Avec les pirates de Somalie

Ils s’appellent Grande Gueule, Cul blanc ou Dent d’argent. Nés simples pêcheurs dans l’un des pays les plus misérables du monde, ils sont devenus en vingt ans la terreur des vingt mille navires qui croisent chaque jour dans le golfe d’Aden. Sur fond de déliquescence de l’État, la piraterie est aujourd’hui l’un des rares secteurs florissants de Somalie.

Un jour du printemps 2009, Abshir Boyah, l’un des chefs des pirates de Somalie, m’emmena déjeuner dans un petit restaurant situé juste en face du siège du gouvernement régional semi-autonome du Puntland. Boyah est membre d’un comité secret de pirates appelé « La Corporation », responsable du détournement de dizaines de navires. Grand, très mince, il a un beau et long visage, des dents blanches éclatantes et un rire retentissant, formidablement insouciant. À la minute où nous entrions dans le restaurant, il était assailli d’admirateurs. Il avait dû serrer une demi-douzaine de mains avant même de s’asseoir à l’une des tables en plastique. Boyah semble entretenir d’excellentes relations avec les huiles du « gouvernement » du Puntland, une autorité à base clanique qui contrôle une partie du nord de la Somalie (1). Un commandant de police, notamment, est assis à côté de lui et l’appelle son « cousin ». J’ai vite compris que Boyah opère non seulement à visage découvert, mais qu’il est une véritable célébrité dans cette partie du pays.   150 000 dollars dans les poches Lui et les siens (dont un grand nombre sont affublés, dans ...
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Somalie, la nouvelle Barbarie ? Piraterie et islam dans la corne de l’Afrique de Martin Murphy, Columbia University Press, 2010

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