Chili – Le temps de l’innocence

« Je ne sais pas si j’ai réussi, mais ce que je voulais, c’était écrire un roman dans lequel personne ne serait innocent », déclare l’écrivain chilien de 36 ans Alejandro Zambra au quotidien espagnol El País. Formas de volver a casa (« Les façons de rentrer à la maison ») se déroule dans le Chili des années 1980, sous la dictature de Pinochet, que Zambra raconte du point de vue de ceux qui, comme lui, étaient alors enfants et ont vu leurs pères devenir complices ou bien victimes du régime…

« Je ne sais pas si j’ai réussi, mais ce que je voulais, c’était écrire un roman dans lequel personne ne serait innocent », déclare l’écrivain chilien de 36 ans Alejandro Zambra au quotidien espagnol El País. Formas de volver a casa (« Les façons de rentrer à la maison ») se déroule dans le Chili des années 1980, sous la dictature de Pinochet, que Zambra raconte du point de vue de ceux qui, comme lui, étaient alors enfants et ont vu leurs pères devenir complices ou bien victimes du régime.

Figure du renouveau de la littérature chilienne depuis la sortie, en 2006, du très remarqué Bonsái, Alejandro Zambra appelle à l’éclosion d’une « littérature des enfants », qui brave  les versions officielles de l’histoire, mais s’efforce aussi d’expliciter ce qui se passait ces années-là dans les familles prétendument apolitiques de la classe moyenne du pays. Des familles que la peur et le simple désir d’éviter les ennuis incitaient à la complaisance.

L’ouvrage, en tête des ventes au Chili depuis sa publication en mai dernier, s’ouvre sur le tremblement de terre de 1985 et narre l’histoire d’un garçon de 9 ans auquel une jeune fille demande d’espionner un voisin et de lui rapporter tous ses faits et gestes. L’enfant accepte, bien qu’il ignore le motif de cette surveillance. Vingt ans plus tard, les deux jeunes se revoient et les pièces du puzzle commencent à s’emboîter.

« Trop longtemps, les personnes de ma génération ont pensé que le sujet de la dictature était réservé à leurs parents. C’était leur affaire, résume l’écrivain dans un entretien accordé à El Mundo. Moi, j’avais besoin d’expliquer l’enfance paradoxale qui fut la mienne : celle d’un garçon qui apprenait à dessiner et faisait de la bicyclette pendant que le Chili se vidait de son sang. Toutes ces années, Pinochet n’a été pour moi qu’un présentateur télé dont l’émission n’avait ni horaire ni durée fixe, et que mon père regardait sans dire un mot. Je le détestais pour cela, pour ses interruptions intempestives des programmes. Plus tard, je l’ai détesté pour ce qu’il était, un assassin, un fils de pute. Au collège, puis à l’université, le monde se divisait pour moi entre ceux qui comptaient des morts dans leur famille et ceux qui n’en comptaient pas. Avec Formas de volver a casa, j’ai voulu regarder en face la génération de mes parents. Ni pour la mettre en accusation, ni pour lui rendre hommage, mais afin d’essayer, par l’écriture, de la comprendre. »

LE LIVRE
LE LIVRE

Les façons de rentrer à la maison, Anagrama

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