États-Unis : par ici la sortie !

On a longtemps présenté les États-Unis comme une terre d’accueil. La réalité historique, cependant, suggère qu’ils entretiennent avec l’immigration un rapport ambivalent. Entre expulsions officielles et départs plus ou moins volontaires, quelque 56 millions de personnes ont été reconduites à la frontière en l’espace d’un siècle. Ce qui fait des États-Unis une implacable machine à expulser, estime l’historien Adam Goodman.


La construction d’un mur entre les États-Unis et le Mexique a été votée par le gouvernement Trump. Ici, Veronica Martinez, agente de la Patrouille frontalière, surveille la zone de Sunland Park, au Nouveau-Mexique.

Si l’on prend la peine d’imaginer la manière dont se déroule une procédure d’expulsion, la première image qui vient à l’esprit est celle d’une audience d’immigration. La magistrate préside, vêtue d’une toge noire. Les migrants comparaissent seuls, le droit à bénéficier de l’assistance d’un avocat ne s’appliquant pas. De jeunes enfants, parfois âgés de 3 ans à peine, « assurent leur propre défense », une formulation pour le moins déconcertante. L’audience peut être très longue (jusqu’à quatre heures) ou très courte (quelques minutes). Un mandataire du Service de l’immigration et des douanes des États-Unis (ICE) présente les preuves à charge – une arrestation dans le désert, un visa arrivé à expiration –, et la magistrate examine s’il y a lieu d’expulser la personne devant elle ou de l’autoriser à rester. Elle prononce alors son jugement. Mais, en réalité, ce n’est pas ainsi que les choses se passent dans l’immense majorité des affaires d’expulsion instruites aux États-Unis.