Merkel, la chancelière des réfugiés ?
L’accueil de plus d’un million de réfugiés par l’Allemagne en 2015 a marqué l’histoire récente de cette nation. « L’Allemagne est devenue un pays différent, c’est évident », estime Tobias Rapp dans Der Spiegel. L’ouvrage du journaliste Robin Alexander Die Getriebenen (« Portés pas les événements ») tente de reconstituer les événements : comment la chancelière Angela Merkel, qui était sur le point de fermer la frontière avec l’Autriche a finalement changé d’avis. En fait, Alexander montre que ni elle ni son ministre de l’Intérieur, Thomas de Maizière, n’étaient prêts à assumer les conséquences d’une telle fermeture. La police ne pouvait leur garantir que cela n’engendrerait pas des violences. Merkel a pris peur. Elle n’a jamais eu l’intention de devenir la « chancelière des réfugiés ». Cette image est une justification a posteriori. Les raisons données par Merkel pour justifier sa décision historique n’ont cessé de fluctuer : à l’impératif humanitaire a succédé l’idée qu’il était de toute façon impossible d’arrêter le flot des nouveaux arrivants. Puis ce fut le sinistre passé allemand qui fut mis en avant : il s’agissait de se racheter des crimes nazis. Enfin, on a allégué le vieillissement de la population allemande… Alexander « décrit avant tout comment la politique fonctionne. Les convictions, la vanité, le hasard, les calculs, les sondages, l’agenda, les discussions, la diplomatie internationale et les images de la télévision forment un tourbillon d’où émergent les décisions. » Le sujet, en tout cas, passionne les Allemands : le livre occupe la première place des meilleures ventes et en est à sa cinquième réimpression.