La canicule qui change tout
Publié le 2 août 2018. Par La rédaction de Books.
L’été 2018 est très chaud. Des températures records ont été enregistrées notamment au Japon (41°) et en Algérie (51°), et l’Europe suffoque. Il y a 160 ans, en 1858, pendant trois mois, les thermomètres ont régulièrement dépassé les 30 degrés à l’ombre en Angleterre, bousculant la vie londonienne, explique l’universitaire Rosemary Ashton dans One Hot Summer. A l’époque, Londres était notoirement d’une puanteur terrible. « Les exhalaisons des pires tabacs, de légumes en décomposition, de gaz, de chats morts, de vieux poissons, de cuisine douteuse et d’une humanité sale, négligée et inconsciente ; tout cela rendait la nuit affreuse et soulevait le cœur », écrit le journaliste George Sala. Les égouts de la ville, dont la population a doublé dans la première moitié du siècle, se déversent directement dans la Tamise, dont les deux rives ont disparues sous les déchets fermentant à ciel ouvert. L’investissement nécessaire à une meilleure évacuation des eaux usées divise les parlementaires depuis plusieurs années. Mais dans la chaleur de l’été 1858, l’odeur émanant de la Tamise devient intolérable. La presse attribue à la « grande puanteur » l’éclosion de deux foyers de choléra. La reine Victoria qui avait entrepris une croisière sur le fleuve renonce après quelques minutes. Le 30 juin, les parlementaires quittent la chambre un mouchoir sur le nez, le cœur au bord des lèvres. En quelques semaines, un plan d’action est conçu ; il est voté le 2 août.
Outre ces mesures d’hygiène, la vague de chaleur de 1858 aura eu des effets inattendus, assure Ashton. La question de la qualité de l’air a mis le politicien Benjamin Disraeli au premier plan, tandis que le soleil et la crainte de voir ses théories dévoilées par d’autres plongent Darwin dans une frénésie de travail. Quant à Dickens, cet été si chaud est celui où ce parangon de vertu quitte sa femme pour une actrice de 18 ans.
A lire aussi dans Books: Thoreau, archiviste du climat, octobre 2014.