La liberté d’expression à l’épreuve d’Hitler
Publié le 15 décembre 2015. Par La rédaction de Books.
Bundesarchiv, Bild 183-1987-0703-506
Comparer les prières musulmanes dans la rue et l’Occupation, comme l’a fait Marine Le Pen reste, selon la justice, dans les limites de la liberté d’expression. La Seconde Guerre mondiale et ses épisodes les plus sombres demeurent l’un des arguments favoris du Front national mais aussi une arme rhétorique appréciée dans l’ensemble de l’Occident. Dans Reductio ad Hitlerum, le philosophe François de Smet rappelle que le phénomène a été analysé dès 1953 par le philosophe Leo Strauss. Ce dernier baptise alors reductio ad Hitlerum le procédé qui consiste à assimiler les thèses de l’adversaire aux idées nazies. La tactique permet à la fois de disqualifier l’autre et de marquer la limite au-delà de laquelle il n’est plus possible de discuter.
Cette limite a pris le nom de « point Godwin » dans les années 1990, quand l’avocat new-yorkais Mike Godwin a modernisé le propos face au développement d’Internet, en formulant cette nouvelle loi : « Plus une discussion en ligne dure longtemps, plus la probabilité d’y trouver une comparaison impliquant les nazis ou Hitler se rapproche de un. » Selon François de Smet, ce « point » est le symptôme d’un besoin indépassable des démocraties actuelles : se donner un épouvantail radical, pouvoir se repérer dans un ensemble de valeurs absolues comme le bien et le mal.