Publié dans le magazine Books n° 21, avril 2011. Par Maria Antonietta Saracino.
L’image a mieux réussi que les mots à saisir et à faire connaître la réalité et le legs de l’apartheid. L’écrivain Ivan Vladislavic et le photographe David Goldblatt révèlent la normalité étrange de cette ville anormale, aimée et haïe à la fois : Johannesburg.
«Alors même que je commençais à y apprendre quelque chose, je quittai l’université, même si ce fut moins définitif qu’il n’y paraît. Je voulais vivre dans le vrai monde, mais je ne savais pas du tout comment m’y prendre… Alors je me promenais à travers la ville, où, découvrant derrière chaque coin de rue erreurs et injustices, je me mettais dans de véritables états de rage infantile. » Ainsi débute Double Negative, le dernier opus d’Ivan Vladislavic, Sud-Africain blanc, sur un geste de rébellion semblable à l’ouverture d’une fenêtre sur le monde, depuis l’intérieur d’un espace resté trop longtemps clos. La ville que le narrateur parcourt à grands pas n’est autre que Johannesburg, ville aimée et haïe, perdue puis reconquise, protagoniste incontestable de toute l’œuvre de cet auteur, parmi les plus intéressants du paysage littéraire sud-africain.
Né à Pretoria en 1957, au sein d’une famille d’immigrés croates, Ivan Vladislavic s’installe enfant à Johannesburg où, après ses études, il commence à travailler comme éditeur pour Ravan Press, maison autour de laquelle ...