Il y a cent cinquante ans (le 1er janvier 1871) était fondé le IIe Reich, qui devait sombrer avec la défaite de 1918. Cet anniversaire a donné lieu outre-Rhin à plusieurs publications dont celle de Hedwig Richter, qui a défrayé la chronique. Elle retrace l’histoire allemande des deux derniers siècles sous l’angle de l’émergence de la démocratie. Richter tente d’y montrer que cette dernière n’a cessé, depuis au moins l’époque des Lumières et malgré quelques célèbres accidents de parcours, d’être « une affaire allemande ». Nommé pour des prix prestigieux, le livre s’est hissé en tête des ventes et a été réimprimé plusieurs fois. Son auteure s’est vu ouvrir les portes de nombreux médias. Puis est arrivé le contrecoup : des critiques assassines de la part de plusieurs de ses collègues historiens.
Dans Die Zeit, Eckart Conze lui reproche de voir avant tout dans le IIe Reich « une société civile réformatrice pratiquant la démocratie », occultant ainsi sa dimension éminemment autoritaire. Il remarque que s’il existait bien un Parlement, son pouvoir était très limité. « Un tigre sans dents », renchérit Andreas Wirsching dans Spiegel. Les deux professeurs insistent sur le rôle disproportionné de l’armée, qui agissait en dehors de tout contrôle parlementaire. Pour eux, pas de doute : le IIIe Reich hitlérien plonge bien ses racines dans le IIe Reich wilhelmien.
Dans la revue universitaire en ligne Sehepunkte, le même Wirsching récapitule les quatre principales thèses défendues par Richter : « L’histoire de la démocratie n’est pas toujours, mais souvent un projet d’élites » ; elle est « toujours l’histoire d’une limitation » ; elle est « essentiellement une histoire du corps, des mauvais traitements qui lui sont infligés, des soins qu’on lui apporte, de ses privations et de sa dignité » ; enfin, elle ne saurait se comprendre qu’au niveau international. Pour Wirsching, autant d’idées qui, quand elles ne sont pas erronées ou mal exploitées, sont juste banales. Le faux pas nazi est intégré à la longue marche de l’Allemagne vers la démocratie d’une manière qu’il trouve « inqualifiable ».
Dans Die Zeit, Richter rappelle que c’est en Allemagne qu’« en 1897 fut fondée la première organisation au monde de défense des droits des homosexuels et en 1904 la première association internationale pour le droit de vote des femmes ». Pour le politologue Carsten von Wissel, qui la soutient, Richter a surtout le tort de mettre en lumière des idées dérangeantes : les horreurs de la guerre de 1914 résultant non pas uniquement du militarisme prussien, mais aussi de la démocratie de masse, par exemple.
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La guerre la plus longue jamais vécue par les Danois, entre 1700 et 1721, obtient enfin l’ouvrage de référence qui manquait dans leur langue, se félicite à Copenhague une presse unanime. En deux tomes et 1 112 pages, l’historien Dan H. Andersen s’est attaché à retracer un conflit qui « modifia l’ordre européen », rappelle Per Stig Møller, ex-ministre des Affaires étrangères, sur le site d’information Altinget. Provoquée par une triple offensive contre la grande puissance régionale de l’époque, la Suède, la guerre se solda par l’affaiblissement de cette dernière et son remplacement, dans ce rôle prépondérant, par la Russie tsariste. Dans un vaste périmètre autour de la mer Baltique, étendu jusqu’à la Norvège et à l’Ukraine, l’auteur « a retourné toutes les pierres et rassemblé les fruits de ses nombreuses années de recherches dans deux volumes, qui constituent un ouvrage indispensable sur cette guerre, avec moult détails et raisonnements surprenants, parfois amusants », applaudit un autre historien, Ulrik Langen, dans l’hebdomadaire Weekendavisen. On y trouve « le gel, la peste et des cités assiégées ». « Les passages où l’auteur se mêle à de simples soldats et à des civils durement éprouvés sont captivants », ajoute-t-il, saluant son style. La grande guerre du Nord fit plusieurs centaines de milliers de morts. Du côté des têtes couronnées et de leurs « jeux diplomatiques complexes », on côtoie le « génial » Pierre le Grand, Frédéric IV du Danemark, « maniaque du contrôle », et le jeune Charles XII de Suède, « fou de guerre », résume Per Stig Møller. C’est d’ailleurs ce souverain qui fit traîner le conflit en longueur, pointe le quotidien Berlingske : « Dans le grand jeu politique, il refusait obstinément de reconnaître les réalités issues des champs de bataille. »
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« Parmi les nombreuses histoires de l’Espagne qui restent à raconter, celle de ses “angoisses coloniales” est peut-être l’une des plus méconnues, surtout en ce qui concerne l’Afrique du Nord », estime Luz Gómez García dans le quotidien espagnol El País. Aussi la critique se félicite-t-elle de la parution d’A mi querido Abdelaziz… de tu Conchita, un ouvrage qui jette un nouvel éclairage sur la période du protectorat espagnol au Maroc (1912-1956). Les auteurs, Josep Lluís Mateo Dieste, anthropologue, et Nieves Muriel García, spécialiste des études de genre, ont exploité un vaste fonds d’archives inédites : des lettres, des cartes postales et des télégrammes interceptés entre 1936 et 1956 par la Délégation des affaires indigènes (DAI), située à l’époque à Tétouan, dans le nord du Maroc. La raison de leur interception par l’administration coloniale ? Il s’agissait de la correspondance amoureuse échangée entre des hommes marocains et des femmes espagnoles. Or, d’après une circulaire interne de la DAI, ces amours subversives risquaient de saper le « prestige espagnol au Maroc ». Chaque document exhumé par les auteurs est d’ailleurs frappé de la lettre « R », qui, comme ils l’apprendront au cours de leur enquête, signifiait pour les agents coloniaux « Rareza », c’est-à-dire « bizarrerie » en français. Quelque 130 de ces « bizarreries » sont reproduites dans l’ouvrage, accompagnées d’une analyse du contexte sociopolitique qui a conduit à la répression des relations intimes entre colonisateurs et colonisés. « Même si à la lecture de ces lettres nous avons parfois l’impression de profaner l’intimité des femmes qui les ont écrites, il nous reste la consolation de compatir à leur angoisse et à leur désespoir, de leur être reconnaissants pour l’occasion unique qu’elles nous offrent de regarder cette époque depuis une position privilégiée : à travers leurs yeux et à partir de leur propre vie », conclut Ángeles Ramírez dans le semestriel Revista de estudios Internacionales Mediterráneos.
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David Baddiel est populaire outre-Manche pour avoir coécrit en 1996 la chanson Three Lions, devenue l’hymne du football britannique. Il l’est également pour ses stand-up hilarants et ses romans pour la jeunesse – plus de 1 million de volumes vendus, traduits en 26 langues. L’humoriste est aussi, depuis février, l’auteur d’un best-seller qui n’a rien de drôle. Un coup de gueule. Politique. Polémique. Électeur de gauche, Baddiel porte le fer dans son propre camp sur la question de l’antisémitisme. La gauche de la gauche britannique, dite « progressiste », porteuse d’une politique identitaire, est prompte à défendre toutes les minorités contre les discriminations « sauf une, dénonce-t-il, la minorité juive ». Le livre a été abondamment commenté dans le Royaume et au-delà. « Baddiel, qui se revendique juif et s’avoue athée, est devenu le porte-voix improbable de la communauté juive de Grande-Bretagne », relève le quotidien israélien Haaretz.
Le sujet est sensible dans un pays où l’inertie du chef du Labour Jeremy Corbyn face à des actes antisémites au sein même du parti a suscité un débat national et contribué à sa chute. Toutefois, relève The Daily Telegraph, « Baddiel insiste sur le fait qu’il est plus préoccupé par le silence sur l’antisémitisme que par son expression ». Ce livre s’adresse « à ceux qui se considèrent comme progressistes et qui semblent avoir un angle mort lorsqu’il s’agit d’antisémitisme », précise l’auteur. Il s’indigne, résume le Financial Times, du « deux poids, deux mesures des défenseurs des minorités ».
L’humoriste produit un florilège d’exemples tirés de l’actualité. Il y a ainsi la députée Dawn Butler, lors du congrès travailliste de 2019, qui énonce la longue liste des groupes sociaux que le parti protégera : « Noirs, Blancs, Asiatiques, handicapés, LGBTQ, ceux qui portent un hidjab, un turban, une croix… » « Et laisse de côté une minorité », note Haaretz. Ou encore la radio BBC4, qui diffuse le jour de l’an 2017 l’intégrale des poèmes de T. S. Eliot lus par le comédien Jeremy Irons, dont celui où les juifs sont comparés à des rats.
Il s’interroge : pourquoi cette distorsion ? Et répond : « Les juifs sont caricaturés comme de riches capitalistes. Et ils sont “trop blancs”. De fait, ils n’intéressent pas les militants de la justice sociale qui considèrent le racisme comme une construction de classe visant les seules personnes économiquement ou socialement défavorisées. » Riches ? « Comme Baddiel le souligne, ses grands-parents allemands étaient des privilégiés jusqu’au jour où ils ont été contraints de fuir tandis que leurs biens étaient confisqués », pointe le mensuel Prospect. Trop blancs ? « Une des premières blagues de Baddiel en stand-up, raconte Haaretz, c’était qu’on l’avait battu deux fois : une fois en tant que juif, l’autre fois en tant que Pakistanais. »
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Comment parler d’une femme qui s’est peu livrée, qu’aucun journaliste n’a jamais interviewée ? Ses employeurs, qui la logeaient pourtant – elle s’occupait de leur progéniture –, n’avaient pas la moindre idée de ses occupations lorsqu’elle emmenait les enfants en promenade ou en pique-nique… Ils ignoraient qu’ils hébergeaient une géniale photographe.
Vivian Maier était une femme secrète. Elle n’était pas aimable – rugueuse, même, si l’on en croit les témoignages recueillis par la suite. Rien en elle de Mary Poppins. Elle exigeait que sa chambre dispose d’une serrure. Personne ne pouvait entrer dans son domaine, voir les appareils photo, dont le Rolleiflex qu’elle avait toujours à portée de main, s’étonner des rouleaux de pellicule par dizaines. De son vivant, personne n’a vu ses photos des passants des rues de New York et de Chicago, où elle a successivement vécu. Et pour cause : elle n’a jamais exposé ses clichés (certains n’étaient même pas développés), ceux-ci n’ont été découverts que peu de temps avant sa mort, survenue en 2009.
Paulina Spucches, la toute jeune auteure de cet ouvrage consacré à la photographe, a fait appel à son imagination pour combler les trous. Elle s’est en partie inspirée des rares informations biographiques recueillies par John Maloof, l’homme qui a eu la main heureuse en achetant dans une vente aux enchères un carton plein de négatifs photographiques et qui, depuis, cherche à mettre le travail de Vivian Maier en lumière. Il a fait des recherches sur ses ascendants, sur sa famille française – sa mère était originaire de la vallée du Champsaur, dans les Hautes-Alpes. Il a même réalisé un film 1 qui tente d’éclairer la personnalité complexe de celle que ses cousins français appelaient « l’Américaine ». Paulina Spucches narre cette existence en télescopant les époques, faisant cohabiter Vivian enfant et Vivian adulte : ses allées et venues avec sa mère entre la France et New York, le goût de la photo acquis au contact de la photographe et sculptrice Jeanne Bertrand, qui a hébergé la mère et la fille dans les années 1930, l’existence possible d’un frère qui vivait avec son père…
Restent les photos de Vivian Maier. Comment rendre compte de son travail sans publier – bêtement, pourrait-on dire – ses clichés ? La jeune dessinatrice adopte une façon de faire aussi malicieuse qu’originale. Au fil du récit, elle dévoile une vingtaine de photos de Vivian Maier en les reproduisant à l’aquarelle, fidèlement mais dans une débauche de couleurs là où la photographe usait surtout du noir et blanc. Pour chacune, elle invente la scène qui a précédé la prise de vue. Trois hommes affalés sur un trottoir ? La dessinatrice les imagine fracassés qui par le travail, qui par la mort d’un fils en Corée. Une femme qu’un policier tente de calmer ? C’est que son fils vient d’être arrêté, suppose Paulina Spucches. Et ainsi de suite : quatre jeunes femmes de dos, en haut de l’Empire State Building ? Elles parlent de leurs rêves, l’une d’entre elles veut devenir star de cinéma… Idem pour les clichés pris dans le Champsaur, où la photographe a séjourné à la fin des années 1950. La ville, ses gratte-ciel, ses néons et ses vitrines étincelantes laissent place à une France rurale où les vaches traversent encore les villages, à des paysages où la nature éclate.
La dualité, ici, est reine. Entre la nanny et la photographe, les États-Unis et la France, l’enfance et l’âge adulte, le réel et l’imaginaire. Le travail de Paulina Spucches ne prétend pas à la vérité, il donne à voir autant qu’à réfléchir – comme ces surfaces réfléchissantes dont la photographe s’est abondamment servie pour se tirer le portrait. L’album est sous-titré « À la surface d’un miroir », autant pour signifier l’importance de ces reflets – sans eux, la femme au Rolleiflex n’aurait pas de réalité physique – que pour nous dire que nous ne pourrons sans doute jamais percer le secret de Vivian Maier, cette femme singulière.
— O. C.
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« Ceux qui, comme moi, écoutaient Lída Rakušanová se souviennent combien Radio Free Europe a aidé les Tchèques à survivre à la normalisation [période de retour à l’orthodoxie communiste après l’écrasement du Printemps de Prague] », écrit dans le quotidien Dnes le politologue Michal Klíma au moment de la sortie de Svobodná v Evropě, l’autobiographie de la journaliste grâce à qui les Tchécoslovaques purent contourner le rideau de fer pour accéder à une information non diligentée par Moscou. Sa voix leur parvenait depuis Munich, où, en 1949, les États-Unis avaient fondé Radio Free Europe pour lutter contre la propagande de l’URSS. Parmi toutes les langues diffusées, l’antenne tchécoslovaque avait été la première à émettre, en ondes courtes, en 1950 – Lída avait alors 3 ans. Émigrée en Allemagne après l’invasion des chars russes à Prague en 1968, elle intègre la radio en 1975. Celle qui est aussi appelée « la voix de la liberté » raconte la façon dont elle s’est imposée en tant que femme dans la rédaction, la lutte entre les émigrants de 1948 – opposants de la première heure au communisme – et ceux de 1968, son engagement pro-européen et anticorruption, mais aussi, se réjouit le site Novinky.cz, des anecdotes parmi lesquelles ses liens avec Václav Havel ou Bill Clinton… À la chute du communisme, Rakušanová revint en Tchécoslovaquie. Elle est depuis repartie vivre dans un chalet en Bavière. Radio Free Europe, elle, déménagea à Prague en 1994. Elle diffuse encore aujourd’hui, et toujours aux frais du Congrès américain, dans une trentaine de pays où l’information n’est pas libre.
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Les princes Boriatinski font l’acquisition d’un domaine délaissé, qui se distingue par son magnifique jardin. Loin des mondanités de Moscou, « le contact avec une nature foisonnante et généreuse éveille en eux des passions incongrues », relate le portail Meduza à propos du dernier roman de Marina Stepnova. La parenthèse enflammée et charnelle s’achève par la grossesse tardive de la princesse, âgée de 44 ans. Grigori Meizel, le médecin de famille d’origine allemande, accompagne celle-ci lors des complications et de l’accouchement. Alors que le prince est de plus en plus effacé, Meizel prend en charge, aux côtés de la mère, l’éducation de la petite Toussia, une enfant fragile et bien étrange. Esprit libre et fort caractère, elle restera pourtant muette jusqu’à ses 5 ans et passera tout son temps avec des chevaux, sa passion exclusive. Le décor renvoie à une sorte d’« éden aristocratique » qui fait écho aux textes emblématiques de Tchekhov, Tolstoï ou Tourgueniev, commente le site Protchtenié. L’écriture et les problématiques évoquées par l’auteure sont toutefois bien celles d’un roman psychologique moderne.
« Un triomphe », s’enthousiasme l’écrivain Itumeleng Molefi dans The Johannesburg Review of Books à propos du dernier roman de Jennifer Nansubuga Makumbi, The First Woman. L’auteure ougandaise y raconte le passage à l’âge adulte de Kirabo, une jeune fille de 12 ans qui habite le village de Nattetta à l’époque du régime sanguinaire d’Idi Amin Dada, dans les années 1970. Kirabo, qui tente de retrouver sa mère, consulte une vieille sorcière aveugle, Nsuuta. Cette dernière lui apprend que, si les ancêtres ont inventé des histoires, c’est pour mieux opprimer et rabaisser les femmes. Nsuuta pense que le caractère rebelle de Kirabo et ses pouvoirs surnaturels proviennent de la « première femme », qui était libre et indépendante. Ces traits n’existent plus chez la plupart des femmes, ce qui leur permet de mieux s’adapter à une société dirigée par les hommes. La romancière fait référence au concept ougandais de mwenkanonkano, antérieur au féminisme à l’occidentale, qui incite les femmes à lutter efficacement contre la domination masculine, quitte à faire semblant d’être faibles. Itumeleng Molefi voit dans ce roman, inspiré de traditions orales, « une riposte à ceux qui se plaisent à défendre le pouvoir patriarcal en affirmant que le féminisme n’est “pas africain” ». La romancière égratigne au passage les femmes qui entretiennent le statu quo, consciemment ou non, et apporte son soutien aux hommes féministes. Sur le site Brittle Paper, l’écrivaine ougandaise Harriet Anena salue ce « récit empreint d’humour », garantissant de « délicieuses séances de lecture ».
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Il y a cent cinquante ans, une théorie scientifique largement répandue prétendait que, au-delà de 550 mètres de profondeur, l’océan était dénué de vie. On sait désormais que c’est faux. Aujourd’hui, « nos connaissances sur les grands fonds marins progressent à un rythme tellement effréné qu’on peine à suivre », s’enthousiasme le zoologiste australien Tim Flannery dans The New Statesman. Selon lui, The Brilliant Abyss, le dernier livre de la chercheuse en biologie marine Helen Scales, est une excellente occasion de rafraîchir ses connaissances en la matière : « L’ouvrage est si complet et si érudit qu’il fera date. » Les abysses constituent le plus grand habitat de la Terre, où évoluent des créatures aussi étranges qu’infiniment variées. Tels ces vers rongeurs d’os d’à peine 3 centimètres, arborant des tentacules rouges à une extrémité et, à l’autre, des ramifications vert vif qui produisent de l’acide. Seulement, ce monde merveilleux est menacé. Le second volet de l’ouvrage détaille l’impact des activités humaines sur les fonds marins. Les coupables désignés sont le chalutage, qui détériore les récifs coralliens millénaires, et l’exploitation minière en eaux profondes, « qui pourrait porter un coup fatal à la planète entière »
Historien de formation, parlant couramment le pachto, Carter Malkasian est un ancien conseiller du haut commandement américain en Afghanistan. Dans son troisième livre, paru en septembre 2021 – au lendemain du retrait en catastrophe de l’armée américaine de l’Afghanistan –, l’expert dresse un tableau sans concession de ce conflit, le plus long de l’histoire des États-Unis. Malkasian y présente des stratèges américains en proie à l’indécision chronique, en dépit des premiers succès militaires remportés contre les talibans, en 2001. « Les États-Unis sont entrés dans un pays qu’ils ne comprenaient pas, un pays qui avait dérouté plus d’une grande puissance par le passé, et ils l’ont fait sans avoir de stratégie claire à long terme », commente l’historien Fredrik Logevall dans The New York Times. « On referme cet ouvrage remarquable avec le sentiment profond que la seule présence des États-Unis a créé un problème monumental pour le gouvernement de Kaboul », poursuit ce spécialiste des relations internationales. À l’instar de l’allié sud-vietnamien un demi-siècle plus tôt, celui-ci n’a jamais obtenu de soutien au sein de la population, en raison de son association avec une puissance occupante étrangère.
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