas le cas. Il repère bien un certain nombre de sources relevant de cette littérature (comme le dernier rapport du GIEC), mais en réalité  la majorité des sources qui ont servi à nourrir l’article « Réchauffement climatique » sont issues de la grande presse ou de publications de seconde main. Charlie y retrouve les grands quotidiens et news français (le plus souvent par l’intermédiaire de leur site), des agences comme Futura-sciences, quelques journaux étrangers,  la BBC, divers sites web, ainsi que Greenpeace et diverses ONG et associations vertes. Un Atlas publié par les éditions Autrement est largement exploité, ainsi que de multiples articles du magazine Pour la Science (mais aucun de son concurrent La Recherche).

Toutes ces sources, scientifiques et non scientifiques, sont mises sur le même plan, comme s’il n’y existait pas de différence de crédibilité. Un cas d’école est une étude du « département des études géologiques des Etats-Unis » (l’identité dudit département n’est pas précisée et la source n’est pas indiquée) qui a évalué les quantités de méthane contenues dans le sol gelé de Sibérie. « Cependant, note l’article aussitôt, le magazine Science&Vie d’avril 2006 donnait plutôt comme valeur 1400 Gt ». Science&Vie est placé sur un pied d’égalité avec une institution scientifique de haut niveau.

Charlie se force à lire l’article jusqu’au bout. Il sort perplexe de ce mélange de passages manifestement de qualité et d’autres qui relèvent de la langue de bois, voire de la bouillie mentale, en passant par des litanies d’items mal digérés.
Charlie est surtout étonné par les contradictions qu’il découvre. Ainsi lit-il que la fonte des glaciers du Groenland de 2003 à 2005 « contribuerait à 10% de l’élévation du niveau des mers » puis, plus loin, que « L’effet de la fonte des glaciers [sur la montée du niveau de la mer] ne se ferait sentir qu’à beaucoup plus long terme ».

Dans un chapitre intitulé « Conséquences environnementales prévues », un court paragraphe intitulé « Les précipitations » dit : « Selon le dernier rapport du GIEC, une augmentation des précipitations aux latitudes élevées est très probable » ; mais dans un paragraphe situé plus haut dans le texte, Charlie avait lu : « D’autres experts estiment toutefois les données actuelles trop rares ou incomplètes pour qu’une tendance à la hausse ou à la baisse des précipitations puisse se dégager sur des zones de cette ampleur ».

Dans un chapitre intitulé « Réponses des Etats, collectivités, entreprises, citoyens face à la menace climatique »,  Charlie constate que « l’augmentation probable de l’intensité des cyclones » est présentée comme un fait acquis, alors que dans une partie précédente de l’article il était écrit : « les simulations informatiques ne permettent pas dans l’état actuel des connaissances de prévoir d’évolution significative du nombre de cyclones lié à un réchauffement climatique ».

Charlie s’étonne aussi de voir que  l’article de Wikipedia n’est pas actualisé : concernant la position des Etats-Unis, tout se passe comme si nous en étions restés à la présidence Bush. L’élection d’Obama n’est pas mentionnée.  Un paragraphe consacré à la politique européenne n’a pas été actualisé depuis l’été 2007, au point que des événements annoncés pour la fin 2007 restent présentés au futur.
Dépité, Charlie  se retrouve avec les idées encore plus confuses qu’auparavant.

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