L’Occident, une idée contre la Russie
Publié en novembre 2025. Par Books.
Il fallait un chercheur grec installé à Londres pour le découvrir : l’Occident, au sens moderne du terme, est une idée française. Elle a été formulée par Auguste Comte dans les années 1840, après qu’a émergé, dans les années 1830, la crainte toute nouvelle du pouvoir russe. Il s’agissait de nommer une « entité civilisationnelle », écrit Hans Kundnani dans le Times Literary Supplement, qui excluait la Russie. L’idée plongeait bien sûr ses racines dans un passé plus lointain, à commencer par la séparation entre l’empire romain d’Occident et celui d’Orient, berceau de la religion orthodoxe. C’est à partir des écrits de Comte que le concept de « West » a été exporté en Angleterre et aux États-Unis. L’aspect le plus nouveau était peut-être l’exclusion de la Russie, car au XVIIIe siècle, après Pierre le Grand et avec Catherine II, celle-ci était pleinement considérée comme européenne. À preuve son inclusion dans le congrès de Vienne en 1814-1815. Comte, qui avait créé la Revue occidentale, intégrait dans sa conception de l’Occident les nouveaux États d’Amérique fondés par les colons européens. L’ensemble civilisationnel ainsi constitué représentait à ses yeux « l’élite de l’humanité ». Il lui promettait un avenir radieux, imprégné de sa « philosophie positive », libéré de toute forme de conflit intérieur ou extérieur.
