Canetti, l’homme qui dévorait les femmes

« Je suis l’un des plus grands esprits qui aient jamais vécu », écrit-il un jour. Et ailleurs : « Je n’ai été qu’un monstre d’arrogance. » Dans ces deux jugements de l’écrivain sur lui-même se lit l’écartèlement d’un homme que sa soif de puissance empêche d’aimer les maîtresses dont il a besoin pour conforter son ego.

Non, il n’y avait décidément aucune noblesse chez cet Elias Canetti. Les lettres qu’il a écrites à la peintre Marie-Louise von Motesiczky, sa maîtresse pendant plus de quarante ans, nous montrent un homme à l’égocentrisme débridé et à la duplicité déconcertante. Lorsqu’on lit par exemple en parallèle la correspondance (qui vient aussi de paraître) entre les écrivains Joseph Roth et Stefan Zweig – un ivrogne parasite et un grand bourgeois –, on est ému par la noblesse de cœur et la générosité d’amis si dissemblables (1). Devant les lettres de Canetti à Marie-Louise von Motesiczky, en revanche, il faut faire un effort sur soi pour se souvenir que l’homme qui apparaît ici sous les traits d’un monstre a écrit des œuvres aussi magnifiques que Le Territoire de l’homme, La Langue sauvée ou Les Voix de Marrakech, ces essentiels de la littérature du XXe siècle. « On n’a pas le droit de connaître les poètes, on a le droit de les lire, mais pas de les connaître », expliquait Canetti dans l’une de ses réflexions tardives. ...
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Amant sans adresse de Canetti, l’homme qui dévorait les femmes, Hanser Verlag

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