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En 1862, un vigneron du nord d’Avignon plante quelques ceps qu’un ami lui a fait parvenir des États-Unis. Il l’ignore, mais il vient de provoquer la plus grave crise que la viticulture française ait jamais connue. « Au bout de deux ans, il découvre que les feuilles ont pris une drôle de couleur et que ses pieds de vigne dépérissent. La maladie se répand rapidement dans les vignobles », rapporte Arne Molfenter dans Der Spiegel. Cette maladie, c’est le phylloxéra, du nom du puceron qui en est à l’origine. Dans les décennies qui suivent, elle s’étend à la France et à l’Europe. Ses ravages sont gigantesques. En Champagne, au cours de l’année 1900, « 2,5 millions d’hectares de vigne doivent être détruits », poursuit Molfenter.
Pour lutter contre cette épidémie, on injecte dans le sol du disulfure de carbone – une neurotoxine. Le résultat n’est guère probant. On recourt aussi à des méthodes plus inattendues, comme faire défiler une fanfare au milieu du vignoble, en espérant chasser les insectes par la seule force de la musique militaire.
On le sait, le salut viendra d’où était apparu le fléau : d’Amérique et de ses pieds de vigne résistants au phylloxéra. Sans eux, à en croire la journaliste et œnologue britannique Rebecca Gibb, citée par Molfenter, « il n’y aurait plus d’industrie viticole en France aujourd’hui ».
Mais le phylloxéra eut des répercutions bien après la résolution technique du problème. En Champagne, notamment, la crise fragilisa les vignerons dont la situation était déjà précaire. Ajoutez à cela trois années consécutives (1907, 1908 et 1909) de pluie et de grêle qui réduisent les récoltes à 4 % de leurs rendements habituels, et la situation devient intenable. En 1911, la révolte éclate : les vignerons s’en prennent aux négociants et aux grandes maisons comme Bollinger, qui sont pillées, mises à sac, certaines incendiées. On brandit des pancartes « La Champagne ou la mort ! ». L’armée doit intervenir.
C’est qu’en Champagne, comme le rappelle Molfenter, la condition des vignerons est particulière : ils ne disposent en général que de très petites parcelles et « il n’est pas intéressant pour eux d’acquérir le matériel et les installations techniques permettant de fabriquer le vin eux-mêmes ». C’est pourquoi ils vendent leurs récoltes, après d’âpres négociations, à de grandes maisons comme Moët & Chandon, Louis Roederer ou Bollinger. Or celles-ci ont l’habitude d’importer aussi du vin produit dans d’autres régions, qui leur revient souvent moins cher et qu’elles transforment sans état d’âme en bel et bon « champagne ». Le chemin de fer permet d’en acheminer de la Loire ou du Languedoc, mais aussi d’Espagne ou d’Allemagne. « Selon certains journaux, on aurait même importé de la rhubarbe d’Angleterre pour en faire du vin », écrit Molfenter qui, pour retracer les troubles de 1911, s’appuie sur un ouvrage de Dominique Fradet, 1911 en Champagne. Chronique d’une révolution. Ces pratiques ulcèrent les vignerons. Entre leur misère et la fortune des négociants, ils voient, pas tout à fait à tort, un gouffre scandaleux.
Depuis près de deux siècles, le champagne est devenu la boisson de prédilection de la haute société : « Frédéric le Grand se faisait préparer son café avec une goutte de champagne et une pincée de poivre. Quant au futur roi d’Angleterre Édouard VII, il était surnommé ‘‘Dirty Bertie’’ parce que, selon les rumeurs, quand il se rendait au bordel parisien Le Chabanais, où il avait une chambre attitrée, il aimait faire remplir de champagne une baignoire de cuivre, dans laquelle il s’ébattait ensuite en joyeuse compagnie. » Face à la demande croissante mondiale de cette clientèle de luxe, on comprend que les grandes maisons aient été tentées de pallier les mauvaises récoltes par la fabrication d’un champagne à l’origine pas du tout contrôlée.
Reste que les révoltés de 1911 obtinrent gain de cause : le gouvernement céda. Depuis, ne peut prétendre à l’appellation « champagne » que du vin produit dans un périmètre bien délimité, dans le département de la Marne pour l’essentiel. L’hectare y atteint facilement le million d’euros, tandis que l’hectare voisin, pour peu qu’il soit en dehors des zones d’appellation protégée, se vendra 5 000 euros.
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On n’en finit pas de découvrir des textes inédits ou oubliés de Stefan Zweig. Cette fois-ci, ce sont des articles et des préfaces, pour moitié consacrés aux grands poètes français du xixe siècle, que les éditions Payot ont rassemblés dans un petit recueil.
Apprenti versificateur, le jeune Zweig, pour polir son style, s’était essayé à traduire ses modèles. Parmi eux, Baudelaire, qu’il prend soin, dans un texte de présentation, de bien distinguer de Verlaine, une autre de ses idoles : selon lui, le public allemand avait tendance à les rapprocher outre mesure. C’était ne pas voir que Baudelaire, avec son côté « cérébral » et sa « retenue élégante », n’avait « rien de commun avec ce romanichel génial et pervers qu’était Paul Verlaine ».
Quant à Victor Hugo, Zweig nous dit qu’il « parle dans ses poèmes comme un tribun depuis l’estrade […] et prend un certain plaisir à l’exagération, un peu comme les caricaturistes français ». Il reste néanmoins le grand étalon poétique de son temps. Étonnamment, c’est celui dont le génie et l’importance sont les plus controversés : à en croire le dramaturge et critique littéraire Jules Lemaître (cité par Zweig), Hugo aurait juste eu la « chance de vivre longtemps ».
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Pierre Boulez était un monument – un monument international. Sa mort en 2016, à Baden-Baden, provoqua un tsunami de nécrologies dithyrambiques dans toutes les langues. Comme chef d’orchestre, on le vénérait – son exigence (jusqu’à vingt-cinq répétitions pour un concert), son oreille infaillible, sa façon de déconstruire une œuvre pour la restituer sous une forme nouvelle, son intransigeance qui lui faisait stopper net l’orchestre à la plus petite erreur du moindre instrumentiste (« Vous, là-bas… »). Les musiciens de la planète entière tremblaient sous sa baguette (façon de parler : il dirigeait sans). Les auditeurs se pâmaient. « Il a complètement transformé la sonorité du piano », disait Olivier Messiaen, son maître.
Comme compositeur, en revanche, il inspirait moins l’enthousiasme que la crainte révérencieuse. « Pour ce qui est de sa musique, écrivait dans The New York Times John Adams, compositeur célèbre lui aussi, je n’ai jamais pu faire mieux que la respecter sans l’aimer. »
On admire toujours autant aujourd’hui sa créativité, sa rigueur, sa productivité quasi wagnérienne, sa quête inlassable de la perfection formelle, ses partitions constamment revues au fil des ans, jamais figées. Mais ses œuvres elles-mêmes sont jugées empreintes d’une « “froidure” [en français dans le texte] intellectuelle qui impressionne sans émouvoir », écrit encore John Adams. Certaines seraient carrément « injouables », estime le musicologue Roger Nichols dans The Guardian. Dans The New York Review of Books, Matthew Aucoin, jeune prodige à la fois compositeur, chef d’orchestre et écrivain (un néo-Boulez, en quelque sorte) encense pour sa part la musique de son prédécesseur : « brûlante » et « brutale », elle « siffle et pique comme un scorpion acculé » quand elle est à son meilleur (dans Le Marteau sans maître par exemple). On en tremblerait.
Les amateurs non francophones vont même pouvoir trembler encore plus fort puisque, depuis l’automne dernier, ils peuvent lire la traduction en anglais de seize leçons que Boulez a données au Collège de France entre 1976 et 1995. Et donc y découvrir sur le vif un Boulez polémiste, « dictatorial », qui « régnait par la terreur sur la scène musicale française », comme l’exprime l’un de ses anciens élèves, le pianiste et compositeur William Bolcom, dans The New York Review of Books. Il faut être « absolument moderne », tempêtait Boulez depuis sa tribune du Collège. Hors de la musique sérielle, pas de salut. Tout juste tolérait-il la sainte trinité de la seconde école de Vienne (Arnold Schönberg, Alban Berg et Anton Webern) et quelques « inclassables » comme Debussy ou – dans une moindre mesure –, Mahler et Bartók. Le reste, comme l’avait dit le maître à propos de Turangalîla, la symphonie de son propre maître Messiaen, ce n’était que de la « musique de bordel ».
Pourtant, si l’hyperactif et ultra-mobile Boulez avait accepté de grimper à la tribune du Collège de France, ce n’était pas seulement pour insulter les non-modernes mais plutôt pour tenter de réduire, comme il disait, l’écart entre « la critique musicale et la musique, qui n’ont pas évolué au même rythme ». Mieux encore, le compositeur n’avait pas hésité à se lancer dans de la « métaphysique musicale », concède John Adams, impressionné de voir Boulez s’interroger pendant 85 pages sur les rapports de la musique avec son époque ou sur les rôles respectifs de la mémoire collective et de la mémoire individuelle. Quand Boulez abandonnait le pupitre pour la tribune, c’était pour tenter de résoudre cette contradiction au cœur de son œuvre (de toutes les œuvres, peut-être) : comment réconcilier tradition et création ? Comment faire advenir le nouveau sans être contaminé par un passé impossible à évacuer vraiment ?
À lire les commentateurs anglo-saxons des Leçons, on perçoit pourtant une certaine gêne. Pas tellement à cause des vitupérations de l’orateur-écrivain Boulez, jugées plus folkloriques qu’inquiétantes, mais plutôt parce que son « désir de pulvériser le monde musical dans son ensemble, jusqu’à ses professeurs et idoles d’autrefois », laisse transparaître, déplore Matthew Aucoin, une « glaçante étroitesse d’esprit » devenue celle de « toute une génération ». Boulez occulte en effet dans ses Leçons pratiquement tous ses contemporains (même John Cage, avec qui il avait correspondu intensément), ou les dézingue implacablement, comme Karlheinz Stockhausen, dont la « musique intuitive » n’aboutit qu’à la production de « clichés ».
En quelque 600 pages, on ne trouve pas une seule référence à la musique populaire, le « principal phénomène culturel de notre temps », s’étrangle John Adams (peut-être Boulez gardait-il un mauvais souvenir de l’époque où il jouait des ondes Martenot dans la fosse des Folies Bergère ?). Pire encore : Boulez, qui était si bien vu aux États-Unis, où on lui a remis plus de 25 Grammy Awards et confié certains des plus grands pupitres du pays, passe complètement sous silence les compositeurs américains, Elliott Carter excepté.
Il fait également l’impasse sur la musique électronique. Ne compte pour lui que la musique dodécaphonique, sérielle et atonale du trio Schönberg-Berg-Webern. John Adams relève aussi que Boulez ne considère « que ce qui est inscrit sur la partition ». Le reste, « identité, contexte, société, politique – tout ce qui joue pourtant un rôle si essentiel dans la création – n’apparaît nulle part dans les Leçons de musique ». Incidemment, Boulez ne parle jamais de beauté, ni des femmes (« Son univers musical est 100 % masculin », s’indigne le bienséant Matthew Aucoin).
De façon générale, et malgré la collaboration de trois traducteurs à l’édition anglaise, la lecture de l’intégrale des leçons est jugée plutôt éprouvante. Jamais la moindre métaphore et un propos qui « reste toujours au niveau “méta” – on dirait du Sartre », gémit John Adams. Pour Matthew Aucoin, « Boulez s’exprime comme un patron de la Silicon Valley […]. Il est capable de fulgurances, mais peut aussi enchaîner les tautologies insipides et arides. »
Évidemment, comme le souligne sans ambages la revue Musicae Scientiae, « un livre de 631 pages constitué des idées et des opinions d’une seule personne est forcément un autoportrait ». Aucun doute sur la question ! Mais un autoportrait cloisonné, qui ne fournit pas la moindre information sur la vie privée de Boulez, monacale, semble-t-il, et farouchement protégée.
Ce qui transparaît, en revanche, c’est la relation difficile, voire impossible, du maître avec les autorités musicales françaises. Mais comment quelqu’un qui se considérait, selon Roger Nichols, « en exil physique et moral en France » aurait-il pu s’accommoder placidement du diktat des « moins que rien » qui peuplent les comités administratifs ? Même Malraux avait fait les frais du radicalisme et du modernisme implacable de Boulez. En témoigne la déflagration médiatique de sa tribune publiée dans Le Nouvel Observateur en 1966 (« Pourquoi je dis non à Malraux »), lorsque le ministre de la Culture avait nommé à la direction de la musique le très conservateur Marcel Landowski que Boulez exécrait. Heureusement, un autre moderniste impénitent, Georges Pompidou, viendrait au secours du rebelle et lui permettrait de devenir le « Lully du xxe siècle », régent dictatorial de la musique française (Ircam, Ensemble intercontemporain, Philharmonie de Paris…). Sacré retournement pour l’artiste, qui avait figuré, en 1960, parmi les signataires du Manifeste des 121 contre la guerre d’Algérie et s’était retrouvé ostracisé. Boulez était alors parti s’installer en Allemagne et avait commencé à diriger différents orchestres, en Europe et aux États-Unis, tout en vitupérant à distance les mélomanes passéistes et la bureaucratie culturelle française, allant jusqu’à suggérer, aux côtés de Jean Vilar et Maurice Béjart, de « faire sauter les maisons d’opéra » (comprendre : les réformer de façon radicale). Comment s’étonner qu’on ait surnommé le fulminateur de Baden-Baden le « Führer » ?
— J.-L. M.
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Dans Yoga, livre événement de la dernière rentrée littéraire (pour des raisons globalement peu littéraires), un épisode est passé plutôt inaperçu : un journaliste américain a interviewé Emmanuel Carrère pour The New York Times. L’écrivain dit espérer en tirer une plus grande reconnaissance dans le monde anglo-saxon. Peut-être espère-t-il aussi, par la même occasion (ça, il ne le dit pas), suggérer au lecteur que cette reconnaissance, il en jouit déjà un peu. Mais qu’en est-il, en réalité ?
De fait, la polémique autour de Yoga (l’écrivain a-t-il le droit d’utiliser la vie de ses proches dans ses livres ?) a attiré l’attention des plus grands journaux outre-Atlantique. Toutefois, c’est outre-Manche, dans The Times Literary Supplement, qu’on trouve l’éloge le plus frappant de Carrère : Sarah Richmond, universitaire et récente traductrice en anglais de L’Être et le Néant, de Sartre, reconnaît quelques faiblesses à l’ouvrage (la partie sur les migrants, à Léros, en Grèce).
Pour le reste, elle affirme ne pas s’être ennuyée un instant, même quand Carrère explore (littéralement) l’intérieur de ses narines. « Son écriture, d’une vitalité inépuisable, le place bien au-dessus de Karl Ove Knausgaard, auquel il est souvent comparé. »
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À l’échelle planétaire, la dépression touche aujourd’hui plus de 300 millions de personnes, ce qui en fait, selon l’Organisation mondiale de la santé, la première cause d’invalidité dans le monde. Pourtant, les causes de ce mal du siècle restent bien mal comprises.
Dans The Empire of Depression, l’historien de la médecine Jonathan Sadowsky n’entend pas trancher le vieux débat opposant les tenants de l’hypothèse biologique – pour qui la dépression découle d’un déséquilibre chimique du cerveau –, aux partisans de l’hypothèse psychologique, qui considèrent que la dépression plonge ses racines dans l’environnement socio-culturel. Sadowsky « se refuse à tout réductionnisme et à tout dogmatisme », apprécie China Mills dans Nature. L’historien souligne que ce mal semble avoir existé sur tous les continents et à toutes les époques, chaque culture ayant un terme pour le désigner – les Japonais du xvie siècle l’appelaient utsushō, tandis que les Grecs de l’Antiquité parlaient de mélancolie. Sadowsky questionne la frontière mouvante tracée par chaque société entre le pathologique et le normal.
Il note que, si la dépression est un mal aussi ancien qu’universel, ce qui est nouveau, c’est le boom qu’elle connaît partout dans le monde. « Connaître l’affliction est le lot de l’existence humaine, mais à quel moment la tristesse se mue-t-elle en maladie ? La médecine moderne a-t-elle transformé une attitude normale en pathologie, pour le plus grand bénéfice de l’industrie pharmaceutique ? » s’interroge David Luhrssen dans Shepherd Express.
L’historien examine trois explications possibles de ce phénomène : la dépression a véritablement augmenté ; il y en a autant qu’avant, mais elle est mieux diagnostiquée ; des états psychologiques qui n’étaient pas considérés comme pathologiques sont désormais vus comme tels. Là encore, Sadowsky se garde bien d’émettre un avis définitif. « En tant qu’historien des sciences, il sait ce que les zélotes du réductionnisme scientifique ignorent : beaucoup de grandes théories se sont révélées à la fois infondées et dangereuses. […] L’essor et le déclin des thèses sur l’origine de la dépression montrent à quel point la science est aussi soumise aux effets de mode que l’industrie du vêtement », conclut David Luhrssen.
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Voici un livre qui sait rassembler les ingrédients d’un best-seller. Le sujet : le Mossad, célébrissime service de renseignement israélien, au cœur de séries populaires comme The Spy et la toute récente Téhéran. Les héros : des héroïnes. Douze vraies espionnes, interviewées par un tandem médiatique : Nissim Mishal, journaliste vedette de la télé israélienne, et Michel Bar-Zohar, auteur de nombreux romans et enquêtes sur l’espionnage israélien. Dans leur précédent opus à grand tirage, Mossad. Les grandes opérations (Plon, 2012), ils évoquaient quelques espionnes, à l’instar de celles qui ont dérobé des secrets nucléaires iraniens et syriens. Cette fois, place uniquement aux femmes.
« Les espionnes ont souvent été présentées comme des pièges sexuels. Il était temps de mettre en lumière ces agentes, non moins efficaces que leurs homologues masculins », salue le quotidien israélien Haaretz. À chaque chapitre, une rencontre. Ainsi d’Isabel Pedro qui, dans les années 1960, a récupéré les plans du barrage d’Assouan en Égypte, ou d’Aliza Magen-Halevi qui, après une douzaine d’opérations pour le Mossad, en a été la directrice adjointe. Les entretiens, évidemment filtrés par la censure, contiennent des « détails inédits, y compris sur des opérations récentes », note Haaretz. Et le journaliste de regretter qu’« aucune mention des dilemmes et des craintes de ces femmes » n’apparaisse dans ce livre « plein de clichés ».
Il n’empêche. L’ouvrage, qui paraît ce printemps en anglais, est tendance. En Israël, où « la moitié du personnel du Mossad est féminin » selon The Jerusalem Post, « deux femmes dirigent depuis peu des services importants de l’agence ».
De même, aux États-Unis, où la CIA était supervisée par Gina Haspel jusqu'à la fin du mandat de Donald Trump. Quant au service de renseignement national, il est désormais chapeauté par Avril Haines, première femme à occuper ce poste.
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Dans sa vie préhistorique, Homo sapiens a connu trois « âges » culturels, classiquement nommés d’après les matériaux dont il a acquis la maîtrise pour fabriquer ses objets : d’abord la pierre, puis le bronze, enfin le fer. Mais on en oublie un, qui a pourtant joué un rôle essentiel dans le développement des activités humaines : le bois, explique Roland Ennos, professeur de biologie à l’Université de Hull, au Royaume-Uni. Son livre invite à « une complète réinterprétation de la préhistoire et de l’histoire de l’humanité », salue The Sunday Times.
L’expert fait le tour du bois, de ses usages à sa surexploitation. Il plonge le lecteur dans ces temps anciens où la maîtrise du feu permit non seulement d’éloigner les prédateurs et de cuire les aliments, mais aussi de fabriquer des outils en métal, plus efficaces pour chasser et récolter du bois… pour le feu. Il aborde l’Angleterre du xviie siècle et ses forêts décimées, soulignant que, pour bâtir les navires qui lui assureront le contrôle des océans, le royaume s’est tourné vers les forêts intouchées de ses colonies américaines.
Le bois est au cœur de tout, commente la revue scientifique Nature, « de la fonte du cuivre et du fer jusqu’à la fabrication des roues à aubes des moulins, des barils et des stradivarius ». Sans oublier le papier dont sont faits les livres, ajoute The Sunday Times : sans bois, « la vie de l’esprit serait inconcevable ». Touchons du bois.
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Les linguistes le savent bien : entre la langue écrite et la langue parlée il existe un gouffre, au point qu’on peut parfois se demander s’il s’agit bien du même idiome. L’ouvrage de l’Italien Lorenzo Tomasin le confirme.
Il s’intéresse à une langue très particulière, éminemment orale : celle des marchands de l’Europe romane des xive et xvie siècles. Sa conclusion : autant la littérature a eu tendance à cloisonner les différentes langues nationales, autant le langage des marchands se moque des règles et des frontières. La langue littéraire, résume l’écrivain Nicola Gardini dans le quotidien Il Sole 24 Ore, n’a rien de « spontané, même lorsqu’elle semble l’être. Elle sélectionne et réorganise des éléments choisis selon des critères esthétiques et tend à imposer des normes grammaticales ». À l’inverse, la langue des marchands est ouverte : « Le vocabulaire, les expressions idiomatiques, les fautes même passent d’une langue vernaculaire à une autre, créant un espace composite qui semble ignorer le concept d’identité linguistique, tant au niveau national que sur le plan individuel. » Tomasin en fait la démonstration à travers l’exemple de six personnes de nationalités diverses. L’avantage des marchands est, bien entendu, qu’ils savaient écrire et qu’ils ont laissé des Mémoires, des lettres et des contrats.
« À partir d’un échantillon de ces écrits, Tomasin dévoile le fonctionnement de la contamination verbale, explique Gardini. Il passe de la situation spécifique de chacun à l’examen d’idées plus générales : la marginalisation progressive du latin, l’exportation du français et de l’italien, le recours aux traductions, l’essor des dictionnaires. »
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On l’a oublié : il y a soixante ans, un Premier ministre turc, élu démocratiquement, fut exécuté sur l'ordre des militaires qui avaient pris le pouvoir.
L’avocat Adnan Menderes avait remporté la victoire lors des premières élections libres jamais organisées dans son pays, renversant le régime mis en place depuis la chute de l’Empire ottoman par Atatürk et ses successeurs. Il avait à la fois rouvert les mosquées et instauré une démocratie libérale, assurant l’essor de l’économie et faisant de la Turquie un membre de l’Otan. Mais lorsqu’il fut élu pour un second mandat, il céda aux sirènes de l’autoritarisme. Les journalistes remplirent les prisons et la communauté grecque fut victime d’un pogrom. Recep Tayyip Erdogan, qui a lui-même évité de justesse un coup d’État militaire en 2016, s’y réfère comme l’un de ses dignes prédécesseurs, rappelle The Economist.
Un musée à sa gloire a été ouvert à Yassiada, petite île de la mer de Marmara où il fut pendu. Elle a été rebaptisée « L’île de la démocratie et des libertés ».
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Après quelques ouvrages de non-fiction qui ont fait grand bruit en Suède, c’est au tour d’un roman de jeter un regard empathique sur les Sámis, cette minorité autochtone installée en majorité dans le nord du royaume et dans les pays voisins.
Un jour, Elsa, une fillette de 9 ans, voit un inconnu égorger un renne dans l’élevage de ses parents. Il menace de la tuer si elle parle. Elle n’ose donc rien dire, malgré d’autres incidents du genre. De toute façon, son père affirme que la police n’accorde que très peu d’attention aux violences diverses visant depuis des générations ceux qu’on appelait naguère les Lapons, terme désormais jugé péjoratif. Ann-Helén Laestadius, connue pour ses récits pour enfants, suit le personnage d’Elsa jusqu’à ses 20 ans.
Salué par la critique, Stöld évoque « la grande menace qui pèse sur les derniers Sámis éleveurs de rennes du fait des changements climatiques rapides et de l’expansion des industries minière et forestière », pointe le quotidien suédois Aftonbladet. Dans une prose « retenue et parfois poétique », ajoute Expressen, Laestadius « décrit la nature, les contradictions et la magie d’un territoire qui a longtemps été sous-représenté dans la littérature suédoise ».
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