Lanceur d’alerte, un nouveau métier ?
Publié le 4 avril 2016. Par La rédaction de Books.
Un lanceur d’alerte anonyme a fait parvenir aux journalistes les documents désormais connus sous le nom de « Panama Papers ». Ces actes de divulgation d’informations se multiplient depuis quelques années, en même temps qu’ils se professionnalisent peu à peu. Si en français, le terme « lanceur d’alerte » est apparu pour la première fois dans des travaux de sociologie au cours des années 1990, le terme « whistle-blower » a été forgé aux Etats-Unis par Ralph Nader, militant des droits des consommateurs, dès 1971. Littéralement, « le souffleur de sifflet » fait référence à l’arbitre qui use de son instrument pour signaler une faute. Dès 1978, les Etats-Unis se sont dotés d’une législation pour protéger ces vigies. Aujourd’hui, des récompenses sont prévues pour les personnes concernées. Même si l’argent est rarement leur motivation. Entre 1986 et 2012, l’administration fiscale américaine leur a versés 3,9 milliards de dollars, en remerciement pour les 24 milliards récupérés grâce à eux. Il existe aussi, pour les apprentis lanceurs d’alerte, des livres pratiques, comme The Whistleblower’s Handbook (« Le manuel du lanceur d’alerte »). Son auteur, Stephen Martin Kohn, a été l’avocat de Bradley Birkenfeld. Ce salarié d’UBS a dénoncé, en 2005, l’usage par sa banque de comptes offshore secrets, et a fini lui-même en prison (40 mois pour complicité de blanchiment de fraude fiscale, car il n’avait pas dénoncé son plus gros client). Selon Kohn, si son client s’était adressé à la bonne administration pour révéler la fraude, il n’aurait pas atterri derrière les barreaux. D’où l’idée d’écrire un guide. Cela étant, Bradley Birkenfeld a aussi reçu pour sa coopération un chèque de 104 millions de dollars, la plus forte récompense jamais offerte.
Malgré la protection de la loi américaine, la majorité des lanceurs d’alerte, notamment dans l’industrie pharmaceutique (qui représente 90 % des cas de dénonciation aux États-Unis), voient leur vie durablement bouleversée. Le journaliste Noah Berlatsky rappelle ainsi, dans Whistleblowers, qu’il leur est souvent impossible de continuer à travailler dans le même secteur, alors qu’ils doivent attendre des années leur récompense.