Un trafic de livres érotiques pour Anglais
Publié en février 2009.
Alors que la librairie parisienne Brentano’s est à vendre, le bibliographe Patrick Kearney met en lumière un moment obscur de son histoire, quand son sous-sol abrita un juteux commerce de livres érotiques destiné aux anglophones avertis.
Alors que la librairie parisienne Brentano’s est à vendre, le bibliographe Patrick Kearney met en lumière un moment obscur de son histoire, quand son sous-sol abrita un juteux commerce de livres érotiques destiné aux anglophones avertis. L’affaire remonte aux années 1930, quand un dandy anglais, Jack Kahane, marié à une Française, créa à Paris Obelisk Press, destinée à publier des romans gentiment « risqué » (en français dans le texte, sans « s »). Cible : les habitants de la naïve Albion, soumis à une censure victorienne. Le fils de Kahane, Maurice Girodias, reprit le flambeau au lendemain de la guerre, sous la marque Olympia Press. « Il recruta un groupe animé d’auteurs affamés mais talentueux, anglais et américains, hommes et femmes, leur payant quelques francs la page pour produire de la pornographie à la chaîne », écrit dans la Literary Review John de St. Jorre, lui-même auteur d’un livre sur « le voyage érotique d’Olympia Press ». Les livres passaient en Angleterre en contrebande, mais les touristes pouvaient venir se servir directement dans le sous-sol de Brentano’s. Patrick Kearney connaît son sujet : il fut à la fois touriste et contrebandier.
Comme son père, Girodias publia aussi de grands livres : Molloy de Beckett, Lolita de Nabokov… La Brigade mondaine (« au nom délicieux », écrit St. Jorre), finit par s’intéresser à ce commerce : « Ses membres monolingues ne pouvaient pas lire les livres » mais savaient de quoi il retournait. Le goût de la censure ayant saisi les autorités, Girodias fréquenta les tribunaux. « Ils sont tous cons, on les aura ! », disait-il. Il dut vendre sa maison au début des années 1960.
Comme son père, Girodias publia aussi de grands livres : Molloy de Beckett, Lolita de Nabokov… La Brigade mondaine (« au nom délicieux », écrit St. Jorre), finit par s’intéresser à ce commerce : « Ses membres monolingues ne pouvaient pas lire les livres » mais savaient de quoi il retournait. Le goût de la censure ayant saisi les autorités, Girodias fréquenta les tribunaux. « Ils sont tous cons, on les aura ! », disait-il. Il dut vendre sa maison au début des années 1960.