WP_Post Object
(
[ID] => 130927
[post_author] => 48457
[post_date] => 2024-12-12 09:21:58
[post_date_gmt] => 2024-12-12 09:21:58
[post_content] =>
Aurions-nous un train de retard ? Au-delà de l’ire des agriculteurs français, on peut se demander si le projet de traité de libre-échange entre l’UE et le Mercosur ne relève pas d’une idéologie dépassée. C’est du moins ce qui ressort de la lecture que fait l’économiste de gauche américain Robert Kuttner de trois livres récents. Il émerge de son analyse fouillée, parue dans The New York Review of Books, que démocrates et républicains, dont l’antagonisme paraît souvent relever du combat de coqs, sont désormais solidement en phase sur la question du libre-échange. Le dieu d’hier est aujourd’hui piétiné, les vertus du protectionnisme exaltées.
L’une des rares nominations intelligentes de Trump lors de son premier mandat, estime Kuttner, fut celle de Robert Lighthizer au poste de chief trade official à la Maison-Blanche. Ancien négociateur commercial sous Reagan, familier des arcanes de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), Lighthizer en est venu à considérer l’« hyperglobalisme » né de l’idéologie du libre-échange comme une illusion dommageable entretenue par la naïveté de toute une population d’économistes et de hauts fonctionnaires. C’est sous la férule de Lighthizer que l’administration Trump a torpillé l’OMC et imposé des droits de douane pouvant aller jusqu’à 25 % sur les produits chinois. Or l’administration Biden a non seulement emboîté mais renforcé le pas, en injectant des dizaines de milliards de dollars pour soutenir la production américaine. Pour son deuxième mandat, Trump a nommé au poste de Lighthizer son ancien directeur de cabinet, qui partage ses vues.
Comme le montre en détail le journaliste Josh Rogin dans un autre livre, Trump lui-même oscille entre un nationalisme primaire et le plaisir de recevoir des cadeaux de Xi Jinping pour lui-même et sa famille, mais son « nativisme » finit par l’emporter. Autre signe des temps, remarque Kuttner, une journaliste du Financial Times, Rana Foroohar, vient de publier un livre en défense du protectionnisme, au vu des effets dévastateurs de la globalisation sur les économies nationales occidentales – sans compter l’environnement et l’atmosphère politique.
[post_title] => Éloge du protectionnisme
[post_excerpt] =>
[post_status] => publish
[comment_status] => open
[ping_status] => open
[post_password] =>
[post_name] => eloge-du-protectionnisme
[to_ping] =>
[pinged] =>
[post_modified] => 2024-12-12 09:21:59
[post_modified_gmt] => 2024-12-12 09:21:59
[post_content_filtered] =>
[post_parent] => 0
[guid] => https://www.books.fr/?p=130927
[menu_order] => 0
[post_type] => post
[post_mime_type] =>
[comment_count] => 0
[filter] => raw
)
WP_Post Object
(
[ID] => 130922
[post_author] => 48457
[post_date] => 2024-12-12 09:18:41
[post_date_gmt] => 2024-12-12 09:18:41
[post_content] =>
« Le jour où j’ai décidé de venir à Madrid, écrit Andrés Trapiello, fut le plus important de ma vie. » Né en 1953 dans un village de la province de León, l’écrivain a quitté la maison familiale à l’âge de 17 ans en raison d’un différend avec son père. Gagnant de quoi se nourrir en vendant des encyclopédies dans les rues tout en fréquentant les milieux anarchistes, il vécut dans un premier temps quelques mois seulement dans la capitale espagnole. Inscrit à l’Université de Valladolid, il y entama des études de philologie qu’il n’acheva jamais, tout en militant au sein d’un parti communiste dissident d’où il fut expulsé pour « révisionnisme » et usage de stupéfiants. Il commença en même temps à publier dans la presse. En 1975, il s’établissait définitivement à Madrid, qu’il ne quittera plus.
Madrid a longtemps suscité moins de fascination que Paris, Rome, Londres et Berlin, voire Prague ou Lisbonne. Associée à la « légende noire » de l’Empire espagnol, puis au régime autoritaire du général Franco, la ville était essentiellement perçue comme simplement la capitale administrative du pays. Ce n’est plus le cas aujourd’hui. Madrid fait l’objet d’un intérêt international de plus en plus prononcé. Des livres lui sont consacrés. En anglais, par exemple, une « biographie » de la ville par l’Australien Luke Stegemann vient de paraître. Les Espagnols éprouvent eux-mêmes de longue date des sentiments ambivalents à l’égard de leur capitale. Mais la ville a toujours attiré les écrivains et la littérature en espagnol sur Madrid est abondante. C’est dans son prolongement qu’Andrés Trapiello a écrit son essai très personnel sur la ville.
Le fil conducteur de l’ouvrage est fourni par plus de 40 ans de souvenirs : différents épisodes de sa vie et les endroits de Madrid qu’il apprécie particulièrement. Le parc du Retiro, par exemple, au cœur de la ville : « J’ai parcouru le Retiro à toute heure, n’importe quel jour et en toute saison. C’est comme mon bureau depuis des années et pourtant je me perds encore dans certains de ses chemins. J’ai particulièrement aimé les matins d’hiver et les matins de printemps, les couchers de soleil d’automne et les midis d’été. » Ou la célèbre Grand Via, « qui ne fut jamais complètement moderne et ne sera jamais totalement ancienne », quasiment inchangée depuis qu’elle a été tracée il y a un siècle et qu’orne le bâtiment Capitol, emblématique échantillon d’architecture rationaliste en forme d’étrave de navire. Le Rastro, aussi, quartier populaire pauvre et sans charme, célèbre pour son marché aux puces, auquel Trapiello, qui lui a consacré un livre, est spécialement attaché. Le récit progresse en spirale au fil des souvenirs. Celui de sa vie à l’époque de la « Movida », notamment, le mouvement culturel qui a accompagné les premières années de la transition à la démocratie. Les anecdotes et les aperçus s’enchaînent dans une logique de flânerie d’esprit littéraire. « Madrid est comme une grande bibliothèque, écrit-il, chaque rue est comme une étagère, chaque maison comme un livre et chaque livre contient une série d’histoires. »
Il est naturellement question de la guerre civile, un sujet qu’il connaît très bien pour avoir écrit un livre sur l’attitude des écrivains de tous bords durant le conflit. Madrid fut un foyer de résistance des forces républicaines face aux troupes nationalistes. Trapiello défend une position nuancée, dénonçant avec la même vigueur les brutalités et les exactions dont se sont rendus coupables les deux camps, pour conclure : « La mort de Franco a libéré ce pays de la dictature, mais elle a surtout libéré quelques-uns d’entre nous du militantisme anti-franquiste [...]. Et peut-être a-t-il été compris à Madrid, mieux et plus tôt que dans d’autres villes […], que pour avancer, il ne fallait pas trop regarder en arrière, que l’oubli est aussi nécessaire que la mémoire, et qu’un excès de mémoire nuit à la vie. »
Une figure domine le livre : celle de Benito Pérez Galdós, que Trapiello considère comme le plus grand prosateur espagnol après Cervantes. Beaucoup des romans de celui-ci, à commencer par son chef-d’œuvre, Fortunata et Jacinta, se déroulent à Madrid, souvent dans les quartiers populaires qu’il aimait fréquenter. C’est aussi le cas de plusieurs des développements historiques racontés dans la série des « Épisodes nationaux ». « L’amour de Galdós pour Madrid, affirme Trapiello, n’est pas, comme le pensent beaucoup de Madrilènes, l’amour de la ville, mais l’amour des créatures qui y vivent. [Madrid est] le décor qui lui sert à montrer à ses lecteurs leurs luttes et leurs passions. [...] Et parmi ces créatures, surtout les femmes. Le principal intérêt de Galdós […] ce sont les femmes. [Et] le thème central de sa littérature, c’est l’amour, surtout, chez ses personnages féminins. »
Hommage est rendu à d’autres écrivains dont l’œuvre aide à comprendre Madrid ou qui l’ont célébrée. Mariano José de Larra, fameux journaliste, chroniqueur et satiriste de la première moitié du XIXe siècle, ainsi que deux écrivains de la première moitié du XXe : Juan Ramón Jiménez et Ramón Gómez de la Serna, auteur, notamment, de Elucidario de Madrid et Nostalgias de Madrid, mort à Buenos Aires où il s’était exilé lorsque la guerre civile a éclaté.
Trapiello met en lumière la place de la ville dans les tableaux de Goya et exalte l’œuvre d’inspiration expressionniste de José Gutiérrez Solana, peintre des milieux populaires de Madrid : processions religieuses, figures de carnaval, musiciens ambulants, ouvriers, souteneurs et prostituées. Il évoque les photographes de Madrid, par exemple le Catalan Francesc Catàla-Roca, la passion des Madrilènes pour la corrida (« Rien de plus clairement madrilène que la corrida ») et cette forme particulière de suffisance, d’arrogance ou d’insolence qu’on leur prête non sans raison, qu’on appelle « chulería ». Donnant libre cours à son goût pour les listes, il livre, en accord avec l’esprit autobiographique de son livre, celle des centaines de personnes qu’il a connues à Madrid et énumère des dizaines d’expressions idiomatiques ou de vocables typiques de la capitale. Il n’oublie pas de parler de la transparence de l’air, qui, avec le ciel bleu presque en permanence, fait le charme de cette ville située sur un plateau à 600 mètres d’altitude, caractérisée par un temps continental, froid et sec en hiver, très chaud en été et le plus souvent ensoleillé.
Comme toutes les grandes villes européennes, Madrid n’a cessé de changer de visage au cours des siècles. À part celles qui ont été complètement ravagées par la guerre, comme Berlin ou Varsovie, peu ont connu d’aussi profondes transformations. À plusieurs reprises dans son histoire, des quartiers entiers ont disparu et ont été rebâtis. Les grands travaux qui ont accompagné la période de modernisation accélérée qui a débuté sous le régime franquiste n’étaient que les derniers d’une longue série. Du Madrid du Siècle d’Or, il reste de majestueux monuments et bâtiments, mais à part quelques vestiges, presque rien ne subsiste du Madrid médiéval et, avant cela, arabe. Ce n’est pas le cas à Séville, Tolède ou Saragosse, qui auraient pu devenir la capitale de l’Espagne au moment où Philippe II, pour des raisons jamais complètement élucidées, a décidé de fixer la cour royale itinérante dans ce qui n’était alors qu’une petite ville commerçante. D’être devenue le siège du pouvoir a scellé, pour le meilleur et pour le pire, le destin d’une ville qui, rappelle Trapiello à la suite de l’historien Santos Juliá, « voulut être, avec les Autrichiens et les Bourbons, la capitale de la monarchie ; avec les libéraux du XIXe siècle, la capitale de la nation ; en 1931 la capitale de la République ; en 1939, avec Franco, la capitale de l’Espagne, et depuis 1978 la capitale de l’État ».
Ces métamorphoses successives, il ne les déplore pas vraiment, à une exception près : « La plus grande perte dont a souffert Madrid, ce n’est pas celle de sa tranquillité, ni d’une bonne partie de son patrimoine architectural, ni de ses fêtes et traditions populaires [...]. Ce qui a frappé Madrid comme d’un coup de poignard dans le dos, c’est la perte de ses faubourgs, de ses banlieues, de ses quartiers périphériques. » Dans l’ensemble, il ne semble cependant pas éprouver de tristesse à l’idée de l’effacement d’un Madrid qui serait authentique : « Quel est le Madrid original ? L’arabe ? Celui des Autrichiens, le néo-classique, le romantique, le moderne ? […] Le Madrid original est celui de chaque instant. »
Trapiello est moins attaché aux lieux et aux bâtiments qu’aux vies qui s’y déroulent. Sa vision de la ville est celle d’un romancier. Quand, aux yeux de Luke Stegemann, le Madrid de Galdós a irrémédiablement disparu, pour lui, ce Madrid-là existe toujours, comme il existait d’ailleurs déjà avant Galdós. Ce qu’a saisi Galdós, soutient-il, c’est une réalité – des situations, des comportements, des types humains – et un esprit proprement madrilènes qui traversent les siècles. La laideur de Madrid par endroits, « [qui] fait partie de sa beauté » dit-il songeant sans doute à celle des quartiers où se passaient les histoires de Galdós, ne le gêne pas : « Nous aimons notre ville pour ce qu’elle conserve de notre enfance et de notre jeunesse, si laide que soit cette ville, parce que l’enfance et la jeunesse mettent au second plan ce que nous appelons la beauté. » Le livre est richement illustré de plusieurs centaines d’images : photos, souvent du début ou du milieu du siècle dernier (scènes de rue, panoramas, portraits), gravures anciennes, tableaux, affiches de théâtre et de cinéma et, last but not least compte tenu de la place qu’y occupe la littérature, couvertures de livres.
[post_title] => Le Madrid d’Andrés Trapiello
[post_excerpt] =>
[post_status] => publish
[comment_status] => open
[ping_status] => open
[post_password] =>
[post_name] => le-madrid-dandres-trapiello
[to_ping] =>
[pinged] =>
[post_modified] => 2024-12-12 09:18:42
[post_modified_gmt] => 2024-12-12 09:18:42
[post_content_filtered] =>
[post_parent] => 0
[guid] => https://www.books.fr/?p=130922
[menu_order] => 0
[post_type] => post
[post_mime_type] =>
[comment_count] => 0
[filter] => raw
)
WP_Post Object
(
[ID] => 130886
[post_author] => 48457
[post_date] => 2024-12-05 17:17:28
[post_date_gmt] => 2024-12-05 17:17:28
[post_content] =>
On a beaucoup annoncé la « sixième extinction » des espèces animales, due à l’homme. Paul R. Ehrlich, qui avait naguère annoncé à tort, dans sa Bombe P, une famine mondiale pour la décennie 1970, est resté un catastrophiste convaincu. À 92 ans, il signe avec d’autres auteurs un livre confirmant la venue de cette sixième extinction. Ils décrivent une « mutilation de l’arbre de la vie ». Non sans de bonnes raisons, écrit dans le journal scientifique Nature Julia P. G. Jones, professeure de sciences de la conservation à l’Université de Bangor au Pays de Galles. La pression exercée par les activités humaines sur les animaux sauvages est considérable. « Le lecteur qui n’est pas familier de la science de l’extinction apprendra beaucoup de ce livre, écrit-elle. Nombre de concepts de la biologie de la conservation sont explorés avec compétence et les auteurs prennent un nouvel angle en soulignant le rôle de l’extinction de populations, étape vers l’extinction d’une espèce. »
Julia Jones exprime cependant de fortes réserves. Les auteurs passent sous silence ce qu’elle appelle le « paradoxe environnemental » : que le bien-être des hommes a augmenté « à mesure de notre destruction d’écosystèmes naturels ». Ils invoquent une « menace existentielle » pour notre espèce, où est la menace si les espèces menacées sont du genre de Melomys rubicola, un rongeur d’une île inhabitée au large de l’Australie ? « Avons-nous vraiment besoin de dire que des extinctions de populations animales menacent l’existence de l’humanité pour soutenir qu’il faut s’en préoccuper ? », écrit-elle. Les auteurs critiquent le programme d’infrastructures de la « nouvelle route de la soie » engagée par la Chine, mais « ne se demandent pas pourquoi cette initiative est approuvée par nombre de responsables de pays à faible revenu, qui recherchent désespérément de nouveaux moyens de transport et la sécurité énergétique ». Enfin les auteurs, selon elle, évacuent la question de l’évaluation des politiques de conservation menées depuis des décennies. Or elles ont enregistré de francs succès, parfois spectaculaires, comme la renaissance de l’antilope saïga et du faucon de l’île Maurice. Julia Jones regrette la tonalité de « misanthropie environnementale » qui selon elle imprègne cet ouvrage. Elle considère qu’un pessimisme systématique dessert les efforts des conservationnistes et défend l’efficacité d’une attitude optimiste.
[post_title] => Misanthropie environnementale
[post_excerpt] =>
[post_status] => publish
[comment_status] => open
[ping_status] => open
[post_password] =>
[post_name] => misanthropie-environnementale
[to_ping] =>
[pinged] =>
[post_modified] => 2024-12-05 17:17:29
[post_modified_gmt] => 2024-12-05 17:17:29
[post_content_filtered] =>
[post_parent] => 0
[guid] => https://www.books.fr/?p=130886
[menu_order] => 0
[post_type] => post
[post_mime_type] =>
[comment_count] => 0
[filter] => raw
)
WP_Post Object
(
[ID] => 130883
[post_author] => 48457
[post_date] => 2024-12-05 17:15:22
[post_date_gmt] => 2024-12-05 17:15:22
[post_content] =>
« Si vous n’aviez qu’un seul livre à lire sur l’économie, prenez celui d’Andrew Leigh, clair, pénétrant, remarquable (et court). » Le jugement émane de Claudia Goldin, prix Nobel d’économie 2023. Il figure en bonne place sur la couverture du dernier ouvrage de l’Australien Andrew Leigh. Lequel n’est pourtant pas un économiste. Il a certes fait de brillantes études à Harvard, mais son domaine est le droit – et la politique, dont il est un acteur dans son pays.
Pour donner une idée de ce qu’il écrit, on peut d’abord se référer à son livre précédent, « L’Économie d’à peu près tout », dans lequel il avançait, entre autres trouvailles, que le fait d’acheter un anneau de valeur à sa promise est une forme de dépôt de garantie devant servir de compensation à la future épouse en cas d’annulation de l’engagement. Et que la facilitation de l’avortement à la suite de l’arrêt Roe v. Wade de la Cour suprême a entraîné dans les années 1990 une surprenante baisse du taux de délinquance, parce qu’il y avait moins d’enfants exposés au type de désavantage social susceptible de les entraîner sur cette voie.
Son nouvel ouvrage, censé proposer une « courte histoire de l’humanité » à la lumière de l’économie, est particulièrement bref (moins de 200 pages). L’objectif est triple, nous dit l’auteur : « raconter l’histoire du capitalisme et l’émergence du système de marché ; discuter les idées-forces des personnalités qui ont fondé la science économique ; montrer comment les forces économiques ont influencé l’histoire du monde ». Mais en fait, c’est surtout « une histoire de la vie économique, depuis les temps paléolithiques jusqu’à la pandémie de Covid-19 », écrit l’économiste australien John Quiggin sur le site The Conversation. C’est clairement une réussite, au point que l’hebdomadaire The Economist l’a inscrit sur sa liste des meilleurs livres 2024.
[post_title] => L’économie pour les nuls
[post_excerpt] =>
[post_status] => publish
[comment_status] => open
[ping_status] => open
[post_password] =>
[post_name] => leconomie-pour-les-nuls-2
[to_ping] =>
[pinged] =>
[post_modified] => 2024-12-05 17:15:23
[post_modified_gmt] => 2024-12-05 17:15:23
[post_content_filtered] =>
[post_parent] => 0
[guid] => https://www.books.fr/?p=130883
[menu_order] => 0
[post_type] => post
[post_mime_type] =>
[comment_count] => 0
[filter] => raw
)
WP_Post Object
(
[ID] => 130880
[post_author] => 48457
[post_date] => 2024-12-05 17:13:02
[post_date_gmt] => 2024-12-05 17:13:02
[post_content] =>
Chez les linguistes, la vie universitaire n’est pas un long fleuve tranquille. Cela fait des décennies qu’à propos de l’origine du langage humain on s’écharpe avec violence (verbale) entre tenants de l’hypothèse « gradualiste » – le langage est une forme de communication qui s’est lentement affinée au fil de l’évolution – et Noam Chomsky et al. pour qui l’apparition du langage constitue un saut qualitatif qui s’explique par l’existence chez les humains d’une aptitude innée. Eux – et eux seuls dans le règne animal – auraient instantanément et sans doute récemment pu, en maîtrisant l’utilisation de symboles, « organiser leur pensée intérieure » et faire du langage bien plus qu’un moyen de communiquer des informations sur l’environnement mais un instrument pour le transformer. Ce débat est d’autant plus loin d’être tranché qu’aucune preuve matérielle de l’apparition du langage ne peut être produite, sauf l’arrivée de l’écriture il y a 5 000 ans. Pire, il se complexifie à mesure que l’on appréhende mieux les formes de communication animale, chants des oiseaux ou des baleines ou « mots » que modulent chimpanzés ou babouins.
Mais pas de quoi décourager le paléoanthropologue Steven Mithen qui, pour y voir plus clair, présente avec un maximum d’ordre et de précision les différents éléments du « puzzle » évoqué dans son titre. Il se fonde sur les dernières découvertes « de la linguistique, des neurosciences, de l’anthropologie, de l’archéologie, de l’éthologie des primates, etc. », résume Ian Tattersall, autre paléoanthropologue, dans The New York Review of Books. Parmi « ces pièces de puzzle mises sur la table », citons chronologiquement ces avancées chez les hominidés bipèdes apparus il y a 7 millions d’années : utilisation d’outils pour découper la viande et apport consécutif d’un surcroît de protéines et développement du cerveau (- 2 millions d’années) ; évolution d’un équipement auditif et vocal adapté au langage (- 500 000 ans ?) ; maîtrise du feu et généralisation des réunions autour de feux de camp (- 400 000 ans) ; enfin, à partir de -100 000 ans, premières manifestations matérielles chez Homo sapiens d’une pensée symbolique compatible avec le langage (gravures abstraites, ornements corporels…). Le problème, avertit cependant Ian Tattersall, c’est que l’auteur se réduit à identifier et empiler sur la table les pièces de puzzle sans pouvoir les agencer entre elles. Malgré son bel effort, on ne peut donc toujours pas, faute de preuves imparables, déterminer quand et surtout comment et pourquoi Homo sapiens a, quoiqu’issu d’une « lignée d’ancêtres non linguistiques », basculé un beau jour dans le langage. Les spécialistes vont donc continuer à s’écharper, mais ils en ont l’habitude : en 1866, la nouvellement créée Société de Linguistique de Paris n’avait-elle pas interdit, pour garantir la tranquillité de ses débats, la moindre discussion sur la question de l’origine du langage ?
[post_title] => L’origine du langage reste un sujet de discorde
[post_excerpt] =>
[post_status] => publish
[comment_status] => open
[ping_status] => open
[post_password] =>
[post_name] => lorigine-du-langage-reste-un-sujet-de-discorde
[to_ping] =>
[pinged] =>
[post_modified] => 2024-12-05 17:13:03
[post_modified_gmt] => 2024-12-05 17:13:03
[post_content_filtered] =>
[post_parent] => 0
[guid] => https://www.books.fr/?p=130880
[menu_order] => 0
[post_type] => post
[post_mime_type] =>
[comment_count] => 0
[filter] => raw
)
WP_Post Object
(
[ID] => 130877
[post_author] => 48457
[post_date] => 2024-12-05 17:10:21
[post_date_gmt] => 2024-12-05 17:10:21
[post_content] =>
Qui a entendu parler des « Allemands africains » ? Loin d’être une plaisanterie de l’Histoire, le roman de l’écrivain espagnol Sergio del Molino est basé sur un fait réel : en 1916, deux bateaux à vapeur arrivent à Cadix, transportant 627 Allemands de la colonie du Cameroun, conquise par les Alliés. Au lieu de se rendre à leurs ennemis, les Allemands se sont livrés aux autorités espagnoles en Guinée équatoriale. L’Espagne, en tant que puissance neutre, les accueille. Ils s’installent notamment à Saragosse. Ils ne quitteront plus le pays. Rapidement, ces « Allemands du Cameroun » deviennent célèbres dans la région.
Los alemanes commence au cimetière de Saragosse à l’occasion de la mort de Gabi, le fils aîné de la famille Schuster. C’est un musicien underground, populaire, homosexuel et controversé. Les obsèques se déroulent en présence de son frère Fede, de sa sœur Eva et de Juan Schuster, un père tyrannique, héritier d’une industrie de la charcuterie construite dans la capitale aragonaise par leur ancêtre Hans, « maître boucher du Reich », et connu pour sa populaire saucisse Schuster, « 100 % allemande ».
Vont alors remonter à la surface les tensions accumulées tout au long de leur vie, en particulier le chantage exercé par un homme d’affaires israélien, Ziv, sur Eva, en raison du sombre passé de sa famille, liée au nazisme. Eva est le bras droit du maire de Saragosse. Lié à l’argent sale, Ziv est impliqué dans une affaire immobilière louche. Mais par ailleurs, il s’est consacré à la chasse aux nazis après la guerre. Il a tenté de mettre la main sur plusieurs réfugiés bruns dans l’Espagne franquiste.
C’est un roman choral, animé par toute une galerie de personnages secondaires. « Chacun raconte l’histoire de son point de vue et c’est le lecteur qui détient la clé de l’ensemble », déclare l’auteur au quotidien El País. Et si le roman est bien une fiction, il rejoint le réel : Saragosse était un refuge pour les nazis et faisait partie de la « rat line », le réseau d’évasion criminelle après la défaite d’Hitler, explique le journaliste Jacinto Antón.
Los alemanes a valu à Sergio del Molino le prix Alfaguara 2024 du meilleur roman. Un précédent, Histoire de ma peau, a été publié en France en 2023 (Éditions du sous-sol).
[post_title] => Allemands africains en Espagne
[post_excerpt] =>
[post_status] => publish
[comment_status] => open
[ping_status] => open
[post_password] =>
[post_name] => allemands-africains-en-espagne
[to_ping] =>
[pinged] =>
[post_modified] => 2024-12-05 17:10:23
[post_modified_gmt] => 2024-12-05 17:10:23
[post_content_filtered] =>
[post_parent] => 0
[guid] => https://www.books.fr/?p=130877
[menu_order] => 0
[post_type] => post
[post_mime_type] =>
[comment_count] => 0
[filter] => raw
)
WP_Post Object
(
[ID] => 130873
[post_author] => 48457
[post_date] => 2024-12-05 17:06:45
[post_date_gmt] => 2024-12-05 17:06:45
[post_content] =>
Oliver Sacks vivait la plume à la main. Le célèbre neurologue et auteur d’histoires médicales, un genre qu’il a largement contribué à faire connaître et populariser, est décédé en 2015 à l’âge de 82 ans. À côté de textes inédits dont certains furent repris dans deux recueils posthumes, il laissait dans ses archives 70 boîtes de correspondance contenant quelque 200 000 pages : il gardait copie de la plupart des lettres qu’il envoyait. De cette masse, Kate Edgar, qui fut sa secrétaire, son assistante et sa collaboratrice pour la fabrication de tous ses livres à partir du quatrième (L’Homme qui prenait sa femme pour un chapeau), a extrait quelques centaines de lettres. Représentant une petite fraction du total, elles composent malgré tout un volume de 700 pages : épistolier compulsif, Sacks était également souvent prolixe et beaucoup parmi les lettres sélectionnées sont très longues. Les premières datent de 1960, peu après son arrivée aux États-Unis à l’âge de 27 ans, les dernières de quelques jours avant sa mort.
Loin de faire double emploi avec ses deux livres d’autobiographie Oncle Tungstène et En mouvement, ce volume de correspondance les complète heureusement : parce qu’il s’y livre au jour le jour dans toutes ses contradictions et ses humeurs changeantes, torturé mais plein d’excitation et d’enthousiasme, absorbé par lui-même mais généreux, on y approche au plus près sa personnalité et sa vitalité hors du commun. La variété de ses intérêts, la vivacité de sa curiosité, la finesse psychologique de ses observations, l’étendue de ses connaissances en médecine, biologie et psychologie, mais aussi en histoire des sciences, philosophie et littérature, donnent à cette correspondance une richesse exceptionnelle.
Si Oliver Sacks, né à Londres dans une famille de médecins juifs, est parti aux États-Unis, c’était pour fuir l’environnement dans lequel il avait grandi et l’avenir dont ses parents rêvaient pour lui : épouser une jeune fille juive et reprendre le cabinet médical de son père. Traumatisé par son séjour, au moment du Blitz, dans un internat dur et sinistre où il avait été envoyé en conformité avec les consignes du gouvernement, il l’était tout autant par la présence à ses côtés d’un frère schizophrène et par la réaction violente de sa mère lorsqu’elle découvrit son homosexualité. Ce qui l’avait sauvé était sa passion dévorante pour les sciences naturelles et la chimie, qui suscitait chez lui des sentiments violemment affectifs. Mais il ne songeait qu’à s’éloigner le plus possible de l’Angleterre. Une fois son diplôme de médecine obtenu à Oxford, après un crochet par le Canada, il s’installa aux États-Unis. Le pays l’attirait par « sa splendeur géographique, son énergie […], son excitante nouveauté ». Il rêvait plus particulièrement de la Californie, où vivait le poète Thom Gunn, qu’il admirait : il l’y rencontra, ils devinrent amis (mais pas amants) et il resta un de ses correspondants réguliers.
Tout en travaillant dans un hôpital de San Francisco et poursuivant une formation en neuropathologie à l’Université de Californie à Los Angeles, il se livra durant plusieurs années à ce qui allait constituer ses grandes passions de jeunesse, poursuivies avec excès comme tout ce qu’il entreprenait : la moto, la musculation et l’haltérophilie, ainsi que la consommation de drogues excitantes ou hallucinogènes et de psychotropes (hashish, mescaline, morphine, cocaïne, amphétamines, LSD). Ce furent également des années d’aventures sentimentales. En 1965, à l’occasion d’un voyage en Europe, il fit la connaissance d’un jeune et très beau directeur de théâtre hongrois nommé Jenö Vincze. Durant quelques mois, ils vécurent une liaison fiévreuse d’une intensité dont témoignent plusieurs lettres de Sacks, brûlantes de passion. Lorsqu’elle prit fin à sa propre initiative – il était apparemment terrifié à l’idée d’une vie commune –, Sacks vécut strictement solitaire sur le plan amoureux pendant 43 ans. À l’âge de 75 ans, il rencontrera l’écrivain Bill Hayes qui fut son compagnon durant ses dernières années.
Les principaux destinataires des lettres des premières années sont ses parents, ses frères et l’auteur et directeur de théâtre et d’opéra Jonathan Miller, qui était un ami d’école. Leur contenu est surtout personnel. Il y raconte sa vie et y fait fréquemment part de ses interrogations sur son identité et de ses doutes, y compris au sujet de sa vocation médicale. En 1961, il avouait ainsi à ses parents éprouver « une extrême aversion pour les patients, la maladie, les hôpitaux et tout particulièrement les médecins ». Neuf ans plus tard, il leur écrivait toutefois : « Je pense que je suis un bon (et, très rarement, à des moments magiques), un grand professeur : non parce que je communique des faits, mais parce que d’une manière ou d’une autre je transmets une sorte de passion pour le patient […], une sensation de la texture des patients, de la manière dont leurs symptômes se raccordent à leur personnalité et [...] à leur environnement. »
À ce moment-là, il avait jugulé ses pulsions autodestructrices et commencé à trouver une sorte d’équilibre qu’il allait bientôt consolider en voyant une fois par semaine un même psychanalyste durant 49 ans. Et il s’était établi à New York, où il travailla dans plusieurs hôpitaux et institutions hospitalières. Il s’y occupa tout d’abord de malades atteints d’encéphalite léthargique (c’est l’histoire racontée dans son livre L’Éveil et le film qui en a été tiré), puis de patients souffrant d’une grande variété de troubles neurologiques ou des sens. Ainsi que le montrent plusieurs lettres, il s’y trouva souvent en butte à l’hostilité du corps professoral et médical, qui n’appréciait ni ses méthodes, ni sa personnalité excentrique, ni son comportement peu discipliné. C’est de ce travail que sont tirées les études de cas rassemblées dans ses livres ultérieurs. Il y décrit les symptômes que présentent les malades, mais aussi les stratégies qu’ils emploient pour compenser les carences dont ils souffrent, éléments de la clinique qui lui semblent autant nécessaires à la compréhension de la maladie que les données physiologiques.
Sacks souffrait lui-même de certains troubles, par exemple une grande difficulté à reconnaître les lieux et les visages, et pensait présenter certains traits d’autres maladies. Dans son effort pour comprendre le monde dans lequel vivaient ses patients, il faisait appel à l’introspection. Il l’explique dans une lettre au neurologue russe Alexandre Luria, pionnier de la formule du récit clinique, qu’il s’est employé à appliquer : « Lorsque j’avais 10 ans, j’ai développé une passion absolue pour l’astronomie, et c’est cette sorte de passion, je pense, qui me domine aujourd’hui encore […], mais il y a eu un changement de direction […]. Avec les années, et presque contre ma volonté, je suis devenu une sorte d’astronome de l’intime, concentré […] sur mes propres états mentaux, mais faisant cela (j’aime à le penser) pour apprendre quelque chose au sujet d’autres esprits que le mien […], parce que si je suis unique – comme tout le monde est unique – je suis aussi semblable à n’importe qui d’autre, ce que j’observe en moi-même se produit certainement chez les autres également. »
Luria n’est qu’une des personnalités connues qui apparaissent dans ce recueil de lettres. À partir d’un certain moment, la notoriété venant avec le succès de ses livres, le nombre de ses correspondants s’est fortement accru. Durant la dernière partie de sa vie, plusieurs milliers de lettres lui étaient adressées par an, auxquelles il se faisait un devoir de répondre. Lui-même, mû par son insatiable curiosité et son goût pour les gens, n’hésitait pas à prendre contact avec des savants ou des écrivains dont les livres lui avaient plu ou dont il aurait aimé avoir l’avis. Le plus souvent, l’échange commençait sur un ton assez formel. Au bout de quelques lettres, on passait à l’emploi du prénom et très souvent une réelle amitié s’ensuivait. Parmi les personnes avec lesquelles il s’est ainsi trouvé en relation régulière, voire amicale, figurent Gerald Edelman et Antonio Damasio, deux neurologues dont il partageait les idées, le biologiste Francis Crick, le physicien Freeman Dyson, les philosophes Daniel Dennett et Peter Singer, le poète W. H. Auden, les critiques Frank Kermode et Susan Sontag, l’écrivain Paul Theroux et bien d’autres. Mais on trouve à côté d’eux de nombreuses personnes moins connues, voire carrément inconnues. À toutes, il s’adressait avec beaucoup de chaleur et de délicatesse, parlant souvent de lui-même, de ses objets d’intérêt et de ses passions, mais sans ostentation. Lorsqu’il s’agissait d’une personne malade ou dont un proche l’était, il manifestait toujours une extrême compassion.
En 2006, Oliver Sacks apprit qu’il était atteint d’un mélanome à l’œil droit. Une intervention chirurgicale au laser le laissa apparemment guéri, mais quelque temps après il devint borgne de l’œil opéré. Neuf ans plus tard – il avait entretemps publié trois livres supplémentaires –, on découvrit que le cancer avait récidivé et développé des métastases au foie. Sacks savait qu’il n’en avait plus que pour quelques mois. On accéléra le processus de publication de son second livre de souvenirs, de manière à ce qu’il paraisse encore de son vivant, de même que la préparation de ce qui allait devenir un de ses recueils de textes posthumes. Il avertit les membres de sa famille et ses amis de sa fin imminente. Les lettres dans lesquelles il leur fait part de la sombre nouvelle sont franches, factuelles et dépourvues de la moindre trace d’auto-apitoiement. C’est aussi le cas de l’article du New York Times par l’intermédiaire duquel il rendit l’information publique. Cet article figure dans le petit livre intitulé Gratitude en compagnie notamment de deux autres textes rédigés durant les derniers mois de sa vie. Celui qui clôt le livre, écrit trois semaines avant sa mort, a pour titre « Sabbat ». Il y évoque ses souvenirs de la célébration de cette fête lorsqu’il était enfant.
Les rapports de Sacks avec la judéité ont toujours été compliqués. Dans une lettre, il parle du fait d’être né juif comme « à la fois une malédiction et une bénédiction » et exprime clairement ses sentiments ambivalents à ce sujet : « Le côté dogmatique-doctrinal, légal-scholastique du judaïsme m’a toujours dégoûté, et a fortement contribué à m’éloigner de lui ; mais la profondeur, la disposition pacifique, contemplative, hospitalière [...] du judaïsme dans sa dimension lyrique et méditative m’a attiré vers lui. » C’est cette dimension humaine et spirituelle, non nécessairement accompagnée d’une croyance religieuse, qu’il voit sans doute à l’œuvre dans l’idée du Sabbat, jour du repos mérité après une semaine de travail : « Je sens que j’ai accompli ma tâche, écrit-il à sa belle-sœur dans des termes similaires à ceux du texte publié, à tout le moins que j’ai fait ce que je pouvais, et que le temps qui me reste devrait être une sorte de paisible Sabbat de fin de la vie, et j’éprouve une impression de sérénité et d’acquiescement. » Commencée dans les tourments, l’existence d’Oliver Sacks s’est peu à peu apaisée et s’est achevée par une sorte de réconciliation avec lui-même. De cette trajectoire et des soubresauts par lesquels sa vie est passée, ses lettres retracent en quelque sorte l’histoire en temps réel. Cette caractéristique, l’intelligence et la profonde humanité qui s’y expriment constamment, ainsi que le brio de son style et sa grande qualité littéraire font de ce recueil de lettres un de ses meilleurs livres.
[post_title] => Oliver Sacks en toutes lettres
[post_excerpt] =>
[post_status] => publish
[comment_status] => open
[ping_status] => open
[post_password] =>
[post_name] => oliver-sacks-en-toutes-lettres
[to_ping] =>
[pinged] =>
[post_modified] => 2024-12-05 17:06:46
[post_modified_gmt] => 2024-12-05 17:06:46
[post_content_filtered] =>
[post_parent] => 0
[guid] => https://www.books.fr/?p=130873
[menu_order] => 0
[post_type] => post
[post_mime_type] =>
[comment_count] => 0
[filter] => raw
)
WP_Post Object
(
[ID] => 130834
[post_author] => 48457
[post_date] => 2024-11-28 17:48:40
[post_date_gmt] => 2024-11-28 17:48:40
[post_content] =>
Déjà plusieurs fois réédité et traduit en plusieurs langues (mais pas ou pas encore en français), le livre de ce professeur de sociologie à l’université d’Amsterdam fait sensation. Présentant en langue claire des monceaux de littérature spécialisée sur ce sujet ô combien clivant, il pourfend les torrents d’idées simples qui empoisonnent les débats politiques des deux côtés de l’Atlantique. Voici quelques-uns des « 22 mythes » qui lui paraissent pervertir les discours dominants. Contrairement à ce qu’on croit, « les migrations internationales sont restées stables et à un niveau relativement bas au cours des dernières décennies », résume Alice Fill sur le site E-International Relations. La grande majorité des migrants arrivent tout à fait légalement, étant recherchés pour des raisons d’emploi. Les migrants occupent des emplois dont les nationaux ne veulent pas ou dont la qualification est rare ou en déficit. L’impact sur le système social et le logement dans le pays d’accueil est « négligeable ». La plupart des crises de réfugiés restent concentrées dans les régions d’origine. C’est aussi un mythe de croire qu’on peut réduire l’émigration en investissant dans le développement des pays d’origine, car elle augmente à mesure que les conditions économiques s’améliorent. Comme le souligne aussi Ros Taylor dans le Times Literary Supplement, le renforcement de barrières aux frontières a le double effet de stimuler le trafic de l’immigration illégale et d’inciter ceux qui venaient pour un séjour temporaire à s’implanter définitivement.
Sur le journal conservateur en ligne Quillette, le Néerlandais Steije Hofhuis juge que tout en prétendant dénoncer des préjugés équitablement répartis entre la droite et la gauche, l’auteur témoigne d’un classique optimisme de gauche qui le conduit à fausser les véritables enseignements de la littérature spécialisée.
[post_title] => 22 mythes sur l’immigration
[post_excerpt] =>
[post_status] => publish
[comment_status] => open
[ping_status] => open
[post_password] =>
[post_name] => 22-mythes-sur-limmigration
[to_ping] =>
[pinged] =>
[post_modified] => 2024-11-28 17:48:41
[post_modified_gmt] => 2024-11-28 17:48:41
[post_content_filtered] =>
[post_parent] => 0
[guid] => https://www.books.fr/?p=130834
[menu_order] => 0
[post_type] => post
[post_mime_type] =>
[comment_count] => 0
[filter] => raw
)
WP_Post Object
(
[ID] => 130831
[post_author] => 48457
[post_date] => 2024-11-28 17:46:46
[post_date_gmt] => 2024-11-28 17:46:46
[post_content] =>
Si un éditeur décide de publier en France le dernier roman d’Ariana Harwicz, il n’aura aucune difficulté à traduire le titre : « perder el juicio » en espagnol et « perdre le jugement » en français ont le même double sens dans les deux langues : perdre un procès… ou la raison.
Perder el juicio raconte l’histoire de Lisa, une mère juive argentine installée dans la campagne française ayant rompu avec son mari français et sa belle-famille, quelque peu antisémite. Plongée dans une spirale de désespoir après avoir perdu la garde de ses jumeaux lors d’un procès, elle décide de déclencher un incendie et d’enlever ses enfants.
Lisa se bat contre une société qui la juge sans la comprendre et contre un système qu’elle estime injuste. C’est une mère perdante, humiliée et désespérée, qui ne peut s’abstraire de sa judéité et qui fera souffrir ses enfants en pensant punir leur père. La violence est omniprésente, sous toutes ses formes : les cris et les bousculades lors des disputes du couple ; la sauvagerie des ébats sexuels pendant les trêves ; le mépris de la belle-famille ; la décision de la justice qui sépare les enfants de leur mère et confie la garde au père.
« Je pars toujours du principe que mes livres mettent en scène ce dont je ne suis pas capable. Je laisse toujours mes personnages enfreindre la loi à ma place » confie-t-elle au portail Infobae. En l’occurrence, ce roman est inspiré d’un événement qu’Ariana Harwicz a vécu elle-même. « J’ai traversé une épreuve très lourde qui a duré de nombreuses années », dit-elle aussi.
[post_title] => Une mère humiliée
[post_excerpt] =>
[post_status] => publish
[comment_status] => open
[ping_status] => open
[post_password] =>
[post_name] => une-mere-humiliee
[to_ping] =>
[pinged] =>
[post_modified] => 2024-11-28 17:46:47
[post_modified_gmt] => 2024-11-28 17:46:47
[post_content_filtered] =>
[post_parent] => 0
[guid] => https://www.books.fr/?p=130831
[menu_order] => 0
[post_type] => post
[post_mime_type] =>
[comment_count] => 0
[filter] => raw
)
WP_Post Object
(
[ID] => 130828
[post_author] => 48457
[post_date] => 2024-11-28 17:34:56
[post_date_gmt] => 2024-11-28 17:34:56
[post_content] =>
« Aux âmes bien nées, la valeur n’attend pas le nombre des années », proclame le Cid dans la pièce de Corneille – sans grande modestie mais avec une certaine exactitude. Effectivement, Rodrigo Díaz, alias El Cid, alias El Campeador, est né – fait plutôt rare s’agissant des personnages de légende – et bien né : en 1048 à Vivar (nord de l’Espagne), dans une famille de l’aristocratie. Pour ce qui est de sa valeur (morale, pas militaire), c’est une autre histoire. En fait, Rodrigo avait tout d’un condottière sans foi ni loi qui retournait sa cotte de mailles à tout bout de champ, trahissait à qui mieux mieux et mettait sa valeureuse épée au service de qui payait le plus, tantôt le roi d’Aragon, tantôt celui de Castille, tantôt les roitelets musulmans à la tête des « taïfas » qui constellaient alors la péninsule Ibérique. Rodrigo était aussi collecteur d’impôts, rançonneur et pilleur, ainsi que le relatent les nombreux livres documentant cette existence tout sauf exemplaire.
En revanche la médiéviste britannique Nora Berend, elle, « s’intéresse moins à la vie du Cid “historique” qu’à ce qu’elle appelle son “après-vie”… c’est-à-dire l’invention de sa réputation après sa mort en 1099 », explique David Abulafia dans la Literary Review. Contrairement à la forfanterie que Corneille met dans la bouche de son héros, la « valeur » du Cid a en effet dû attendre non pas des années mais plutôt deux ou trois siècles pour être célébrée. Mais alors, quelle célébration ! La vie post-mortem du mercenaire et voyou médiéval a pris en effet un tour presque plus spectaculaire que sa vie ante-mortem, et surtout bien plus édifiant. Bien sûr Rodrigo, ou plutôt son cadavre ficelé sur la selle d’un cheval, n’a pas entraîné ses troupes à la victoire devant Valence comme dans le film de 1961 avec Charlton Heston et Sophia Loren. Par contre, le mercenaire qui avait si vaillamment défendu les Almoravides contre les chrétiens, au point de mériter le surnom de El Cid (déformation du mot arabe « saïd », « seigneur »), se verra curieusement promu fer de lance de la Reconquista anti-musulmane et défenseur de la chrétienté ! Il sera même quasiment sanctifié, miracles à l’appui ; et sur la trace de quelques-unes de ses pérégrinations sanglantes on effectuera des pèlerinages tout comme sur le chemin de Compostelle. Mieux encore, le chef de guerre qui avait défendu les unes contre les autres les ambitions prédatrices de tant de principautés espagnoles ou arabes deviendra « le symbole du dynamisme de la Castille médiévale dans l’exercice de sa mission divine, l’unification de l’Espagne », dit encore David Abulafia – symbole que l’ultra nationaliste Franco récupérera avec enthousiasme en dédiant au Cid une belle statue à Burgos.
Enfin le soudard aux exactions infinies et trahisons à répétition, et qui, pour conforter sa situation à la cour, avait habilement épousé Chimène, cousine du roi Alphonse, se trouvera érigé, grâce aux dramaturges espagnols du « Siècle d’or » et surtout à Corneille, en porte-flambeau de l’idéal chevaleresque et du pur amour. Ce qui amène Nora Berend à poser cette question : « Qu’est-ce qui nous pousse ainsi à glorifier les exploits militaires et transformer les individus les moins recommandables en héros ? ». Une question qui va très loin.
[post_title] => Quel salopard, ce Cid !
[post_excerpt] =>
[post_status] => publish
[comment_status] => open
[ping_status] => open
[post_password] =>
[post_name] => quel-salopard-ce-cid
[to_ping] =>
[pinged] =>
[post_modified] => 2024-11-28 17:34:57
[post_modified_gmt] => 2024-11-28 17:34:57
[post_content_filtered] =>
[post_parent] => 0
[guid] => https://www.books.fr/?p=130828
[menu_order] => 0
[post_type] => post
[post_mime_type] =>
[comment_count] => 0
[filter] => raw
)