Quand la France « recomposait ses annales »
Pour les amateurs de notre rubrique « Jadis & naguère » (dans le magazine), le XIXè siècle français est une mine inépuisable. Surtout si l’on pense à l’incroyable vogue des sujets historiques qui s’empara des esprits après les séismes de la Révolution et de l’Empire, et se poursuivit jusqu’à la Grande Guerre. Chateaubriand la saisit en 1931 par ces deux formules, mises en regard par l’historien Antoine Lefébure : « tout prend aujourd’hui la forme de l’histoire, polémique, théâtre, roman, poésie » ; et : « la France doit recomposer ses annales, pour les mettre en accord avec les progrès de l’intelligence ». C’est l’époque où l’histoire envahit l’espace public. Tout le monde s’y met, des chefs d’Etat aux plus humbles plumitifs. En sortent quantité d’œuvres majeures, d’Augustin Thierry à Renan en passant par Guizot et Edgar Quinet. Mais aussi de textes moins connus, voire méconnus, qui méritent un détour. De femmes, notamment. Connaissez-vous Julie Candelle et son roman Bathilde, reine des Francs (1814) ? Pauline Roland et son Histoire de France abrégée (1835) ? Les Mémoires de Victorine de Chastenay ?
Dans son livre Ce pays qui aime les idées, le Mauricien Sudhir Hazareesingh ne manque pas de souligner le narcissisme cocardier de cette littérature, même la plus savante. Elle n’en est pas moins passionnante, et les éditeurs de la BNF, qui nous y donnent accès d’un coup, en format numérique, ont eu raison d’y adjoindre d’autres trouvailles qui ne relèvent pas de l’histoire proprement dite, mais témoignent de cet esprit si particulier du XIXè siècle. Comme Fourier et son système, de la Bruxelloise Zoé Gatti de Gamond (1839), L’association fraternelle des démocrates socialistes des deux sexes pour l’affranchissement politique et social des femmes, de Jeanne Deroin (1849), ou encore Notes d’une frondeuse, par Séverine, la « première femme reporter française reconnue » (1894).
