สล็อตเว็บตรง หวยออนไลน์ หวยออนไลน์ สล็อต บาคาร่าเว็บตรง บาคาร่า บาคาร่า บาคาร่า หวยออนไลน์ บาคาร่า บาคาร่า หวยออนไลน์ หวยออนไลน์ บาคาร่า หวยออนไลน์ บาคาร่า หวยออนไลน์ สล็อตเว็บตรง สล็อตเว็บตรง
Non classé Archives - Page 82 sur 817 - Books

WP_Post Object
(
    [ID] => 110905
    [post_author] => 56398
    [post_date] => 2021-10-28 06:59:20
    [post_date_gmt] => 2021-10-28 06:59:20
    [post_content] => 

Vasantha Yogananthan est un chasseur d’imaginaires. Il aime voir le réel « comme une scène de théâtre ». Shakes­peare ne l’aurait pas contredit, qui clamait : « Le monde entier est un théâtre/ Et tous, hommes et femmes, n’en sont que les acteurs », mais le photographe se réclame plutôt du réalisme magique de García Márquez. Et c’est bien l’oscillation de chaque cliché entre vue triviale et vision onirique qui fait l’enchantement des photos de sa série réalisée sur le Ramayana, ce poème épique qui constitue avec le Mahabharata le socle de la mythologie hindoue. Intitulée A Myth of Two Souls, elle est composée, comme le Ramayana, de sept livres, dont le dernier, Amma (« mère » en tamoul), est paru en septembre, cinq ans après le premier. Un travail polymorphe – « titanesque », avoue son auteur – mêlant photographie, collage, coloriage et peinture.

Au fil de sept voyages étalés sur autant d’années, Vasantha Yogananthan a arpenté le sous-continent indien du Népal au Sri Lanka, suivant l’itinéraire des héros de cette épopée écrite aux alentours du XIe siècle avant J.-C. Lors de son premier séjour, en 2013, le photographe est parti avec le désir de produire « une interprétation photographique du Ramayana » que son père lui lisait enfant. Mais « comment photographier une fiction ? », se demandait-il.

Il avait alors 28 ans. Il s’était déjà illustré comme photographe indépendant avec une série, mi-poésie, mi-document, sur les résidents d’une plage sauvage, Piémanson, près de Sète, qui lui avait valu en 2012 une bourse du Talent et une exposition au musée Albert-Kahn. Mais le Ramayana est un tout autre défi. C’est le mythe fondateur d’une civilisation multimillénaire qui fait vibrer d’émotion, aujourd’hui encore, 1,5 milliard d’êtres humains, comme il le découvrira dès son premier voyage : « Cette épopée est réelle pour tant d’Indiens ! Elle est l’objet de milliers de réinterprétations, selon les traditions et lieux, mais aussi de films, de séries, de comics, de jeux vidéo… » Dès lors, il cherchera à « capter la réverbération des échos du mythe dans le quotidien ».

The Myth of Two Souls est à la fois une évocation fidèle, en 437 photos, des sept sé­quences du Ramayana – la naissance des héros Rama et Sita, leur mariage, leur exil, l’enlèvement de l’épouse, sa recherche, la guerre, la maternité de Sita – et une convocation de l’imaginaire qu’il éveille. Il y a ainsi, dans Amma – épilogue célébrant la paix et la pureté –, ces paysages dont la solitude laisse deviner le seul souffle du vent qui gonfle parfois des voiles, et puis ces rares villageois qui apparaissent, esquissant des scènes du mythe à la demande du photographe (« Cela aurait été impossible si les Indiens n’avaient un amour inconditionnel de la photo »). Et, surtout, une magnifique palette chromatique, tout en transparence et en jeux sur des teintes complémentaires.

« Quelles sont les couleurs de l’Inde ? » s’interrogeait avant son départ le photographe, taraudé par « leur influence sur la perception des photos ». La réponse, il la donne au terme d’un travail réfléchi lors de la prise de vue, et aussi après. Yogananthan n’utilise que des appareils argentiques, car « vivre un voyage sans filtre numérique au XXIe siècle, c’est retrouver une autre manière d’être au monde », écrit-il dans Amma. S’il colorie à la peinture acrylique certains de ses tirages, il confie nombre de ses clichés noir et blanc à Jaykumar Shankar, peintre de photos, qui pratique un artisanat vivace à l’époque britannique. « Les colons demandaient aux Indiens de colorier leurs photos. Jaykumar a hérité de cette tradition familiale. Il peint mes photos avec sa sensibilité. » Grâce à cette collaboration unique, c’est toute la palette des miniatures indiennes qui soutient le récit de The Myth of Two Souls. Dans Amma, à l’approche de la fin de l’épopée, les couleurs vont s’estompant, rejoignant l’aube blanche de son début en un mouvement circulaire célébré par le Ramayana.

— C. Bn.

[post_title] => Rêves de « Ramayana » [post_excerpt] => [post_status] => publish [comment_status] => open [ping_status] => open [post_password] => [post_name] => reves-de-ramayana [to_ping] => [pinged] => [post_modified] => 2021-11-12 18:52:06 [post_modified_gmt] => 2021-11-12 18:52:06 [post_content_filtered] => [post_parent] => 0 [guid] => https://www.books.fr/?p=110905 [menu_order] => 0 [post_type] => post [post_mime_type] => [comment_count] => 0 [filter] => raw )
WP_Post Object
(
    [ID] => 110802
    [post_author] => 56398
    [post_date] => 2021-10-19 15:37:31
    [post_date_gmt] => 2021-10-19 15:37:31
    [post_content] => 

L’Union européenne, en aspirant à devenir à terme un nouveau super-État, prétend s’inscrire dans le sens de l’Histoire. La tendance n’est-elle pas, en effet, à la constitution d’États de plus en plus gros ?
Non. Le nombre d’États dans le monde a augmenté au cours des décen­nies de mondialisation économique qui ont suivi la Seconde Guerre mondiale, passant de 91 en 1950 à 202 en 2010. Les États qui ont émergé au cours de ce processus sont plutôt restés petits, malgré une population mondiale en constante augmentation. Ils comptaient en moyenne 34 millions d’habitants en 2010 contre 26,2 millions en 1950. Il y a certainement de nombreuses raisons à cela (la décolonisation en premier lieu), mais l’une d’elles est que les nations se sentent plus en sécurité lorsqu’elles sont gouvernées par elles-mêmes plutôt que par une élite supranationale ou par un État sur lequel elles n’ont aucune prise parce qu’il est contrôlé par un autre État ou un super-État. On le voit bien avec l’Union européenne, justement, dont la construction a exacerbé le séparatisme aussi bien régional (en Écosse et en Catalogne) que national (en Grande-Bretagne, avec le Brexit).

Dans votre dernier livre, vous partez du constat que la logique de la démocratie s’oppose à celle de la mondialisation. Or des pays tout à fait démocratiques, comme les États-Unis ou les pays européens, ne sont-ils pas gouvernés – ou ne l’ont-ils pas longtemps été – par des défenseurs de la mondialisation élus démocratiquement et respectant les règles de la démocratie ?
J’envisage toujours la démocratie en termes historiques et concrets, en relation avec un système économique. On peut tout à fait définir la démocratie dans une société esclavagiste comme Athènes ou les États-Unis des origines, sans tenir compte de l’économie et donc en termes idéalistes ; si ceux qui font le travail n’ont pas leur mot à dire, il est facile d’échafauder de merveilleuses théories et de tenir des discours où il n’est pas question de domination, d’évoquer les conditions dans lesquelles toute personne raisonnable peut et doit souscrire à une norme. Mais, lorsque les classes laborieuses ont également des droits civiques, comme dans le capitalisme moderne, le conflit entre la norme d’égalité de la Constitution et la machine à inégalités du marché devient une affaire politique. Et un régime démocratique, s’il veut l’être et le rester, doit être capable de corriger les effets du marché. Le libéralisme et, surtout, le néolibéralisme tentent d’immuniser l’élitisme du marché contre l’égalitarisme de la Constitution démocratique ; la gauche, en revanche, a toujours essayé de transformer l’économie capitaliste en une économie plus égalitaire. Encore faut-il que l’État démocratique puisse contrôler l’économie capitaliste, que celle-ci reste ancrée dans le réel, maîtrisable. Ce n’est plus le cas lorsque l’économie est intégrée au niveau mondial, puisqu’une démocratie mondialement intégrée n’est, elle, pas possible.

Si je vous comprends bien, tout serait une affaire de vocabulaire. Les mondialistes et les européistes auraient dénaturé le sens même de la démocratie.
Les défenseurs de l’ordre néolibéral instrumentalisent les idées de démocratie et de solidarité en associant, de manière pernicieuse, la mondialisation à l’internationalisme et l’État-nation à l’autoritarisme. Ils voudraient nous faire croire que la démocratie n’est qu’un système de valeurs universelles qui ne se justifie moralement qu’à l’échelle mondiale ou, au moins, européenne. Or c’est précisément le niveau auquel elle ne saurait exister. Autrement dit, tandis qu’à l’échelle des nations, là où la démocratie existe bel et bien comme institution, ils la dénigrent et la trouvent « plébéienne », ils la portent aux nues là où elle est concrètement inenvisageable.

La complexité toujours plus grande du monde n’implique-t-elle pas, ce­pen­dant, que nous devions, dans un ­certain nombre de domaines, limiter l’influence de la démocratie et laisser les experts prendre les décisions ?
Quels experts ? Et quelles décisions ? Et qui est « nous » ? Il n’y a pour ainsi dire aucun domaine où tous les « experts » soient du même avis. Là où ils le sont, ou semblent l’être, leur opinion est généralement influencée par leur appartenance de classe : les classes moyennes et supérieures éduquées. En outre, les experts ont aussi des intérêts carriéristes ; dans le système scientifique actuel, il n’y a guère d’« intelligentsia sans attaches » (« freischwebende Intelligenz »), selon l’expression du sociologue Karl Mannheim. Aujourd’hui, chaque intérêt trouve un « expert » pour prendre son parti, que ce soit par conviction, en échange d’un financement de ses recherches ou d’un « paiement au comptant », pour reprendre, cette fois, la formule de Marx et Engels dans le Manifeste du parti communiste. Les décisions qui affectent le bien commun ont besoin de légitimité : elles doivent être acceptées par les personnes qu’elles concernent. Après la crise financière de 2008 et la pandémie de ­Covid-19, qui ont mis à nu les limites, pour ne pas dire l’incompétence, des soi-disant experts, comment s’attendre à ce qu’un nombre suffisant de citoyens soient prêts à soutenir une décision sous prétexte qu’elle serait issue d’une formule mathématique ? Les décisions ayant des conséquences sur les opportunités et le mode de vie des populations nécessitent une justification morale plutôt que simplement théorique. À moins, bien sûr, qu’on ne puisse les imposer par la force. Ce n’est pas là, cependant, une voie qui conduit à la paix intérieure et à la légitimité politique.

Vous défendez une Europe des États-nations. Pour stigmatiser votre position, le philosophe Jürgen Habermas a parlé de « Kleinstaaterei », terme très péjoratif puisqu’il fait référence au morcellement du Saint Empire romain germanique et évoque en français quelque chose comme la « balkanisation ». Que lui répliquez-vous ?
L’alternative que propose Habermas, je l’appelle « Großstaaterei », l’hubris du Grand État. La Großstaaterei est dangereuse. L’exemple même de l’Allemagne, pris par Habermas, le prouve : sans l’unification du vieil empire en un nouveau à la fin du XIXe siècle, puis, plus tard, en un troisième, censé durer mille ans, bon nombre de catastrophes n’auraient-elles pas été épargnées à l’Europe ? Imaginons, à la place, une sorte de grosse Suisse, trop décentralisée pour agresser ses voisins, mais tout à fait capable de se défendre : je me demande si cela n’aurait pas mieux valu. Les grands États ont tendance à édifier des empires afin de dominer les petits États qui les entourent. Ils sont populaires auprès des néolibéraux lorsque la société que ces derniers gouvernent est, à l’instar de l’Europe, trop hétérogène pour être gouvernable démocratiquement. Plus un pays est grand et hétérogène, plus il est susceptible d’être dirigé par une oligarchie – soit sous la forme d’une économie de marché néolibérale, politiquement installée mais pas politiquement corrigée, soit sous la forme d’une technocratie, soit sous la forme d’un mélange des deux, comme l’Union européenne post-Maastricht, notamment sous son aspect d’union monétaire. N’en déplaise à Habermas, c’est dans des États souverains petits ou de taille moyenne que la démocratie a le plus de chances d’exister ; et, en tant qu’ordre interne, elle a besoin d’un ordre externe qui la soutienne. La question pour l’Europe est de savoir si nous parviendrons à devenir un « troisième monde » de démocraties souveraines, libres, coopérant les unes avec les autres, au lieu d’un « État de puissance » (Machtstaat) intégré, comme l’appelait de ses vœux le darwiniste social Max Weber pour l’Allemagne avant la Première Guerre mondiale. Nous savons ce qu’il en est résulté dans le cas de l’Allemagne.

Ne serait-il pas toutefois préférable que l’Europe soit unie pour tenir tête à la Chine et aux États-Unis ?
Aujourd’hui, comme argument massue pour abolir les États-nations européens et les dissoudre dans un super-État, les intégrationnistes comme Habermas ont découvert, en effet, la Chine et la prétendue nécessité de la contrer avec une « armée européenne ». Au mieux, cependant, cela se traduirait par un sous-empire dans la partie du monde gouvernée par les États-Unis, sous-empire chargé par les Américains de surveiller leurs arrières en Eurasie et de leur permettre ainsi de se concentrer sur leur guerre avec la Chine dans le Pacifique. On devrait savoir à quel point c’est dangereux. Il serait tout aussi dangereux de suivre le rêve français de faire de l’Europe une troisième puissance mondiale, entre les États-Unis et la Chine. De toute façon, un tel rêve est complètement irréaliste, car l’Allemagne et la France ne pourraient pas s’entendre sur des intérêts géostratégiques communs. La France ne partagerait jamais avec l’Allemagne son arme nucléaire et son siège permanent au Conseil de sécurité des Nations unies.

Dans votre livre, vous qualifiez l’Europe de « religion civique ». Qu’entendez-vous par là ?
En Allemagne, mais aussi en dehors de l’Allemagne, l’Europe est sacralisée – et cette sacralisation confère au projet européen une aura qui rend blasphématoire tout questionnement sur le sens et le but de ce projet. Prenez le slogan du SPD [Parti social-démocrate d’Allemagne] pour les élections européennes de 2019 : « L’Europe est la réponse. » À aucun moment il n’était précisé de quelle Europe il s’agissait, ni quelles étaient les questions auxquelles elle pouvait et devait répondre. La défense de l’Union européenne repose sur un discours de plus en plus déconnecté de la réalité. Difficile, désormais, de la défendre sérieusement au nom de la prospérité, comme on l’a longtemps fait. On met plutôt en avant le fait qu’elle aurait permis de maintenir la paix en Europe depuis 1945. On prétend que, sans elle, ce serait le retour des guerres effroyables qui ont marqué la première moitié du XXe siècle. Ce récit fantasmagorique oublie que la cause fondamentale de la paix européenne depuis 1945 est la résolution de la « question allemande », avec la capitulation sans condition du IIIe Reich et sa partition, suivie d’une présence durable des États-Unis en Europe, de la subordination complète de l’armée allemande à un commandement américain ou soviétique et de la Guerre froide, qui maintenait un équilibre fondé sur la terreur nucléaire. Tout cela a épargné à l’Allemagne et à l’Europe de l’Ouest, entre autres, une seconde occupation de la Ruhr par la France et a rendu possible, à la place, la Communauté européenne du charbon et de l’acier, qu’on peut considérer comme son équivalent fonctionnel. La Communauté économique européenne est née en 1957, soit douze ans après la fin de la guerre : elle n’est donc pas, de toute évidence, la cause de la paix en Europe, mais sa conséquence. D’une façon générale, la religion de l’Europe fustige l’État-nation au nom des horreurs dont il se serait rendu coupable au XXe siècle, comme si ces horreurs concernaient tous les États-nations, aussi bien l’Allemagne nazie que le Danemark ou la Pologne. Pour l’essentiel, rappelons-le, ces atrocités ont été le fait de l’État-nation allemand entre 1933 et 1945.

Quels seraient les avantages d’une Europe des nations ?
Outre celui de pouvoir exister, contrairement à un hypothétique super-État européen toujours promis mais jamais réalisé, car irréalisable ? Précisément les avantages qui ont toujours été l’apanage de l’Europe. Au milieu de sa monumentale Histoire du déclin et de la chute de l’Empire romain, le grand historien de l’Antiquité Edward Gibbon se demande si la tragédie que fut l’effondrement de l’Empire romain d’Occident au Ve siècle pourrait se reproduire à son époque, au XVIIIe siècle. Il répond par la négative. L’un de ses arguments est que la division en petites unités politiques a rendu les États et le système étatique européen plus stables et dynamiques que l’Empire romain ne l’a jamais été. Dans un système étatique décentralisé, une mauvaise décision prise par l’un des gouvernements ne nuit qu’à une partie de la population totale ; les autres États ou parties du système peuvent s’en prémunir. La décentralisation bénéficie aussi de l’avantage d’une intelligence dispersée ; elle permet de tester différentes solutions à un même problème et de sélectionner les meilleures. Pour illustrer la supériorité du système décentralisé, Gibbon se lance dans une expérience de pensée. Il imagine « un conquérant sauvage sorta[n]t des déserts de la Tartarie » : « Il aurait à vaincre en différents combats les robustes paysans de la Russie, les nombreuses armées de l’Allemagne, la vaillante noblesse de France et les intrépides citoyens de la Grande-Bretagne, qui peut-être même se réuniraient tous pour la défense commune. » Une tâche quasi impossible, en tout cas autrement plus difficile que si notre conquérant barbare avait eu affaire à un État monolithique comme l’était l’Empire romain. L’argument de Gibbon me semble encore tout à fait valable, et il ne s’applique pas seulement au domaine militaire. On ne cesse de nous dire que les gros États s’en sortent mieux sur le plan économique. En vérité, c’est plutôt le contraire. Et, si la taille est effectivement corrélée aux performances économiques, c’est, semble-t-il, négativement. Un exemple parmi beaucoup : la croissance moyenne des États membres de l’Union européenne après la crise de 2008. Celle des douze pays les plus petits (qui comptent chacun moins de 5,8 millions d’habitants) a été sensiblement plus rapide : 1,95 % par an contre 1,34 % pour les six plus grands pays (dont la population est comprise entre 38 et 83 millions d’habitants).

Vous proposez comme solution à l’impasse où se trouve actuellement l’Union européenne un « État polanyio-keynésien ». Qu’entendez-vous par là ?
Je ne le propose pas ; j’y vois une possibilité historique au sein d’un système d’États européens coopératifs qui pourrait se constituer indépendamment des États-Unis et de la Chine, les deux superpuissances d’un monde bipolaire émergent. Avec ce terme, je fais référence à deux des plus grands penseurs économiques du XXe siècle, Karl Polanyi et John Maynard Keynes. Polanyi défend l’idée que les États, s’ils veulent être et rester des démocraties, doivent être capables de protéger les sociétés qu’ils gouvernent de leur « destruction créatrice » (pour reprendre l’expression forgée par l’économiste Joseph Schumpeter) par les marchés internationaux. L’exemple historique développé par Polanyi est l’étalon-or de la période qui a suivi la Première Guerre mondiale. Ce système monétaire interdisait aux États en retard sur la concurrence internationale de dévaluer leur monnaie et les condamnait à restaurer leur compétitivité uniquement par des réductions de salaires et de dépenses publiques – par l’austérité, donc. C’est un peu ce qui se passe aujourd’hui avec le système de l’euro : il impose à l’Italie et à la France une monnaie rigide à l’allemande, qui ne convient ni à leurs variétés respectives de capitalisme ni à leur compromis historique entre capital et travail, consistant à pouvoir de temps à autre dévaluer pour restaurer leur compétitivité tout en apaisant les tensions sociales. Dans l’entre-deux-guerres, le résultat a été que les gouvernements démocratiques ont été renversés par des mouvements antidémocratiques.

Et Keynes ? Qu’apporte-t-il à votre définition d’un État sachant conjuguer les exigences du capitalisme et celles de la démocratie ?
Keynes est celui qui a insisté sur le fait que l’internationalisation des économies ne devait être que sectorielle et non universelle, comme dans sa célèbre formule de 1933 : « Les idées, les connaissances, la science, l’hospitalité, les voyages – voilà les choses qui, de par leur nature, devraient être internationales. Mais que les marchandises soient fabriquées au pays chaque fois que cela est raisonnablement et commodément possible, et, surtout, que les finances soient essentiellement nationales. » 1 Le système monétaire et économique mondial de Bretton Woods, conçu sous l’influence de Keynes à la fin de la Seconde Guerre mondiale et détricoté à partir des années 1970, visait à donner aux pays participants la plus grande liberté possible pour mener leurs propres politiques économiques en fonction de leurs particularités et traditions politiques, tout à fait dans l’esprit de Polanyi. Précisons, au demeurant, que ni Polanyi ni Keynes n’étaient des nationalistes bornés – en tant qu’individus, ils étaient plus cosmopolites que la majorité de leurs contemporains. Cela ne les a pas empêchés – je dirais même que cela leur a permis – de comprendre et de défendre la valeur de l’État-nation démocratique en tant que protection contre les prétentions d’un capitalisme mondialisé déchaîné.

— Propos recueillis par Baptiste Touverey.

[post_title] => L’État-nation, seul antidote à la religion européiste [post_excerpt] => [post_status] => publish [comment_status] => open [ping_status] => open [post_password] => [post_name] => letat-nation-seul-antidote-a-la-religion-europeiste [to_ping] => [pinged] => [post_modified] => 2021-11-12 18:54:06 [post_modified_gmt] => 2021-11-12 18:54:06 [post_content_filtered] => [post_parent] => 0 [guid] => https://www.books.fr/?p=110802 [menu_order] => 0 [post_type] => post [post_mime_type] => [comment_count] => 0 [filter] => raw )
WP_Post Object
(
    [ID] => 108181
    [post_author] => 56398
    [post_date] => 2021-08-26 10:21:12
    [post_date_gmt] => 2021-08-26 10:21:12
    [post_content] => 

«La liberté ou la mort » fut leur devise. En 1821, les Grecs s’arment pour une révolution qui, après dix ans de guerre, fera naître un État indépendant. Fourmillant de héros et d’héroïnes, de faits d’armes et de sacrifices, ce soulèvement représente le moment fondateur de la nation grecque. Alors que la Turquie affirme un néo-otto­manisme toujours plus menaçant, le bicentenaire est aujour­d’hui célébré avec éclat et donne lieu à la publication d’une profusion d’ouvrages. Légèrement dépassée par ce phénomène, la presse multiplie les listes des « dix meilleurs livres à lire sur 1821 ». Ceux-ci se révèlent d’une intense variété, allant de l’histoire universitaire aux bandes dessinées en passant par les romans, la poésie, les essais de droit et les biographies. Deux siècles plus tard, la Grèce revient puiser à cette « nouvelle naissance » pour mieux comprendre qui elle est.
La révolution contenait en germe les plus cruciaux des pro­blèmes qui agitent encore le pays : rôle de l’Église, profonds clivages idéologiques et éternelle hésitation face à l’Europe. Le site culturel Tetrágono évoque « Achèvement national et désunion. Le cas grec », de l’historien Giorgos Mavrogordátos, qui étudie l’affrontement, toujours d’actualité, entre « les meneurs traditionnalistes et les pro-européens ». Conflit géopolitique, la révolution déploie aussi une dimension de classe, parfois oubliée – mais pas par l’économiste marxiste Yannis Milios dans « 1821. Sur les traces de la nation, de l’État et de la Grande Idée », ouvrage recommandé par l’édition grecque du magazine Esquire.
Récit des origines, la révolution grecque tient du mythe. Ce qui n’échappe pas à l’érudite Athens Review of Books, dans laquelle le grand historien Thános Vérémis offre une galerie de portraits des grandes figures de la révolution. De son côté, le quotidien de centre gauche To Vima parle avec émotion du roman « Femmes intrépides de 1821 », qui met en scène « l’abnégation et l’héroïsme des femmes grecques face aux malheurs de l’esclavage, du déracinement et de la mort » lors de l’affrontement gréco-­ottoman. Dans la même veine, la revue culturelle en ligne Diasticho vante le recueil « 1821 dans l’œil d’écrivains contemporains », dont les récits « parviennent à offrir aux générations suivantes des leçons de vaillance sans pareille ».
Citons également le lien affectif que les Grecs entretiennent avec l’ambigu mais si populaire « bandit d’honneur » Geórgios Karaïskákis. Ce hors-la-loi sanguinaire et valeu­reux qui s’est farouchement battu contre les Ottomans est le protagoniste du roman à succès « Parfois diable, parfois ange », de Kóstas Akrívos. Le journal régional de Thrace Paratiritis tis Thrakis y voit « la manière la plus forte de dépeindre la vie quotidienne de la révolution, loin des descriptions officielles de l’histoire politique. » Inscrite dans les sensibilités, l’insurrection a rejailli sur toutes les formes artistiques. Le quotidien de référence Kathimerini offre une pleine page à l’ouvrage « 1821 et le théâtre », tandis que son supplément Arts fait de même pour l’anthologie « La poésie grecque de la révolution de 1821 ».
À rebours des livres entretenant la légende, le quotidien I Avghi (affilié au parti de gauche ­Syriza) signale « Les Femmes et la révolution de 1821 », de Vassiliki Lazou. L’historienne y adopte une approche moins chauvine et souligne que « les femmes, qu’elles aient été chrétiennes ou musulmanes, furent les premières victimes de la révolution ». Ce nouveau regard critique se retrouve aussi dans « 21 failles dans l’histoire officielle de 1821 », de Spiros Alexiou, chroniqué par le quotidien de gauche Efimerida ton Syntakton. Cet auteur – « qui ne mâche pas ses mots » – rappelle à ses concitoyens que les glorieux révolutionnaires ne dédaignaient ni la piraterie ni la contrebande. Leur brutalité ne valait-elle pas celle de leurs oppresseurs ?
Selon l’angle choisi, la révolu­tion se fait genèse de l’État, sou­lèvement populaire ou re­nais­sance d’une civilisation. Une synthèse reste possible, à l’image du dernier essai de Yannis Kiourtsakis, Le Miracle et la Tragédie, salué par la presse locale et traduit en français. Vive et brève, cette méditation sur 1821 et ses suites invite à songer à la capacité d’adaptation d’un peuple grec conscient de son singulier humanisme, enraciné dans l’Histoire et le collectif. 

U.B.

[post_title] => La révolution de 1821, le récit des origines [post_excerpt] => [post_status] => publish [comment_status] => open [ping_status] => open [post_password] => [post_name] => la-revolution-de-1821-le-recit-des-origines [to_ping] => [pinged] => [post_modified] => 2021-08-26 10:21:12 [post_modified_gmt] => 2021-08-26 10:21:12 [post_content_filtered] => [post_parent] => 0 [guid] => https://www.books.fr/?p=108181 [menu_order] => 0 [post_type] => post [post_mime_type] => [comment_count] => 0 [filter] => raw )
WP_Post Object
(
    [ID] => 108185
    [post_author] => 56398
    [post_date] => 2021-08-26 10:21:12
    [post_date_gmt] => 2021-08-26 10:21:12
    [post_content] => 

Après quatre années de présidence Trump et une passation des pouvoirs sous tension, les Américains ­seraient-ils tentés par une forme d’examen de conscience ? C’est ce qui semble ressortir du palmarès des meilleures ventes dans la ­catégorie non-fiction établi par The New York Times, où prédominent les livres portant un regard critique sur la société américaine. En tête de la liste ­figure ainsi un essai sur la ­mémoire de l’esclavage aux États-Unis, How the Word Is Passed, de Clint Smith, poète et plume du magazine The Atlantic. L’auteur revisite neuf lieux emblématiques qui « commémorent ou déforment » le souvenir de l’esclavage, esquissant ainsi une « cartographie de la conscience historique de l’Amérique », note The New York Times, qui salue la qualité exceptionnelle de l’ouvrage.
Dans After the Fall, c’est un tour du monde qu’entreprend Ben Rhodes, qui fut durant huit ans le rédacteur des discours de Barack Obama. Après avoir converti le monde à un capitalisme ­débridé et à une politique étrangère musclée, les États-Unis font désormais face à un douloureux effet boomerang. Toujours dans la même veine auto­critique, le journaliste ­Michael Lewis revient dans The Premonition sur la mauvaise gestion de la crise du Covid-19 par les autorités américaines, en dépit des multiples alertes émises par des médecins et des scientifiques sur l’éventualité d’une telle pandémie. Enfin, dans The Anthropocene Reviewed, John Green, auteur quadragénaire d’un podcast du même nom, passe en revue toutes sortes de phénomènes et d’inventions liés à l’humain, du clavier QWERTY au staphylocoque doré.
Sans surprise, on retrouve dans le palmarès de grandes figures médiatiques, à commencer par la reine de la télé américaine Oprah Winfrey, qui, dans un ouvrage écrit avec le psychiatre Bruce D. Perry, aborde la question des traumatismes infantiles – les siens notamment. Dans un autre genre, Bill O’Reilly, le très conservateur et ex-présentateur phare de Fox News, limogé en 2017 après des accusations d’agressions sexuelles, se penche sur le phénomène du crime organisé aux États-Unis. Après Killing Jesus et Killing Lincoln, il s’agit du dixième opus de la série Killing, les précédents s’étant vendus chacun à plus de 1 million d’exemplaires. Enfin, l’acteur Matthew McConaughey a profité, lui, de la tournée promotionnelle de son autobiographie Greenlights pour faire courir la rumeur de sa candidature au poste de gouverneur du Texas. 

[post_title] => Le temps des questionnements [post_excerpt] => [post_status] => publish [comment_status] => open [ping_status] => open [post_password] => [post_name] => le-temps-des-questionnements [to_ping] => [pinged] => [post_modified] => 2021-08-26 10:21:12 [post_modified_gmt] => 2021-08-26 10:21:12 [post_content_filtered] => [post_parent] => 0 [guid] => https://www.books.fr/?p=108185 [menu_order] => 0 [post_type] => post [post_mime_type] => [comment_count] => 0 [filter] => raw )
WP_Post Object
(
    [ID] => 108193
    [post_author] => 56398
    [post_date] => 2021-08-26 10:21:12
    [post_date_gmt] => 2021-08-26 10:21:12
    [post_content] => 

Dans La Chienne (Calmann-­Lévy, 2020), la romancière colom­bienne Pilar Quintana mettait en scène une jeune femme tarau­dée par le désir d’enfant. Los abismos explore à nouveau la question de la maternité, mais sous un autre angle : celui d’une mère qui se découvre dépourvue d’instinct maternel. Récompensé par le prix Alfaguara 2021, le livre ­défraie la chronique en Colombie, notam­ment parce qu’il « aborde des sujets qui n’avaient auparavant pas droit de cité », pointe Iván Andrade dans la revue Razón Pública.
L’histoire est racontée à travers les yeux de Claudia, une enfant de 8 ans qui assiste au lent naufrage de sa mère. Dans la Cali des années 1980, où est située l’intrigue, la dépression fait ­figure de gros mot. Aussi Claudia observe-t-elle, sans comprendre, sa mère rester cloîtrée des après-midi entiers, stores baissés. La fillette s’inquiète de la voir prendre l’apéritif de plus en plus tôt, du silence de son père. « Les femmes de la génération de ma mère avaient l’obligation d’enfanter. C’était une injonction sociale, raconte l’auteure dans le quotidien El Espectador. Et nous, nous devions porter la culpabilité d’être les filles de ces femmes qui n’avaient parfois aucun goût pour la maternité. » Un récit « subtile et lumineux » sur la fin de l’enfance, applaudit l’édition colombienne d’El País

[post_title] => Mères malgré elles [post_excerpt] => [post_status] => publish [comment_status] => open [ping_status] => open [post_password] => [post_name] => meres-malgre-elles [to_ping] => [pinged] => [post_modified] => 2021-08-26 10:21:12 [post_modified_gmt] => 2021-08-26 10:21:12 [post_content_filtered] => [post_parent] => 0 [guid] => https://www.books.fr/?p=108193 [menu_order] => 0 [post_type] => post [post_mime_type] => [comment_count] => 0 [filter] => raw )
WP_Post Object
(
    [ID] => 108201
    [post_author] => 56398
    [post_date] => 2021-08-26 10:21:12
    [post_date_gmt] => 2021-08-26 10:21:12
    [post_content] => 

La peintre surréaliste Marie Čermínová, alias Toyen, est portée aux nues dans son pays : elle est avec František Kupka l’artiste tchèque la plus cotée sur le marché de l’art. Ses œuvres sont exposées dans le monde entier. Et sa biographie To je on !, de Milena Štráfeldová, trône en tête de gondole dans les librairies tchèques. Pourtant sa mort, en 1980 à Paris, était passée quasiment inaperçue. 
Il faut dire que Toyen l’introvertie ne courait pas après la célébrité. Elle refusait de se faire photographier et n’a laissé ni correspondance ni journal. Il a donc fallu plusieurs années à Štráfeldová pour démêler le vrai du faux. « Les livres et articles qui lui sont consacrés en Répu­blique tchèque contiennent des erreurs et reposent sur des spéculations », affirme-t-elle ainsi sur Radio Praha. 
Štráfeldová commence, note le site de Česká Televize, par « déconstruire le mythe sur les origines pauvres de Toyen » : ses parents étaient propriétaires d’un immeuble à Prague. Signe de sa rébellion contre la petite bourgeoisie, suggère l’auteure, la jeune femme quitte le foyer familial à 16 ans. Ouvrière, elle s’engage dans les milieux anarchistes, étudie un temps à l’École supérieure des arts décoratifs de Prague et, surtout, rencontre le peintre, poète et photographe Jindřich Štyrský. Compagnons de route, compagnons artistiques (mais pas amants ! assure Štráfeldová), ils seront inséparables jusqu’à la mort de Štyrský, en 1942.
Ensemble, ils rejoignent le mouvement d’avant-garde Devětsil. C’est là que Marie Čermínová devient Toyen. Un dérivé de ­« cito­yen », comme on a coutume de le lire ? Pour la biographe, rien n’est moins sûr. Il pourrait s’agir de la contraction de « To je on » (« C’est lui »), en référence à l’habitude de Toyen de parler d’elle au masculin. De ce fait, les spéculations sur son orientation sexuelle allaient bon train, d’autant que l’artiste se distinguait avec ses pantalons, ses cheveux courts et ses cigarettes.
En 1925, Toyen et Štyrský s’installent à Paris, où ils fondent l’arti­ficialisme, mouvement qui vise à provoquer « des émotions poétiques qui ne sont pas seulement optiques », expliquent-ils. Là, ils rencontrent Aragon, Éluard et Breton – le début d’une longue amitié.
De retour dans leur pays ­natal, Toyen et Štyrský créent le groupe surréaliste de Prague. Durant l’occupation nazie, Toyen cache chez elle le poète juif Jindřich Heisler. Puis, face au péril communiste, elle retourne à Paris. Elle y restera jusqu’à sa mort, isolée, endettée, réfugiée dans son monde à elle, un univers marqué par le rêve et la poésie que l’on retrouve dans ses ­tableaux. La biographe ne s’appesantit pas sur l’œuvre de Toyen. Pour se plonger dans son art, mieux vaut visiter la rétrospective inaugurée en avril à Prague, qui poursuivra bientôt sa route vers Hambourg et Paris.  

[post_title] => Vie réelle, vie rêvée [post_excerpt] => [post_status] => publish [comment_status] => open [ping_status] => open [post_password] => [post_name] => vie-reelle-vie-revee [to_ping] => [pinged] => [post_modified] => 2021-08-26 10:21:12 [post_modified_gmt] => 2021-08-26 10:21:12 [post_content_filtered] => [post_parent] => 0 [guid] => https://www.books.fr/?p=108201 [menu_order] => 0 [post_type] => post [post_mime_type] => [comment_count] => 0 [filter] => raw )
WP_Post Object
(
    [ID] => 108458
    [post_author] => 56398
    [post_date] => 2021-08-26 10:21:12
    [post_date_gmt] => 2021-08-26 10:21:12
    [post_content] => 

«Quelque chose d’in­quiétant se passe entre vos jambes », commence élégamment Nicholas Kristof, chroniqueur au New York Times. D’emblée, il résume : « Le nombre de spermatozoïdes par éjaculat dégringole, de plus en plus de bébés garçons présentent des anomalies génitales, les filles sont plus nombreuses à avoir une puberté précoce ; les femmes adultes connaissent une baisse de la qualité de leurs ovules et sont plus susceptibles de faire une fausse couche. » Il poursuit : « Il ne s’agit pas seulement des humains. Les scientifiques observent des anomalies génitales chez toute une série d’espèces, notamment des pénis anormalement petits chez les alligators, les loutres et les visons. »
Le prétexte est la parution d’un livre de l’épidémiologiste américaine Shanna H. Swan, Count Down. Nicholas Kristof avait déjà publié une chronique similaire à l’occasion de la publication en 2017, sous la direction de Shanna H. Swan, d’une méta-analyse des études épidémiologiques publiées sur le sujet depuis 1973. « Selon Shanna H. Swan, écrit Kristof, la numération des spermatozoïdes a baissé de 59 % dans les pays occidentaux ».
Et le coupable est identifié : « Swan et d’autres experts estiment que le problème vient d’une classe d’agents chimiques nommés perturbateurs endocriniens, qui miment les hormones du corps et trompent nos cellules. » Or ces perturbateurs endo­criniens « sont partout : dans les shampoings, les cosmétiques, les coussins, les pesticides, les boîtes de conserve, les reçus de distributeurs de billets. »
Le remède, en attendant que les agences de régulation prennent l’affaire au sérieux ? Swan nous invite à modifier nos pratiques quotidiennes : « Rangez la nourriture dans des récipients en verre et non en plastique, et, surtout, proscrivez tout plastique lors de la cuisson au micro-ondes. Évitez les pesticides. Achetez si possible des produits bio. Pour la douche, utilisez un rideau en coton ou en lin et non en vinyle. N’utilisez pas de sprays désodorisants. Empêchez la poussière de s’accumuler. »
Kristof cite plusieurs instances sanitaires appelant à se méfier des perturbateurs endocriniens, y compris l’Organisation mondiale de la santé. Il interroge une généticienne qui a montré expérimentalement la transmission de l’exposition de bébés souris à des perturbateurs endocriniens sur trois générations.
Dans une interview accordée au Guardian, Shanna H. Swan avertit : « Si l’on suit la courbe du déclin du sperme constatée dans la méta-analyse de 2017, on en déduit qu’en 2045 nous arriverons à une numération moyenne des spermatozoïdes égale à zéro. Cela signifie que la plupart des couples devront faire appel à la procréation assistée. »
Dans quelle mesure ces cris d’alarme sont-ils vraiment justifiés ? Difficile de se faire une opinion tant les points de vue s’opposent. Les avis contraires abondent. On peut s’en faire une idée en lisant l’analyse de l’épidémiologiste Gregory Bond sur le site Science 2.01. Pour lui comme pour d’autres, la position de Shanna H. Swan relève de l’alarmisme écologiste pur et dur : les données scientifiques qu’elle présente sont biaisées, elle oublie le vieil adage selon lequel « la dose ne fait pas le poison » et néglige la multiplicité des facteurs qui peuvent être mis en cause dans le déclin de la qualité du sperme. Un déclin d’ailleurs tout relatif aux yeux de Paul Turek, spécialiste de la reproduction. Il observe que la méta-analyse de 2017 ne décèle pas de déclin en Amérique latine, en Afrique ou en Asie. « Vous savez où aller si vous voulez assurer votre survie en tant qu’espèce », écrit-il. Il ajoute : « Selon une analyse tirée de l’article, la concentration par éjaculat est passée de 100 millions à 50 millions de spermatozoïdes par millilitre […]. Or cela reste tout à fait dans les normes de la fertilité (plus de 15 millions). » 

[post_title] => La décadence du sperme [post_excerpt] => [post_status] => publish [comment_status] => open [ping_status] => open [post_password] => [post_name] => la-decadence-du-sperme [to_ping] => [pinged] => [post_modified] => 2021-08-26 10:21:12 [post_modified_gmt] => 2021-08-26 10:21:12 [post_content_filtered] => [post_parent] => 0 [guid] => https://www.books.fr/?p=108458 [menu_order] => 0 [post_type] => post [post_mime_type] => [comment_count] => 0 [filter] => raw )
WP_Post Object
(
    [ID] => 108210
    [post_author] => 56398
    [post_date] => 2021-08-26 10:21:12
    [post_date_gmt] => 2021-08-26 10:21:12
    [post_content] => 

Le globe-trotter Gunnar Garfors est connu pour divers records insolites – être le premier homme à avoir mis les pieds deux fois dans chaque pays du monde, par exemple. « Il aura fallu une pandémie pour qu’il écrive sur son propre pays », note malicieusement le quotidien Aftenposten. Neuf mois durant, l’aventurier-photographe au long cours a donc parcouru la Norvège, des fjords et îles du littoral aux forêts profondes, de la toundra du Grand Nord aux montagnes culminant jusqu’à 2 469 mètres. En voiture, en bus, en avion, en bateau, à vélo, à pied. Et le plus possible « hors des sentiers battus », comme le proclame le titre du livre.
Promesse tenue ? Visiblement oui : « La plupart des destinations ne sont pas ou que peu connues », constate le quotidien Dagbladet. Illustré par 450 photos, l’ouvrage de Gunnar Garfors est structuré autour de 81 idées de périple dans un pays plus vaste que l’Allemagne ou le Japon. Chemin faisant, il a rencontré des pêcheurs, des alpinistes ou des restaurateurs dont il relate les « histoires passionnantes », note le magazine de voyage Reiselyst. « Garfors est terre à terre et sans prétention, contrairement à la mouvance des influenceurs qui parlent le plus souvent d’eux », conclut Dagbladet

[post_title] => Le lointain, près de chez soi [post_excerpt] => [post_status] => publish [comment_status] => open [ping_status] => open [post_password] => [post_name] => le-lointain-pres-de-chez-soi [to_ping] => [pinged] => [post_modified] => 2021-08-26 10:21:12 [post_modified_gmt] => 2021-08-26 10:21:12 [post_content_filtered] => [post_parent] => 0 [guid] => https://www.books.fr/?p=108210 [menu_order] => 0 [post_type] => post [post_mime_type] => [comment_count] => 0 [filter] => raw )
WP_Post Object
(
    [ID] => 108462
    [post_author] => 56398
    [post_date] => 2021-08-26 10:21:12
    [post_date_gmt] => 2021-08-26 10:21:12
    [post_content] => 

Le journaliste Karol Kopańko l’affirme : « La Pologne fut une grande puissance mondiale… et elle l’est toujours ! » Sauf que, désormais, elle ne s’impose plus sur les champs de bataille médiévaux mais sur le terrain des jeux vidéo. Counter-­Strike, StarCraft, Quake… Manette au poing, les Polonais ont remporté de nombreux titres et acces­sits mondiaux, et ils ont même réussi à accéder aux ligues d’élite coréennes ! Quant à la capitale de l’e-sport, qui organise chaque année les Intel ­Extreme Masters, rendez-vous majeur des équipes professionnelles, c’est Katowice, une ville de Silésie de quelque 300 000 habitants. Et de quelle nationalité est Piotr Kusielczuk, entré dans le Guinness pour avoir réussi à finir (en 3 435 heures, 12 minutes et 24 secondes) tous les jeux de la Nintendo ? Il est polono-mexicain.
Dans Polski e-sport, Kopańko raconte, telle une épopée, l’essor du sport électronique en Pologne et dresse le portrait de ses champions, montrant comment ce qui ressemblait au départ au délire pathétique d’une poignée de geeks figure désormais à la une des journaux. « Kopańko explique les débuts de cette folle histoire », écrit Polskie Radio, insistant sur le travail « d’archéologue » de l’auteur. Lequel a déterré, souvent dans les tréfonds de forums en sommeil depuis vingt ans, les premiers pas de ces pionniers « rejetés à l’école, mal à l’aise en famille et accusés de gâcher leur vie à jouer ». Des héros, souvent ados, que Kopańko n’hésite pas aujourd’hui à comparer à Messi ou à Ronaldo : « La carrière d’un pro gamer, c’est beaucoup de sacrifices, de stress et d’heures épuisantes d’entraînement. » Le Comité international olympique, qui envisage de rendre médaillables certains sports virtuels pour les Jeux 2028, semble d’accord avec lui. 

[post_title] => Katowice, capitale de l’e-sport [post_excerpt] => [post_status] => publish [comment_status] => open [ping_status] => open [post_password] => [post_name] => katowice-capitale-de-le-sport [to_ping] => [pinged] => [post_modified] => 2021-08-26 10:21:12 [post_modified_gmt] => 2021-08-26 10:21:12 [post_content_filtered] => [post_parent] => 0 [guid] => https://www.books.fr/?p=108462 [menu_order] => 0 [post_type] => post [post_mime_type] => [comment_count] => 0 [filter] => raw )
WP_Post Object
(
    [ID] => 108218
    [post_author] => 56398
    [post_date] => 2021-08-26 10:21:12
    [post_date_gmt] => 2021-08-26 10:21:12
    [post_content] => 

Le prix Ingeborg-Bachmann, décerné tous les ans à Klagenfurt, en Autriche, n’est pas seulement l’une des plus prestigieuses récompenses littéraires du monde germanophone, il obéit à des règles qui ont peu à voir avec celles des grands prix littéraires français : les auteurs présentent devant le jury, en vingt-cinq minutes, des textes inédits. L’an dernier, le prix est échu, un peu à la surprise générale, à Helga Schubert, une psychologue octo­génaire qui n’a pu participer à la compétition que parce que celle-ci, en raison de la pandémie, avait exceptionnellement lieu en ligne. Son livre, un recueil de 29 nouvelles autobiographiques, a été publié quelques mois plus tard, en mars 2021. « Un best-seller immédiat, écoulé très vite à 90 000 exemplaires », rapporte le critique littéraire du Spiegel Volker Weidermann.
Sans jouir d’une grande noto­riété, Helga Schubert n’est pas non plus une parfaite inconnue. Elle « a passé presque toute sa vie d’adulte en RDA, jusqu’à la chute du Mur. Le hasard avait voulu que sa mère se trouve dans la partie orientale de Berlin après leur fuite devant les Russes. C’est donc une coïncidence si elle est devenue citoyenne de la RDA, pays qu’elle a toujours voulu quitter. Son mari ne voulait pas. Elle l’aimait et l’aime toujours. Elle est restée avec lui », résume Weidermann. Sous la dictature communiste, Schubert se lie à quelques grands noms de la littérature est-allemande d’après-guerre, dont Christa Wolf, qui, dans un premier temps, l’encourage. Mais les deux femmes finissent par se brouiller. En cause, leur rapport très différent au régime, que l’une déteste et l’autre soutient. En 1983, quand Helga Schubert se voit décerner par la RFA le prix Hans-Fallada, elle est contrainte de le refuser sous la pression non seulement des autorités, mais de Wolf elle-même. Ironie de l’Histoire : trois ans plus tôt, elle avait été invitée une première fois à Klagenfurt pour le prix Ingeborg-Bachmann, mais elle n’avait pas obtenu l’autorisation de s’y rendre.
Vom Aufstehen retrace toute une vie qui aurait très bien pu ne pas être, puisque la mère de l’auteure, devant l’avancée de l’Armée rouge en 1945, envisage de tuer sa fille (sur les conseils du grand-père). Certaines nouvelles sont très courtes, d’autres embrassent son existence entière. Dans le Frankfurter Allgemeine Zeitung, Dirk von Petersdorff évoque leur effet thérapeutique et les compare aux Confessions de saint Augustin, où « la description des différentes étapes de la vie et la recherche d’une forme de transcendance sont liées ». Schubert, qui ne fait pas mystère de sa foi chrétienne, « écrit elle aussi des confessions : elle veut justifier ses actions et ses décisions, et se considère comme faisant partie d’un ensemble plus vaste. » 

[post_title] => Confessions d’une vieille dame [post_excerpt] => [post_status] => publish [comment_status] => open [ping_status] => open [post_password] => [post_name] => confessions-dune-vieille-dame [to_ping] => [pinged] => [post_modified] => 2021-08-26 10:21:12 [post_modified_gmt] => 2021-08-26 10:21:12 [post_content_filtered] => [post_parent] => 0 [guid] => https://www.books.fr/?p=108218 [menu_order] => 0 [post_type] => post [post_mime_type] => [comment_count] => 0 [filter] => raw )