Jésus a-t-il existé ? Mais qu’importe ?
Publié en mai 2025. Par Books.
On ne sait pas à quoi ressemblait Jésus car aucun Évangile n’en donne une description physique. Aucun des Évangiles n’a d’ailleurs été rédigé de son vivant – mais seulement quarante ou soixante ans après sa crucifixion. De surcroît, aucun d’eux n’est attribuable à un auteur identifiable. Ce sont des écrits anonymes rédigés en grec, une langue que l’entourage du rabbin ne pratiquait pas. Le mot Christ était en usage pour désigner un dirigeant militaire ou religieux. Voilà quelques-uns des faits historiques que l’on apprend ou qui se voient confirmés par Elaine Pagels, spécialiste américaine des débuts du christianisme (deux de ses livres ont été traduits en français). Quant à Paul, seules sept de ses lettres sont considérées comme authentiques, et elles ont été écrites quinze ou vingt ans après la crucifixion. Paul n’a jamais rencontré Jésus. Il ne dit pas sa naissance d’une vierge, mythe religieux courant à l’époque hellénistique (Romulus lui-même, le fondateur de Rome, était censé être né d’une vierge). Les cures miraculeuses du genre de celles pratiquées par Jésus étaient monnaie courante dans l’Antiquité. Idem pour les résurrections et les tombeaux vides.
En rendant compte du nouveau livre d’Elaine Pagels dans le New Yorker, Adam Gopnik en profite pour évoquer d’autres ouvrages de spécialistes parus ces dernières années sur la question de l’historicité de Jésus et de son itinéraire, question déjà explorée voici un siècle et demi par Renan. Pagels ne va pas jusqu’à nier l’existence même du Christ, comme le fait par exemple le chercheur indépendant et très médiatique Richard Carrier (On the Historicity of Jesus, 2014). Les contradictions et incohérences des textes fondateurs « ne sont pas des aberrations qu’il s’agirait d’expliquer, écrit Gopnik, mais des signes de la puissance de la foi. Les miracles sont des miracles parce qu’ils sont une source d’émerveillement. »L’essentiel est que le message de cette nouvelle religion « a introduit une manière de penser sur le pouvoir et la souffrance sans réel précédent dans le monde ancien ».