Et maintenant voici l’Histoire quantifiable
Publié en octobre 2025. Par Books.
Nul doute que les États-Unis vivent un pic d’instabilité depuis l’assaut contre le Capitole en janvier 2021. Plus intrigant, ce pic avait été prévu en 2010 par l’historien Peter Turchin dans un article publié dans la revue scientifique Nature qui rétrospectivement a fait sensation. Plus intrigant encore, cette prédiction avait été formulée sur la base d’un modèle mathématique intégrant des variables clefs, comme l’appauvrissement, le creusement des inégalités et la « surproduction des élites ». Trois livres et quinze ans plus tard, Turchin teste son projet de quantifier l’Histoire dans un nouvel ouvrage censé rendre compte de l’évolution des sociétés depuis les débuts de l’Holocène, voici 12 000 ans, jusqu’à l’aube de la révolution industrielle. Le livre fait l’objet d’un vibrant éloge dans Nature, sous la plume de la journaliste Laura Spinney, auteure d’un livre sur l’histoire des langues indo-européennes. Avec « une petite armée d’archéologues, d’économistes et autres spécialistes des sciences sociales », rapporte-t-elle, Turchin a constitué une base de données intitulée Seshat, qui intègre des informations numérisées sur plus de 800 sociétés. Lui et son équipe sont persuadés que « cette quantification révélera des motifs évolutifs dans l’Histoire : plus vous rassemblerez de données, plus un signal clair émergera du bruit », écrit-elle. L’un des points que Turchin pense avoir établi grâce à son modèle est que le passage aux sociétés complexes a eu lieu avant l’émergence des religions moralisatrices. Laura Spinney conclut son article en assurant que les historiens qui expriment encore des réticences à l’égard d’une telle approche « manquent d’humilité ». Wait and see.