Kraftwerk, la bande-son d’un continent
Publié dans le magazine Books n° 112, novembre 2020. Par Lucie Rondeau du Noyer.
Allemand d’origine, mondial par son influence, le groupe de Florian Schneider et Ralf Hütter a inventé une musique électronique émancipée des canons de la pop américaine et distinctement européenne.

Florian Schneider (à gauche) avec les autres membres de Kraftwerk sur un quai de la gare de Düsseldorf, en 1977, au moment de la sortie de Trans-Europe Express, le plus européen des albums du groupe.
Comme de nombreux artistes britanniques, le musicien Bernard Sumner a publiquement exprimé, dans une tribune parue en 2016 dans l’hebdomadaire The New European, le dépit que lui inspirait le Brexit. Si ce membre fondateur des groupes Joy Division et New Order se sentait européen, c’est notamment parce que lui et les autres inventeurs du post-punk britannique ont moins été influencés par leurs homologues d’outre-Atlantique que par des groupes du Vieux Continent, à commencer par les Allemands de Kraftwerk : « C’est un groupe unique en son genre. Je ne pense pas qu’ il aurait pu naître ailleurs qu’en Europe […]. Kraftwerk et d’autres groupes de rock allemands comme Can et Neu!, dont Ian Curtis et notre batteur Stephen Morris ont été des fans de la première heure […], ont été à mes yeux des acteurs majeurs du grand chambardement qui s’est produit dans la musique, de ce mouvement qui a rompu avec les guitares et les États-Unis pour aller vers des sonorités nouvelles, synthétiques et européennes. »
Comme Sumner, nombreux sont les professionnels...