WP_Post Object ( [ID] => 96085 [post_author] => 8 [post_date] => 2020-09-24 08:13:27 [post_date_gmt] => 2020-09-24 08:13:27 [post_content] =>Quel est le point commun entre l’esclavage et l’obésité ? Réponse : tous deux ont une même cause, le sucre. À en croire James Walvin, historien britannique spécialiste de l’esclavage, celui-ci fut l’aliment corrupteur par excellence au cours des derniers siècles, corrupteur de la morale (l’inhumanité de l’esclavage en est l’expression achevée) et corrupteur du corps lui-même. Dans un livre aussi excessif que son objet, il en retrace l’histoire riche et tumultueuse.
Longtemps, le sucre fut une denrée de luxe ; on lui prêtait des vertus médicinales. Obtenu à partir de la canne à sucre, qui est originaire d’Asie du Sud-Est, il arrive en Europe par l’intermédiaire des Arabes, lesquels se mettent à en produire directement au Proche-Orient. Mais l’élan décisif est donné par l’expansion européenne dans les îles de l’Atlantique et en Amérique. Saint-Domingue, la Guadeloupe, la Barbade, la Jamaïque se couvrent d’immenses plantations. La population autochtone, décimée, voire, souvent, anéantie par les violences et les maladies, ne suffit pas à combler le besoin en main-d’œuvre. On importe donc celle-ci d’Afrique. La traite négrière et le commerce triangulaire se mettent en place.
« Le sucre a servi de déclencheur à la première vague de mondialisation », souligne l’historien Sven Beckert dans The New York Times. Même le développement des États-Unis ne s’explique pas sans lui : les colonies britanniques d’Amérique du Nord ont au départ pour fonction, dans ce circuit mondialisé, de fournir des biens au complexe sucrier des Antilles (qui ne produit rien d’autre que du sucre et ce produit dérivé qu’est le rhum).
En Europe, la consommation augmente. L’abolition de l’esclavage au XIXe siècle ne la freine en rien. On recourt désormais à des travailleurs « libres » venus d’Inde ou de Chine qu’on exploite en Guyane, à Maurice ou dans les îles Fidji. On met au point le sucre de betterave et bientôt le sirop de maïs. « Pendant la révolution industrielle, le sucre fournit quasiment un cinquième de l’apport calorique des ouvriers britanniques », note Padraic Scanlan, historien de l’esclavage lui aussi, dans The Guardian. « Au milieu du XXe siècle, la consommation annuelle moyenne en Grande-Bretagne atteint 50 kilos par personne », ajoute Beckert. Soit presque 1 kilo par semaine. En conséquence de quoi la plupart des Britanniques et des Américains pourraient être obèses d’ici à 2050. Alors le sucre, cause de tous nos maux ? « On ne peut tenir rigueur à une denrée de la turpitude morale de ses producteurs ni du manque de discipline de ses consommateurs », estime le journaliste Banikinkar Pattanayak dans le quotidien indien Financial Express.
[post_title] => Douceur mortifère [post_excerpt] => [post_status] => publish [comment_status] => open [ping_status] => open [post_password] => [post_name] => douceur-mortifere [to_ping] => [pinged] => [post_modified] => 2020-09-24 08:13:29 [post_modified_gmt] => 2020-09-24 08:13:29 [post_content_filtered] => [post_parent] => 0 [guid] => https://www.books.fr/?p=96085 [menu_order] => 0 [post_type] => post [post_mime_type] => [comment_count] => 0 [filter] => raw )
WP_Post Object ( [ID] => 96077 [post_author] => 8 [post_date] => 2020-09-24 08:09:39 [post_date_gmt] => 2020-09-24 08:09:39 [post_content] =>Après Utopies réalistes (Seuil, 2017), best-seller dans lequel il plaidait pour le revenu universel, l’ouverture des frontières et la semaine de 15 heures, l’historien néerlandais Rutger Bregman enfonce le clou. Si ces « utopies » sont réalistes, c’est parce que la nature humaine est bien moins mauvaise qu’on le dit, assure-t-il dans son nouveau livre.
Bregman entreprend ici de démolir une certaine vision hobbesienne de la société. Nous considérer comme une espèce violente et cruelle, et adapter nos organisations, l’éducation, la justice, l’économie à cette conception, revient à créer une prophétie autoréalisatrice. Si nous attendons le pire de nos semblables, c’est ce que nous obtiendrons, estime-t-il.
Humanité. Une Histoire optimiste est un « livre poil à gratter et un correctif aux théories fumeuses de psychologues et de scientifiques trop zélés, juge Bryan Appleyard dans The Sunday Times. En quelques pages, Bregman démolit William Golding, Richard Dawkins et Steven Pinker. Le roman de Golding Sa Majesté des mouches avait tout faux, car des garçons échoués sur une île ne se comportent pas si mal. » Bregman donne l’exemple de ces six garçons originaires des îles Tonga qui se sont retrouvés seuls sur une île déserte dans les années 1960 : ils ont été retrouvés au bout d’un an, vivant dans l’abondance et l’harmonie.
L’historien néerlandais estime que la perception de la violence humaine a été faussée après guerre. Les intellectuels, tentant maladroitement de comprendre la Shoah, cherchaient à prouver que l’homme était intrinsèquement mauvais, quitte pour certains à introduire des biais dans leurs travaux. Et les théories en vogue des rationalistes, Dawkins et Pinker en tête, qui assurent que l’homme s’est lentement assagi grâce à la génétique ou à l’exercice de la raison, ne font qu’accréditer cette hypothèse. Bregman, lui, rassemble quantité d’éléments historiques pour montrer que l’humain, comme le souligne le titre original du livre, est deugen – qu’il a un bon fond. « Ce rousseauisme ne fonctionne pas vraiment, mais la vision brutale et méchante de Hobbes non plus. Pourquoi la méchanceté serait-elle une adaptation positive et la gentillesse ne pourrait-elle pas l’être ? » demande Appleyard. Et, de fait, pourquoi ne pas tirer parti de cette bonté innée pour repenser la société, comme le prône Bregman ? Utopique ? Comme l’historien néerlandais se plaît à le dire, relève Martin Bentham dans The Evening Standard, « ce qui paraît naïf un jour peut sembler relever du bon sens le lendemain ».
[post_title] => Un bon fond [post_excerpt] => [post_status] => publish [comment_status] => open [ping_status] => open [post_password] => [post_name] => un-bon-fond [to_ping] => [pinged] => [post_modified] => 2020-09-24 08:09:40 [post_modified_gmt] => 2020-09-24 08:09:40 [post_content_filtered] => [post_parent] => 0 [guid] => https://www.books.fr/?p=96077 [menu_order] => 0 [post_type] => post [post_mime_type] => [comment_count] => 0 [filter] => raw )
WP_Post Object ( [ID] => 96070 [post_author] => 8 [post_date] => 2020-09-24 08:03:59 [post_date_gmt] => 2020-09-24 08:03:59 [post_content] =>Le permafrost, c’est ce sol gelé en permanence dans les régions froides du globe. C’est aussi le titre du premier roman de la poétesse catalane Eva Baltasar, métaphore de la carapace forgée par sa narratrice, farouchement indépendante, pour se protéger du monde et des autres.
Jusqu’ici inédite en France, l’auteure a été plusieurs fois récompensée en Espagne pour son écriture intimiste. Permafrost est le premier volet d’un triptyque qui donne la parole à des femmes vivant avec violence les contradictions entre leur corps et leur époque. « Le langage poétique domine la narration, qui s’écoule comme un monologue à voix haute », observe Anna Abella dans El Periódico. Au fil du récit, on croise une mère dépressive et manipulatrice, un père perpétuellement relégué au second plan et une sœur dont la vie rangée apparaît comme une aberration. Le roman tord le cou aux mythes de l’épouse comblée, de la mère épanouie ou de la fille accomplie tout en abordant des thèmes aussi délicats que le suicide, le lesbianisme ou le non-désir d’enfant. « La douleur circule sous le permafrost sans que personne s’en aperçoive », souligne le romancier Carlos Zanón dans El País.
[post_title] => Sous la glace [post_excerpt] => [post_status] => publish [comment_status] => open [ping_status] => open [post_password] => [post_name] => sous-la-glace [to_ping] => [pinged] => [post_modified] => 2020-09-24 08:04:01 [post_modified_gmt] => 2020-09-24 08:04:01 [post_content_filtered] => [post_parent] => 0 [guid] => https://www.books.fr/?p=96070 [menu_order] => 0 [post_type] => post [post_mime_type] => [comment_count] => 0 [filter] => raw )
WP_Post Object ( [ID] => 96056 [post_author] => 8 [post_date] => 2020-09-24 07:56:39 [post_date_gmt] => 2020-09-24 07:56:39 [post_content] =>Dans le dernier roman du Suisse Alain Claude Sulzer, il est question d’un monde qui s’effondre. Ce monde, c’est celui de son héros Stettler, qui ne s’est jamais marié, n’a ni enfants ni amis et ne vit que pour son travail : depuis des décennies (il a 58 ans), il décore les vitrines des Quatre Saisons, un grand magasin de Berne. Or un jeune étalagiste est embauché pour l’épauler, dont les idées audacieuses ne tardent pas à faire fureur et à l’éclipser. Nous sommes en 1968, et parallèlement se déroulent des événements qui remettent en cause l’ordre ancien. « On dit souvent que la révolution dévore ses enfants, mais elle détruit surtout ceux qui préféreraient continuer de vivre sans elle. Stettler est livré sans défense aux temps nouveaux. Il n’a rien à leur opposer, et la modernité rageuse va le recracher comme un être inutile », commente Roman Bucheli dans le quotidien zurichois Neue Zürcher Zeitung. Le tour de force de Sulzer consiste à faire pénétrer son lecteur dans la conscience de son protagoniste. « Il l’immerge dans un contexte qui lui semble familier, poursuit Bucheli, mais dans lequel il fait soudain l’expérience d’une étrangeté troublante. »
[post_title] => Tout s’effondre [post_excerpt] => [post_status] => publish [comment_status] => open [ping_status] => open [post_password] => [post_name] => tout-seffondre [to_ping] => [pinged] => [post_modified] => 2020-09-24 07:56:40 [post_modified_gmt] => 2020-09-24 07:56:40 [post_content_filtered] => [post_parent] => 0 [guid] => https://www.books.fr/?p=96056 [menu_order] => 0 [post_type] => post [post_mime_type] => [comment_count] => 0 [filter] => raw )
WP_Post Object ( [ID] => 96054 [post_author] => 8 [post_date] => 2020-09-24 07:51:34 [post_date_gmt] => 2020-09-24 07:51:34 [post_content] =>Elle est l’une des figures majeures de la littérature britannique. Lord Acton, un critique de son époque, la jugeait même « supérieure à Dante ». Ce n’est ni Jane Austen, ni Virginia Woolf, mais une écrivaine que l’on connaît sous un nom de plume masculin : George Eliot. Derrière se cache l’énigmatique Marian Evans, qui voulait préserver son œuvre du scandale attaché à son nom.
Marian Evans voit le jour en 1819, dans le centre de l’Angleterre. Enfant précoce, elle manifeste très tôt un don pour les langues et se fait connaître par ses traductions d’ouvrages philosophiques allemands et ses articles dans des revues radicales. Estimée dans ce milieu masculin, elle y fait la rencontre du philosophe George Henry Lewes, un homme marié avec lequel elle vivra en union libre pendant vingt-cinq ans. C’est pour lui rendre hommage qu’elle prend le nom de George Eliot.
Alors que l’on commémore le bicentenaire de sa naissance et que son œuvre paraît pour la première fois dans la Pléiade, elle est au centre du premier roman de la critique littéraire Kathy O’Shaughnessy. Mi-biographie, mi-roman historique, Une passion pour George Eliot se compose de deux récits enchâssés : celui de deux universitaires préparant un colloque sur Eliot, et le roman, inspiré de sa vie, que rédige l’une d’elles. Ce procédé permet de plonger dans le quotidien d’Evans au moment où elle devient Eliot, tout en présentant les perspectives critiques divergentes sur l’écrivaine.
« La romancière s’aventure là où les biographes ne peuvent pénétrer », note le professeur de littérature anglaise John Mullan dans The Guardian, en rassurant ceux qui redouteraient que le récit prenne trop de libertés avec l’histoire : « O’Shaughnessy s’est à l’évidence imprégnée des principaux ouvrages critiques et biographiques. »
En s'appuyant sur le journal et la correspondance de Marian Evans, O’Shaughnessy dresse le portrait d’une femme exceptionnelle et de la passion qu’elle suscita, chez le fidèle George Lewes comme chez ses nombreux lecteurs. Parmi eux, on croise des hommes de lettres comme Charles Dickens ou Henry James mais aussi des figures du féminisme victorien qui tentèrent en vain de faire d’elle leur porte-parole.
En dépit de l’acuité du récit, la spécialiste d’Eliot Rohan Maitzen y voit un portrait trop peu élogieux : « Il est paradoxal qu’un livre intitulé Une passion pour George Eliot communique si peu de passion à propos de George Eliot », écrit-elle dans The Times Literary Supplement. Et de conclure : « Pour comprendre ce que c’est que vouer une passion à George Eliot, il est peut-être plus judicieux de relire son roman Middlemarch. »
[post_title] => La vie rêvée de George Eliot [post_excerpt] => [post_status] => publish [comment_status] => open [ping_status] => open [post_password] => [post_name] => la-vie-revee-de-george-eliot [to_ping] => [pinged] => [post_modified] => 2020-09-24 07:51:36 [post_modified_gmt] => 2020-09-24 07:51:36 [post_content_filtered] => [post_parent] => 0 [guid] => https://www.books.fr/?p=96054 [menu_order] => 0 [post_type] => post [post_mime_type] => [comment_count] => 0 [filter] => raw )
WP_Post Object ( [ID] => 96042 [post_author] => 8 [post_date] => 2020-09-24 07:41:58 [post_date_gmt] => 2020-09-24 07:41:58 [post_content] =>Disons-le d’emblée : Bouleversement n'est pas une réussite. Jared Diamond prétend y donner les recettes qui permettent à un pays de surmonter de graves crises. Pour ce faire, il établit un parallèle entre les individus et les États. Selon lui, ce qui vaut pour les uns vaudrait aussi pour les autres, à quelques ajustements près. La souplesse, par exemple, ou le fait de reconnaître qu’on traverse une crise ; « l’absence de contraintes personnelles », aussi, qui devient « l’absence de contraintes géopolitiques » ou encore « la force du moi », qui a pour équivalent « l’identité nationale ».
Ces facteurs sont au nombre de douze. Un nombre idoine, selon Jared Diamond : moins, cela ne ferait pas sérieux, plus, ce ne serait pas gérable. Dans tous les cas, l’idée centrale est que, confrontés à une crise, individus et nations doivent accepter le changement, mais un changement « sélectif » : « Le défi […] consiste à déterminer quelles parties de leur identité fonctionnent bien en l’état et ne nécessitent aucune modification, et lesquelles ne fonctionnent plus et doivent être modifiées. »
C’est l’une des forces des livres de Diamond : même ratés, ils restent agréables à lire. « C’est comme suivre les cours de fac d’un professeur aussi sympathique qu’érudit, reconnaît Michael Schaub sur le site de la radio publique américaine NPR. Car Diamond est versé dans toute sorte de disciplines, notamment la physiologie, la géographie et l’histoire. »
Après un premier chapitre où il raconte la crise personnelle qu’il a traversée pendant ses études à Cambridge et comment il l’a surmontée, Diamond se penche sur celles qu’ont connues des pays tels que la Finlande, le Japon, le Chili, l’Indonésie, l’Allemagne et l’Australie, puis sur quelques crises du présent (en particulier aux États-Unis).
L’ouvrage, d’une manière générale, donne une impression d’arbitraire. Le choix des pays est dicté par la connaissance qu’en a l’auteur et n’est pas représentatif de quoi que ce soit. Par ailleurs, « Diamond cite peu d’ouvrages. Il préfère citer ses nombreux amis », ironise Anand Giridharadas dans The New York Times. Ainsi du coup d’État de Pinochet en 1973 dont « beaucoup de [s] es amis chiliens considèrent qu’il était inévitable ».
Diamond prétend poser les premiers jalons d’une « étude comparative des crises nationales », mais les analyses qu’il propose ne sont pas à la hauteur de son ambition. Dans The Times Literary Supplement, l’historien Niall Ferguson (lui-même friand de vastes synthèses) estime que le postulat même de l’ouvrage ne tient pas : les États ne sont pas comparables à des individus. Leur âge, leur taille, leur puissance varient dans des proportions qui n’existent pas entre individus. Reste que certains des cas qu’il étudie sont peu connus et fascinants. Prenons la Finlande. Au début de la Seconde Guerre mondiale, elle se retrouve dans une situation quasi inextricable : le géant soviétique lui pose un ultimatum inacceptable, qui reviendrait à la faire renoncer à son indépendance. Elle refuse, l’URSS l’attaque. Sur le papier, elle n’a aucune chance : elle est cinquante fois moins peuplée, n’a ni chars, ni aviation, ni artillerie modernes, pas de canons antichars ou de défense antiaérienne non plus. Elle manque même de munitions. Et pourtant le miracle se produit : elle tient l’Armée rouge en échec grâce à une résistance acharnée, à sa meilleure connaissance du terrain et à une utilisation optimale de ses ressources. À l’issue de la guerre, elle ne pourra éviter la perte de la Carélie, mais elle a atteint son objectif : « non pas vaincre l’Union soviétique, mais rendre toute nouvelle invasion extrêmement coûteuse, lente et douloureuse. » En conséquence de quoi, elle sera « le seul des pays d’Europe continentale ayant pris part à la Seconde Guerre mondiale qui n’ait pas subi l’occupation ennemie ». Mieux : après avoir été saignée d’un dixième de sa population par l’ogre russe, elle instaure avec lui, dès le lendemain de la guerre, des relations pacifiques fondée sur la confiance mutuelle ! Un exemple de Realpolitik inouï. « La Finlande a appris […] qu’elle ne serait en sécurité que si l’URSS se sentait, elle aussi, en sécurité », écrit Diamond. La presse finlandaise accepte notamment de censurer tout propos qui pourrait froisser le puissant voisin. « D’autres démocraties auraient trouvé cela honteux. En Finlande, ces mesures témoignaient plutôt d’une certaine souplesse : sacrifier juste ce qu’il faut de principes démocratiques sacrés pour pouvoir préserver son indépendance, le bien le plus sacré de tous. »
[post_title] => Leçons de résilience [post_excerpt] => [post_status] => publish [comment_status] => open [ping_status] => open [post_password] => [post_name] => lecons-de-resilience [to_ping] => [pinged] => [post_modified] => 2020-09-24 07:42:00 [post_modified_gmt] => 2020-09-24 07:42:00 [post_content_filtered] => [post_parent] => 0 [guid] => https://www.books.fr/?p=96042 [menu_order] => 0 [post_type] => post [post_mime_type] => [comment_count] => 0 [filter] => raw )
WP_Post Object ( [ID] => 96035 [post_author] => 8 [post_date] => 2020-09-24 07:25:31 [post_date_gmt] => 2020-09-24 07:25:31 [post_content] =>Le répit fut de courte durée. Les quelque milliers de juifs qui vivaient encore en Pologne après 1945 ont vu leur monde s’écrouler à nouveau en 1968 : voyant en eux une « cinquième colonne », les jugeant déloyaux et de connivence avec Israël, le régime communiste lança cette année-là une campagne antisémite qui allait aboutir au départ de 13 000 à 15 000 d’entre eux.
L’armée, le Parti, les universités, les hôpitaux et l’intelligentsia furent particulièrement visés. Il s’agissait pour un régime fragilisé par la contestation étudiante de « purger l’appareil d’État, mais aussi de regagner du crédit auprès d’une partie de l’opinion sensible à la rhétorique polonaise », explique Adam Michnik, ancien opposant au régime et fondateur du quotidien Gazeta Wyborcza. Il aura fallu attendre cinquante ans pour que l’État polonais leur présente des excuses, en mars 2018.
C’est l’histoire de ces exilés que relate l’écrivaine polonaise Agata Tuszýnska dans Affaires personnelles, un récit choral dans lequel elle donne la parole à un groupe d’amis d’enfance, « liés par une fraternité inconsciente » comme le dit l’un d’eux, et qui jamais, même dispersés aux quatre coins du monde, ne se sont perdus de vue.
« Tuszýnska était la seule à pouvoir raconter cette histoire », estime le quotidien Metro Warszawa. Déjà « parce qu’elle a vécu pendant quinze ans avec un des exilés de ce groupe ». Ensuite parce que son histoire résonne avec la leur : « En 1968, écrit-elle, quand le ciel est tombé sur la tête de mes protagonistes, je ne savais pas que j’appartenais au même monde qu’eux. Si j’avais été un peu plus âgée, je serais probablement partie. »
En 1968 – elle a alors 11 ans –, Tuszýnska ignore en effet que sa mère est juive et qu’elle est une rescapée du ghetto de Varsovie. Elle ne l’apprendra qu’à 19 ans. Les parents des protagonistes gardaient eux aussi le secret sur leur passé, comme en témoignent Irka (« J’ai su quand j’avais 14 ans. On vivait entre nous, on ne savait pas de quelle origine on était ») et Barbara (« Maman s’inquiétait en silence. Je ne savais pas grand-chose de sa vie, je n’ai pas posé de questions. Elle avait un numéro tatoué sur l’avant-bras »).
Tuszýnska raconte la jeunesse privilégiée de ses personnages, enfants de juifs engagés dans la construction du communisme, qui portaient des jeans Levi’s, allaient au théâtre, ne se souciaient ni de religion ni de tradition et qui, soudain, ont été expulsés des trams et des facs, ont vu leurs portes taguées, leurs parents humiliés, leurs voisins leur demander quand ils allaient partir parce qu’ils voulaient récupérer leur appartement.
Sur la trentaine d’amis qui composaient le groupe, seuls trois sont restés. Tous les autres ont abandonné sur le quai de la gare de Gdańsk leur nationalité polonaise et l’espoir de revenir un jour, trouvant là aussi l’occasion d’un nouveau départ qui a mené la plupart d’entre eux vers des réussites personnelles et professionnelles exceptionnelles, en Suède, au Danemark, en Israël, aux États-Unis, en France ou en Australie.
« Affaires personnelles raconte le destin de gens ordinaires qui ont eu une grande histoire. Une histoire qui ne devrait jamais arriver, note Gazeta Wyborcza. Les autres livres publiés à l’occasion des cinquante ans de 1968 sont dominés par l’histoire du départ, la soudaine découverte de l’identité juive. Tout cela est présent aussi chez Tuszýnska, mais la description de la vie ordinaire à Varsovie dans les années 1960 y ajoute de l’authenticité. »
[post_title] => Persécutés, encore [post_excerpt] => [post_status] => publish [comment_status] => open [ping_status] => open [post_password] => [post_name] => persecutes-encore [to_ping] => [pinged] => [post_modified] => 2020-09-24 07:25:32 [post_modified_gmt] => 2020-09-24 07:25:32 [post_content_filtered] => [post_parent] => 0 [guid] => https://www.books.fr/?p=96035 [menu_order] => 0 [post_type] => post [post_mime_type] => [comment_count] => 0 [filter] => raw )
WP_Post Object ( [ID] => 95185 [post_author] => 8 [post_date] => 2020-09-24 07:00:00 [post_date_gmt] => 2020-09-24 07:00:00 [post_content] =>Chers lecteurs, le temps passe et les temps changent. Vous nous avez suivis avec une grande fidélité, pour certains depuis le lancement de Books, en décembre 2008. Bientôt douze ans ! Vous nous avez soutenus, parfois très concrètement, à l’occasion des deux campagnes de financement participatif que nous avons menées ou encore par des dons, via l’association Presse et Pluralisme. Hélas, pour parodier Romain Gary, le ticket de Books n’est plus valable. Non pas le concept, qui a fait ses preuves et dont on peut souhaiter qu’il perdure, mais le modèle économique.
Ce modèle, je l’ai mis en œuvre à une époque aujourd’hui révolue. Il s’agissait, dans la grande tradition des magazines papier, de tabler sur trois types de recettes : la vente au numéro, la publicité et les abonnements. Suivant l’évolution générale de la presse écrite, la vente au numéro a baissé et les recettes publicitaires se sont effondrées. Seuls les abonnements se sont maintenus. Et, en l’espace d’un an, nous avons subi une triple peine : les grèves de décembre-janvier, la pandémie de Covid-19 et la faillite de Presstalis, le principal distributeur de presse en France.
Nos actionnaires les plus fidèles, qui sont des amis et des mécènes que je ne saurais jamais remercier assez, ne peuvent plus suivre. Au moment même où ce numéro vous parviendra, Books sera placé en redressement judiciaire, en quête d’un repreneur. Si aucun ne se manifeste, l’entreprise sera liquidée. La marque sera peut-être reprise, mais ce qui en sortira ne sera plus le Books que vous avez connu.
La vraie question est aujourd’hui de savoir si le concept de Books conserve sa validité et justifie un nouveau départ fondé sur un modèle économique entièrement repensé. On pourrait juger que non. En commentant l’arrêt de la revue Le Débat, début septembre, son fondateur, Pierre Nora, décrivait ainsi l’ère dans laquelle nous sommes entrés : « L’archipélisation de la société, l’enfermement de chacun dans sa propre identité, la naissance de nouvelles radicalités sourdes à l’argumentation, à la discussion, à la raison. » Nous assistons à une « atomisation des curiosités » favorisée par la « généralisation du numérique », ajoutait-il. On ne saurait mieux dire. Nos lecteurs le savent, ces tendances de fond ont été régulièrement analysées par Books, depuis le premier numéro.
Pierre Nora observait également : « Nous ne servons pas une “cause”, une idéologie, une politique. » C’est aussi le choix de Books. Un choix audacieux par les temps qui courent : si l’on met de côté les titres spécialisés, seuls les organes partisans tirent leur épingle du jeu. On peut cependant affirmer que Books, comme Le Débat mais de manière différente, sert une cause : celle du bon usage de l’esprit critique. Marcel Gauchet, l’âme du Débat, avait d’ailleurs contribué à notre numéro 100, tout entier consacré à ce sujet. Mais Books n’est pas une revue d’idées au sens français du terme. C’est un magazine d’inspiration internationale, fondé sur le croisement des regards que permet l’analyse des livres parus dans le monde. Un magazine de l’actualité profonde, muni d’une grille de lecture transversale volontairement détachée des modes de lecture de la presse et des revues françaises. Un magazine présent sur Internet aussi, avec 25 000 abonnés à ses newsletters. Il n’y a pas de raison de penser que le concept de Books soit périmé. Puisse un repreneur innovant et déterminé, rompu aux techniques du numérique et des réseaux sociaux, relever ce défi : faire fructifier le concept de Books en l’adaptant aux tropismes de ce nouveau monde.
[post_title] => « Books » fluctuat nec… ? [post_excerpt] => [post_status] => publish [comment_status] => open [ping_status] => open [post_password] => [post_name] => books-fluctuat-nec [to_ping] => [pinged] => [post_modified] => 2020-09-18 09:16:22 [post_modified_gmt] => 2020-09-18 09:16:22 [post_content_filtered] => [post_parent] => 0 [guid] => https://www.books.fr/?p=95185 [menu_order] => 0 [post_type] => post [post_mime_type] => [comment_count] => 1 [filter] => raw )
WP_Post Object ( [ID] => 95630 [post_author] => 8 [post_date] => 2020-09-24 07:00:00 [post_date_gmt] => 2020-09-24 07:00:00 [post_content] =>Aux yeux d’un étranger de passage, le système d’enseignement supérieur américain était au XIXe siècle une vaste fumisterie. Ce n’était guère qu’un ensemble disparate d’établissements disséminés dans la campagne qui se donnaient le nom d’universités. Ce système sous-doté – qui dispensait un enseignement de piètre qualité, était implanté dans de petites localités le long de la Frontière et n’avait pas de véritable fonction sociale – semblait condamné à l’insignifiance. À partir de la seconde moitié du XXe siècle, il allait pourtant occuper une position dominante sur le marché mondial de l’enseignement supérieur et accumuler plus de richesses, produire plus de savoir, récolter plus de prix Nobel et attirer plus d’étudiants et d’enseignants qu’aucun autre. Les universités américaines occupent aujourd’hui le haut des classements internationaux.
Comment cette transformation spectaculaire a-t-elle pu avoir lieu ? Tout ce qui handicapait le système au XIXe siècle a fait sa force au XXe. La faible part des financements publics dans son budget essentiellement couvert par les droits d’inscription, son aura dans la population et sa passion du football américain lui ont assuré une autonomie qui lui a permis de dominer le monde universitaire.
Le système a vu le jour aux débuts de l’histoire des États-Unis, à une époque où l’État était faible, où le marché dictait sa loi et où les Églises étaient divisées. À défaut de bénéficier du soutien financier de l’Église et de l’État qui avait été propice au développement des universités dans l’Europe du Moyen Âge, les premières universités américaines durent compter sur la générosité des élites locales et sur les frais d’inscription déboursés par des étudiants consommateurs. Une charte octroyée par l’État où elles étaient implantées leur donnait le droit d’exister mais ne leur allouait aucun financement.
C’était davantage la quête de profit que le désir de développer l’enseignement supérieur qui motivait la création d’un college. Pendant la majeure partie de l’histoire des États-Unis, la terre a été la principale source de richesse. Mais, dans un pays où il y avait beaucoup plus de terres à vendre que d’acquéreurs, les spéculateurs devaient trouver le moyen de convaincre les gens d’acheter les leurs plutôt que celles des innombrables autres vendeurs. La situation devint encore plus désespérée vers le milieu du XIXe siècle, lorsque le gouvernement fédéral se mit à distribuer des terres aux colons. Pour parvenir à vendre, la solution était de présenter le terrain non pas comme une parcelle de plus dans un trou poussiéreux mais comme un emplacement de choix dans un foyer de vie intellectuelle naissant. Et rien n’y faisait autant qu’un college. Les spéculateurs faisaient ainsi don d’un terrain pour la construction d’un college, obtenaient une charte de l’État et vendaient ensuite les terres avoisinantes à bon prix, de même que les promoteurs aujourd’hui construisent un terrain de golf avant de vendre au prix fort les maisons qui donnent sur le parcours.
Afin d’assurer la viabilité de leur établissement, les spéculateurs cherchaient le plus souvent à l’adosser à une Église, ce qui présentait plusieurs avantages, le premier étant la segmentation du marché. Une clientèle presbytérienne serait plus attirée par un college presbytérien que par l’établissement méthodiste de la ville voisine. Autre avantage, la dotation en personnel. Jusqu’à la fin du XIXe siècle, presque tous les présidents et la plupart des enseignants des colleges étaient des membres du clergé, ce qui avait un double intérêt aux yeux des fondateurs : ils avaient une formation correcte et des exigences financières modestes. Troisième avantage : l’Église en question pouvait être incitée à mettre de temps en temps la main au portefeuille.
Souvent, les visées pécuniaires et religieuses se rejoignaient pour produire cette figure typiquement américaine qu’est le clergyman spéculateur. J. B. Grinnell en est un bon exemple. Ce pasteur congrégationaliste quitta l’église qu’il avait créée à Washington pour bâtir une ville dans l’Ouest à des fins spéculatives. Il fonda en 1854 dans l’Iowa une ville à laquelle il donna son nom, obtint un agrément de l’État pour y établir un college et se mit à vendre des terrains.
Un quart à peine des colleges étaient situés sur la côte Est, où vivait la majorité de la population. Plus de la moitié se trouvaient dans le Midwest ou le Sud-Ouest, la zone peu peuplée de la Frontière. Si l’idée était de recruter un grand nombre d’étudiants, ce n’était pas l’idéal, mais cela incitait les colons à s’établir. Cette situation sur la Frontière explique également l’intérêt des Églises : dans un contexte religieux très concurrentiel, où aucune Église n’était vraiment en position dominante, chacune cherchait à planter son drapeau la première dans les nouveaux territoires. La spéculation foncière et la concurrence religieuse expliquent que, en 1880, l’Ohio comptait 37 universités quand la France n’en possédait que 16.
En 1790, alors que la République américaine venait d’être fondée, les États-Unis comptaient déjà 19 établissements appelés colleges ou universités. Leur nombre a augmenté progressivement pour atteindre 50 en 1830, après quoi le rythme des créations s’est accéléré. On en dénombrait 250 dans les années 1850 puis le double une décennie plus tard ; en 1880, ils étaient 811. La croissance des colleges dépassait largement celle de la population : on était passé de 5 établissements pour 1 million d’habitants en 1790 à 16 en 1880. Cette année-là, les États-Unis affichaient cinq fois plus d’universités que l’ensemble du continent européen. Ils possédaient le système d’enseignement supérieur le plus surdimensionné du monde.
Bien sûr, comme se plaisaient à le dire les visiteurs européens, il était abusif de qualifier la plupart de ces colleges d’établissements d’enseignement supérieur. D’abord, ils étaient de petite taille. En 1880, un college comptait en moyenne 131 étudiants et 10 enseignants et ne délivrait que 17 diplômes par an. La plupart étaient situés bien à l’écart des lieux de culture et de raffinement. Les professeurs étaient des hommes d’Église plutôt que des hommes de savoir, et ils enseignaient à tous ceux qui étaient disposés à payer des droits d’inscription pour obtenir un diplôme de valeur douteuse. D’ailleurs, la plupart des diplômés entraient dans le clergé ou embrassaient d’autres professions qui ne demandaient pas de titre universitaire.
Sur la côte Est, une poignée d’universités – Harvard, Yale, Princeton, William & Mary – drainaient des étudiants issus de familles riches et puissantes et servaient à former de futurs dirigeants. Mais, plus à l’Ouest, il n’y avait guère d’élites établies avec lesquelles nouer des liens. Comme chaque localité ou presque possédait son université, la concurrence pour attirer les étudiants était féroce, si bien que les frais de scolarité restaient modérés. De ce fait, ces établissements disposaient de moyens très limités : ils devaient se contenter de locaux exigus et de faibles rémunérations et se démener pour attirer et retenir étudiants et professeurs et obtenir des financements. Résultat, les étudiants venaient plutôt de milieux modestes et étaient là plus pour le plaisir que pour les études ; les plus sérieux étaient les boursiers.
Autre preuve du peu de prestige de ces universités du XXe siècle : rien ou presque ne les différenciait de la multitude des lycées et autres établissements d’enseignement secondaire qui pullulaient dans le paysage américain. Les élèves pouvaient souvent choisir de fréquenter soit le lycée, soit le college, le premier n’étant pas considéré comme le passage obligé vers le second.
Vers le milieu du siècle, quantité de nouvelles formes de colleges publics virent le jour, aux côtés des établissements indépendants que nous appelons aujourd’hui « privés ». Chaque État américain voulut en effet se doter de son college ou de son université, pour des raisons analogues à celles des Églises et des villes : la concurrence (si l’État voisin possédait un college, on devait aussi en avoir un) et la spéculation foncière (les promoteurs locaux faisaient pression sur les autorités pour obtenir cet avantage). On vit en outre se fonder des établissements sur des terrains cédés par l’État fédéral, qui étaient à vocation agricole et technique. Enfin, il y avait les écoles normales, destinées à la formation des enseignants à un moment où le système public d’éducation était en plein essor. Contrairement aux établissements privés, ces nouvelles universités étaient placées sous tutelle publique, sans pour autant recevoir de dotations régulières. Elles ne commencèrent véritablement à recevoir des crédits annuels qu’au début du XXe siècle, si bien qu’elles se finançaient grâce aux frais de scolarité et aux dons, comme les établissements privés, et se disputaient les étudiants et les enseignants avec ces derniers.
En 1880, le système américain d’enseignement supérieur était extraordinairement vaste et dispersé géographiquement, complètement décentralisé et formidablement complexe. Peut-on du reste qualifier de « système » un ensemble hétéroclite de quelque 800 colleges et universités ? Un « système » suppose un plan d’ensemble et un mode de gouvernance faisant en sorte que les choses fonctionnent conformément à ce plan, comme c’est le cas dans les systèmes d’enseignement supérieur de la plupart des autres pays, avec un ministère qui supervise et fait évoluer le système. Mais pas aux États-Unis 1.
Le système d’enseignement supérieur américain ne procède d’aucun plan, et aucune instance ne le régit. C’est néanmoins un système doté d’une structure bien définie et d’un ensemble de règles claires guidant l’action des individus et des institutions qui le composent. En fait, il s’apparente davantage à un système économique fondé sur les lois du marché et issu d’une accumulation de choix individuels qu’à un système politique encadré par une Constitution – il tient plus de l’étalement urbain que de l’urbanisation planifiée. Son histoire n’est pas une construction organisée mais un processus évolutif.
Il y a certes eu des tentatives pour y mettre de l’ordre. Tous les présidents des États-Unis jusqu’à Andrew Jackson (1829-1837) invoquèrent la nécessité de créer une université nationale, qui aurait établi une norme de qualité applicable à l’ensemble. Mais l’entreprise échoua en raison de la réticence des Américains à laisser s’installer un gouvernement central fort.
D’autres cherchèrent à imposer leur vision de ce que devait être la finalité du système. En 1828, les enseignants de Yale publièrent un rapport défendant avec vigueur le programme d’études classiques traditionnel (axé sur le latin, le grec et la religion) ; dans les années 1850, Francis Wayland plaida à Brown pour que l’accent soit mis sur la science, et la loi Morrill de 1862 instaura des établissements ayant vocation à « enseigner dans tous les domaines du savoir en lien avec l’agriculture et les arts mécaniques […] afin de fournir aux classes industrielles une éducation culturelle et pratique applicable aux différents domaines et professions ». Mais ces points de vue ont surtout servi à diversifier considérablement les missions que s’assignaient les différents colleges au sein d’un système qui n’en privilégiait aucune.
Les faiblesses du système étaient patentes. Prenez le Middlebury College : cette université congrégationaliste fondée en 1800 est aujourd’hui l’une des universités de lettres et de sciences humaines les plus cotées du pays. Mais, en 1840, lorsque son nouveau président (un pasteur presbytérien nommé Benjamin Labaree, le grand-père de mon grand-père) débarqua sur le campus, il trouva un établissement au bord du gouffre – et cela n’allait guère s’améliorer pendant les vingt-cinq ans qu’il passerait à sa tête. Ses lettres au conseil d’administration détaillent tous les problèmes qui accablaient ce dirigeant de petit college. Découvrant que les administrateurs n’avaient pas de quoi lui verser le salaire annuel de 1 200 dollars (l’équivalent de 32 000 dollars d’aujourd’hui) qu’on lui avait promis lors de son recrutement, il entreprit immédiatement de lever des fonds – il allait devoir lancer sept autres campagnes de financement par la suite –, paya 1 000 dollars de sa poche et demanda aux membres du corps enseignant de mettre la main au portefeuille.
Les soucis pécuniaires sont le sujet qui revient le plus souvent dans la correspondance de mon aïeul Labaree (il avait du mal à recruter et à payer les enseignants ; il dut hypothéquer sa maison parce qu’il ne touchait pas son salaire ; il était perpétuellement en quête de dons). Mais il se plaignait également d’avoir du mal à proposer un programme d’études complet avec un nombre insuffisant de professeurs, sous-qualifiés de surcroît : « Messieurs, j’ai accepté de prendre la présidence du Middlebury College en sachant pertinemment que vous disposiez d’une équipe réduite et que, en conséquence, une grande part de la charge d’enseignement reviendrait au président. Je savais aussi que l’on attendait de moi que je défende les intérêts financiers de l’établissement autant que me le permettrait ma mission d’enseignement. Mais je n’aurais pas pu imaginer que j’aurais à tirer l’université de l’embarras pécuniaire et à trouver des fonds pour l’achat de livres, l’entretien des bâtiments, etc. Si j’avais su ce que vous exigeriez de moi, je ne me serais jamais engagé à votre service. »
Dans un passage de sa correspondance, mon aïeul Labaree énumère les cours qu’il doit dispenser en tant que président : « Philosophie intellectuelle et morale, économie politique, droit international, fondements de la foi chrétienne, histoire de la civilisation, étude de L'Analogie de la religion 2. » Les professeurs des colleges américains devaient être des touche-à-tout.
En définitive, le système universitaire américain ne tenait pas ses promesses. Mais ces promesses étaient formidables. Une des forces cachées du système était qu’il possédait presque tous les éléments dont il aurait besoin pour faire face à une expansion accélérée du nombre d’étudiants. Il disposait déjà de toute l’infrastructure : terrains, salles de cours, bibliothèques, bureaux, bâtiments administratifs, etc. Et cette infrastructure n’était pas concentrée dans quelques grandes villes mais disséminée sur tout le territoire d’un pays grand comme un continent. Étaient déjà en place le corps professoral et l’administration, avec des programmes d’études, des cours et une charte accordant au college le droit de délivrer des diplômes, ainsi que les structures de gouvernance et les processus destinés à capter les sources de revenus nécessaires. Les colleges jouissaient du soutien de la population locale et de l’Église concernée.
Une autre force du système était que cet ensemble disparate de colleges et d’universités plutôt quelconques était parvenu à perdurer dans un environnement extrêmement concurrentiel. En tant qu’institutions soumises aux lois du marché et n’ayant jamais eu le luxe de bénéficier de dotations garanties, les colleges (aussi bien publics que privés) avaient survécu en allant à la pêche aux dollars auprès des donateurs potentiels et en se vendant auprès des étudiants en mesure de payer des frais de scolarité. Ils devaient être capables de répondre à la demande des divers types de publics sur leurs marchés respectifs et surtout de satisfaire les attentes des futurs étudiants, car c’étaient eux qui payaient l’essentiel de la facture. Ils avaient aussi tout intérêt à bâtir des liens durables avec leurs diplômés, appelés à devenir des réservoirs de nouveaux étudiants et de dons.
En outre, de par leur structure même – administrateurs bénévoles, président puissant, autonomie financière et isolement géographique –, les colleges étaient des institutions éminemment adaptables. Ils pouvaient évoluer sans avoir à en référer à un ministre de l’Éducation ou à un évêque. Leurs présidents en étaient les patrons, avec pour mission d’assurer la viabilité de l’établissement et d’améliorer son assise. Ils devaient tirer le meilleur parti des avantages que leur procuraient leur situation géographique et leur proximité avec une Église et savoir se positionner rapidement face à la concurrence sur des questions telles que les programmes, le montant des droits d’inscription ou l’image de marque – sinon c’était la faillite. Entre 1800 et 1850, 40 colleges voués aux humanités, soit 17 % du total, durent mettre la clé sous la porte.
Les établissements qui fonctionnaient le mieux étaient très enracinés dans des villes reculées du pays et portaient généralement le nom de la ville qui les abritait. Ils considéraient que leur mission était de former les futures élites et d’être le foyer intellectuel local. Ceux qui passèrent le cap du milieu du XIXe siècle étaient bien placés pour tirer parti de l’imminent essor de l’enseignement supérieur.
Mais ils conservaient une aura populaire. Éparpillés sur le territoire, contraints de rivaliser avec leurs homologues, ils se préoccupaient davantage de leur survie que de la qualité de l’enseignement. Le système universitaire américain s’adressait de ce fait davantage à la classe moyenne qu’aux milieux plus aisés. Les familles pauvres ne pouvaient pas y envoyer leurs enfants, mais celles de la classe moyenne, si. La sélection à l’entrée n’était pas trop sévère, les études pas trop exigeantes, les frais de scolarité raisonnables. Le college y a gagné une large base populaire qui l’a sauvé d’un élitisme de type Oxford et Cambridge. Il était un prolongement de la vie locale, une présence familière, une source de fierté citoyenne et la vitrine culturelle de la localité. Les habitants n’avaient pas besoin qu’un membre de leur famille y travaille ou y fasse ses études pour sentir qu’il leur appartenait. Et cette base populaire s’est avérée capitale lorsque le coût des études universitaires a explosé.
Enfin, le modèle avait aussi pour caractéristique d’être axé sur la pratique. La création d’universités d’agriculture et d’ingénierie sur des terrains concédés par l’État fédéral est à la fois une cause et une conséquence de cette prédilection pour les études utiles. La priorité donnée aux « arts utiles » était inscrite dans l’ADN de ces établissements, comme une expression de la volonté américaine de se doter non pas d’un enseignement supérieur pour gentlemen ou intellectuels mais d’écoles offrant des formations professionnalisantes. Le but était d’apprendre à fabriquer des produits et à gagner sa vie, et non d’acquérir un vernis social ou d’explorer les sommets de la culture. Et ce modèle s’est généralisé à l’ensemble de l’enseignement supérieur. On ne s’est pas contenté d’inclure au programme des disciplines comme l’ingénierie ou les sciences appliquées, on a aussi axé l’enseignement sur la résolution des problèmes des hommes d’affaires et des décideurs. Le message était le suivant : « Ce college est le vôtre, il œuvre pour vous. »
Tout cela a commencé à changer dans les années 1880, au moment où l’université de recherche à l’allemande a fait irruption sur la scène éducative américaine. Dans ce nouveau modèle, l’université était un lieu qui produisait de la recherche scientifique de pointe et proposait un enseignement de troisième cycle à l’élite intellectuelle. En s’en inspirant, le système américain a gagné la crédibilité scientifique qui lui faisait tant défaut. Enfin, il pouvait prétendre être le lieu d’un enseignement de très haut niveau. Dans le même temps, les colleges ont vu déferler les inscriptions, ce qui a permis de remédier à un autre problème de l’ancien modèle, à savoir la pénurie chronique d’étudiants.
Les États-Unis n’ont pas adopté le modèle allemand en bloc mais l’ont adapté à leurs besoins. L’université de recherche est venue s’ajouter aux autres types d’établissements sans les remplacer. L’université allemande était une institution élitiste, axée sur l’enseignement de troisième cycle et la recherche de haut niveau, ce qui n’était possible qu’avec un soutien de l’État. Un tel financement n’étant pas envisageable aux États-Unis, l’enseignement de troisième cycle et la recherche universitaire devaient se cantonner à un niveau modeste en se greffant sur la souche robuste du premier cycle. Ils se finançaient grâce aux droits d’inscription déboursés par la masse des étudiants de premier cycle et, pour les établissements publics, à une dotation budgétaire calculée en fonction du nombre d’étudiants. Ils profitaient aussi du soutien politique et de la légitimité sociale résultant de la dimension populaire et de l’orientation pratique du college. L’enseignement supérieur de haut niveau était ainsi tributaire d’un premier cycle accessible à tous et pas trop exigeant intellectuellement. Bref, il lui fallait des étudiants. Au XXe siècle, ceux-ci sont arrivés, et le système américain d’enseignement supérieur s’est alors trouvé en position de tirer parti de ses acquis.
Pour survivre, les colleges avaient compris qu’ils devaient contenter les étudiants, en leur offrant de multiples occasions de socialiser – fraternités et sororités étudiantes, et bien sûr football américain – tout en n’exigeant pas trop d’eux sur le plan des études. L’idée était d’impliquer les jeunes gens au point qu’ils s’identifient à l’établissement – et que, plus tard, ils en portent encore les couleurs, assistent aux réunions d’anciens, y inscrivent leurs enfants et lui fassent des dons généreux.
Ce côté populaire se manifeste encore aujourd’hui dans le vocabulaire. Les Américains emploient indifféremment les termes college et university. Ailleurs dans le monde anglophone, university désigne les niveaux les plus élevés de l’enseignement supérieur, et délivre des diplômes de troisième cycle, tandis que college renvoie plutôt à des établissements universitaires à cycle court. Lorsque les Britanniques ou les Canadiens disent : « Je vais à l’université », cela a une connotation élitiste. Pour les Américains, le terme a un petit côté guindé et prétentieux. En général, ils préfèrent dire : « Je vais au college », qu’il s’agisse de Harvard ou de l’école professionnelle du coin. C’est assez trompeur, car l’enseignement supérieur américain est extraordinairement hiérarchisé, la valeur du diplôme variant du tout au tout en fonction du prestige de l’établissement. Mais cela reflète aussi la popularité de l’institution, l’affirmation que tout le monde ou presque peut aller à la fac.
Pour en revenir au XXe siècle, un autre avantage du système américain était que colleges et universités avaient en général une grande autonomie. C’était particulièrement vrai des établissements privés à but non lucratif qui sont, aujourd’hui encore, majoritaires dans le système d’enseignement supérieur. Un conseil d’administration bénévole est propriétaire de l’établissement et en nomme le président, qui fait office de directeur général, établit le budget et gère le corps enseignant et le personnel administratif. Les universités privées perçoivent à présent des fonds publics conséquents, destinés à financer des programmes de recherche ou à octroyer des prêts et des bourses aux étudiants, mais elles ont toute latitude en ce qui concerne le montant des frais de scolarité, des salaires, les programmes et l’organisation. Cela leur permet de s’adapter rapidement aux évolutions du marché, de saisir des possibilités de financement, d’élaborer de nouveaux programmes et d’ouvrir des centres de recherche.
Les universités publiques, elles, sont placées sous la tutelle de l’État dans lequel elles sont implantées. Ce dernier leur alloue une dotation de fonctionnement et donne les orientations générales, ce qui limite leur marge de manœuvre en matière de budget, de frais de scolarité et de salaires. Mais cette dotation ne couvre qu’une part des dépenses, qui est inversement proportionnelle au prestige de l’établissement. Aux États-Unis, les grandes universités publiques et centres de recherche reçoivent souvent de l’État moins de 20 % de leur budget ; pour l’Université de Virginie, cette subvention n’atteint même pas 5 %.
Les établissements publics doivent donc recourir aux mêmes méthodes que les privés pour boucler leur budget : droits d’inscription, contrats de recherche, facturation de prestations et dons. Ce sont les universités publiques de recherche qui possèdent la plus grande autonomie. Et celle des deux les plus cotées – l’Université de Californie et l’Université du Michigan – est même inscrite dans la Constitution de l’État.
L’autonomie s’est avérée cruciale pour la bonne santé financière et le dynamisme du système d’enseignement supérieur américain. Les universités donnent le meilleur d’elles-mêmes quand elles favorisent un bouillonnement d’initiatives venues de la base – quand les enseignants sont à l’affût de pistes de recherche, que les départements élaborent des programmes, que les administrateurs créent des instituts et des centres pour tirer parti des possibilités qui se présentent. Ailleurs dans le monde, la planification centralisée d’un ministère de l’Enseignement supérieur cherche à orienter les universités vers les objectifs fixés par l’État, et ces décisions venues d’en haut étouffent l’esprit d’entreprise des professeurs et des administrateurs alors qu’ils connaissent mieux leur domaine et sont plus en phase avec les attentes du marché.
L’effet de l’autonomie sur la performance des universités est quantifiable. L’économiste Philippe Aghion, de Harvard, a publié avec des collègues une étude montrant une corrélation entre le rang des universités dans le classement international dit de Shanghai et leur part de financement public. Les chercheurs ont constaté que, pour chaque point de pourcentage de financement public supplémentaire, les universités reculent de trois places. À l’inverse, lorsque la part du budget provenant de financements privés augmente de 1 point, elles gagnent six places.
Au XIXe siècle, c’est l’absence de soutien financier de la part des Églises et des pouvoirs publics qui a contraint les universités américaines à évoluer vers un système d’enseignement supérieur économe, adaptable, autonome, à l’écoute des besoins du public, en partie autosuffisant et décentralisé à l’extrême. Ces humbles débuts ont ainsi permis au système de devenir le meilleur du monde et à des colleges médiocres de se hisser au sommet. Au XXIe siècle, 52 universités américaines se classent dans le top 100 mondial, et 16 figurent parmi les 20 premières. La moitié des lauréats d’un prix Nobel du XXIe siècle sont issus d’une université américaine. Et ce réseau qui vivotait nage à présent dans l’opulence. L’université américaine la plus riche est Harvard, avec 35 milliards de dollars ; en Europe, c’est Cambridge, avec 8 milliards, et, en Europe continentale, l’Université d’Europe centrale (CEU), fondée en 1991 à Budapest : grâce à un don de George Soros, elle fonctionne avec une dotation de 900 millions de dollars, ce qui la placerait aux États-Unis au 103e rang, derrière l’université Brandeis.
Un vrai conte de fées. Le système américain d’enseignement supérieur n’est plus une fumisterie ; le monde entier nous l’envie. Malheureusement, comme il s’agit d’un dispositif qui n’a pas été planifié au départ, il ne constitue pas un modèle réplicable. C’est un accident qui est le fruit de circonstances exceptionnelles : État faible, marché puissant, Églises divisées ; surabondance de terres à vendre et pénurie d’acheteurs ; piètre qualité de l’enseignement. Reproduire ce modèle ailleurs au XXIe siècle ? Vous n’y pensez pas !
— David Labaree est un historien américain de l’éducation.
— Cet article est paru dans le magazine en ligne Aeon le 11 octobre 2017. Il a été traduit par Jean-Louis de Montesquiou.
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En 1970, avant de pouvoir être diffusés en librairie, les livres doivent être visés par plusieurs instances fédérales et locales, et notamment par un bureau de censure. « Cette procédure, qui datait de la fin du xixe siècle, du temps où les romans de Zola, Balzac et Maupassant étaient jugés trop osés et radicaux pour le lectorat australien, est devenue particulièrement stricte pendant l’entre-deux-guerres », explique l’universitaire Amanda Laugesen dans le magazine en ligne Inside Story.
Dans les années 1950 et 1960, le tollé suscité par l’interdiction de L’Attrape-cœurs, de J. D. Salinger, et de L’Amant de lady Chatterley, de D. H. Lawrence, commence à faire bouger les lignes. Les éditeurs de Penguin attendent le bon moment pour porter le coup fatal, raconte Mullins. Portnoy et son complexe, qui est un best-seller mondial, leur fournit l’occasion rêvée. En juillet 1970, ils font imprimer et distribuer dans le plus grand secret aux libraires 75 000 exemplaires du roman. Défiant les autorités, ils annoncent la parution du livre en claironnant qu’ils sont prêts à porter l’affaire jusqu’à la Cour suprême.
C’est aux États qu’il incombe de faire respecter l’interdiction. Les procès se succèdent donc d’un bout à l’autre du pays. « Mullins consacre une bonne partie de son livre à la description des audiences, et sa lecture est divertissante », souligne Laugesen. Les procureurs se plongent dans les passages les plus obscènes de Portnoy pour arguer de son caractère choquant. Face à eux, la défense aligne le gratin de la littérature australienne qui met en avant la qualité littéraire du roman. Les juges sont partagés. En décembre 1972, des élections générales mettent un terme à ces hésitations. Le travailliste Gough Whitlam devient Premier ministre et abolit le système fédéral de censure. Mullins ne se contente pas de retracer cet épisode, il remet en cause l’idée que les Australiens se font d’eux-mêmes, assure le critique James Ley dans l’Australian Book Review : « Nous avons ce mythe stupide et agaçant qui veut que nous soyons des trublions irrévérencieux épris de liberté, alors qu’il est évident que nous avons longtemps été un pays de prudes et de puritains. »
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