Inattendu
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Le boxeur, héros littéraire

Mohammed Ali, décédé ce week-end, était aussi, comme de nombreux autres boxeurs, un personnage littéraire. La boxe est le sport qui a le plus inspiré les écrivains. Hemingway, Hugo, Simenon, Shaw, Cocteau, London, Faulkner et bien d’autres s’en sont emparés. « Comme toutes les actions humaines extrêmes, la boxe n’excite pas seulement l’imagination de l’écrivain, mais aussi son besoin de témoigner d’un spectacle muet, écrit Joyce Carol Oates dans De la boxe. Boxer est un acte d’autodétermination achevé. Le fait d’accepter, de rechercher activement ce que la plupart des êtres évitent – la souffrance , l’humiliation, la perte, le chaos –, c’est vivre l’instant présent comme s’il était dépassé. »

Dans l’avant-propos de Portraits légendaire de la boxe, Sylvie Girard et Guy Lagorce trouvent dans L’Illiade la première description littéraire du combat entre deux hommes sans arme, avec le pugilat entre Epeios et Eurylae. Après plusieurs siècles d’éclipse, la pratique est de nouveau évoquée en 1681 dans une revue britannique qui rend compte de cette nouvelle attraction de foire : les combattants prennent place au centre d’un espace formé par les spectateurs tenant une corde, le ring. Peu à peu, la pratique deviendra un sport, sous le nom de boxe, avant d’être codifiée en 1867.

C’est donc au XXe siècle que la boxe et la littérature de la boxe connaissent leur âge d’or, tant ce sport donne lieu à des descriptions lyriques, mais aussi à des portraits magnifiques et à des métaphores politiques et sociales. Dès 1910, Jack London a fait le récit d’un match entre Jack Johnson, champion noir, et James Jeffries, vieille gloire blanche parti à la reconquête du titre « pour sa race ». Sa description du combat n’a rien de fidèle à la réalité : c’est la passion raciale qui lui importe. Quelques décennies plus tard, Mohammed Ali devient le héros de Norman Mailer. Dans Le Combat du siècle, celui-ci décrit la victoire homérique du boxeur que l’on dit sur le retour contre le champion du monde George Foreman en 1974, dans Kinshasa surchauffée. Un concentré de tragédie et de symboles dont l’écrivain reporter fait un chefd’œuvre. Mais depuis Mike Tyson, et la mort de Kim Duk-Koo sur le ring en direct à la télévision, soutiennent George Kimball et John Schulian dans At the fights, l’engouement littéraire et populaire pour la boxe s’est peu à peu éteint.

 

LE LIVRE
LE LIVRE

At the Fights: American Writers on Boxing de George Kimball et John Schulian, Library of America, 2011

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