Motion d’ordre

Le premier numéro de Books, sorti en décembre 2008, portait sur l’emballement des experts qui avait abouti à la grave crise financière déclenchée l’été précédent, plongeant le monde développé dans une récession sévère. Notre visuel de couverture présentait les financiers en moutons de Panurge. Nous avons renouvelé l’exercice sur divers sujets, mettant en cause des collectifs d’experts sur des questions aussi différentes que le cholestérol et la maladie cardiaque, l’art contemporain, les médicaments psychotropes, l’impact culturel du Web ou encore les publications scientifiques en biomédecine. Nous présentons, ici, un dossier argumenté sur la transition énergétique, vue sous l’angle de l’éolien. Le cas d’école est presque parfait. À la suite d’un processus complexe dont l’histoire reste à écrire, un consensus mondial d’experts s’est formé pour affirmer que la nécessaire réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES) devait passer par un développement massif des énergies renouvelables, entendez l’éolien et le solaire. Dopée par un arsenal de subventions publiques, une énorme industrie s’est développée, formant bientôt un lobby confortant agréablement les options prises par les gouvernants et les opinions défendues par les bobos urbains et les ONG écologistes. Résultat, l’Allemagne, pionnière et longtemps considérée comme le modèle à suivre, se retrouve dans une impasse : ses émissions de GES restent bloquées à un niveau très élevé. La France, bonne élève, se voit dans la situation ubuesque d’avoir à poursuivre un programme éolien gigantesque alors que son électricité est déjà à 95% décarbonée. De quoi rire, si les conséquences pour l’environnement, les finances publiques et le consommateur final n’étaient pas détestables, pour le moins.   Le secteur de l’énergie n’en est pas à son premier faux pas. Pendant des décennies, nous avons vécu avec le consensus du peak oil, l’idée que le monde se dirigeait inexorablement vers une terrible pénurie de pétrole. Aujourd’hui, nous croulons sous l’or noir et semblons nous diriger vers un scénario inverse, celui d’un pic de la demande et non plus de l’offre. Pendant des décennies, nous avons aussi misé sur le nucléaire. Des accidents imprévus mais évitables ont remis en question une filière pourtant parfaitement décarbonée, cela même dans des pays comme l’Allemagne et la France, où pourtant la sécurité du nucléaire n’a jamais failli.   Concernant l’éolien, la responsabilité des experts de la Commission européenne et de grandes agences comme l’Ademe, en France, est aussi évidente que celle de l’Élysée et des Verts. Puisse ce dossier faire un peu réfléchir nos chers décideurs.

ARTICLE ISSU DU N°0105

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