La Loi du Roi au Swaziland

Le Swaziland, l'un des plus pauvres pays du monde, vit toujours sous le joug d'un monarque absolu qui accapare l'essentiel des ressources du pays.

Dans la série des pays insolites, voici le Swaziland, minuscule dictature tropicale totalement enclavée entre l’Afrique du Sud et le Mozambique, dont la taille infime lui permet de passer sous l’écran radar de la vigilance international.

Il y aurait pourtant matière à s’émouvoir.

D’abord, c’est un des pays parmi les plus pauvres (170e au classement international du PIB), mais aussi parmi les plus inégalitaires du monde (cela va souvent ensemble). Au Swaziland, dernière monarchie absolue d’Afrique et presque du monde, cette inégalité reflète les prérogatives de sa spectaculaire et pittoresque famille royale. Non seulement celle-ci accapare l’essentiel des terres agricoles (la seule ressource du pays), mais en plus ses extravagances font pâlir Buckingham Palace. Le roi Mswati III (44 ans) est vigoureusement polygame, avec une douzaine d’épouses officielles plus quelques autres. Il a la particularité de faire son marché tous les ans lors d’une cérémonie célèbre dans toute l’Afrique méridionale : la « danse des roseaux », où plusieurs dizaines de milliers de jeunes filles en principe vierges, ou du moins sans progéniture, dansent les seins nus devant le monarque et sa famille. L’événement suscite de houleux débats : les féministes s’indignent, les économistes s’étranglent (l’organisation de la fête plombe le budget, déjà exsangue, de l’État), les épidémiologistes s’étouffent de fureur, car le sida frappe déjà plus de 25 % de la population swazie, un record mondial.

Mswati III n’en a cure, d’autant que les critiques ont du mal à s’exprimer dans ce pays qui ne dispose encore que d’un vernis démocratique. Déjà quinzième monarque le plus riche du monde, il s’est fait offrir récemment un jet pour pouvoir promener son harem – cadeau de « sponsors » qui ont souhaité rester anonymes. Mais il a lui-même quelques soucis : une de ses épouses le trompait avec le ministre de la justice (prestement limogés l’un et l’autre) ; deux autres se sont enfuies, par crainte, disaient-elles, de mauvais traitements ; et lorsque, pour boucler des fins de mois, apparemment difficiles malgré tout, il a demandé une commission pour avoir négocié un prêt de l’aide internationale, ce fut un tollé !

Jean-Louis de Montesquiou

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