Le chien, le meilleur produit de l’homme
Publié le 4 mars 2019. Par Pauline Toulet.
Il y a deux siècles à peine, les races de chiens n’existaient pas, apprend-on dans The Invention of Modern Dog. Les auteurs, Michael Worboys, Julie-Marie Strange et Neil Pemberton, trois historiens de l’université de Manchester, entendent retracer l’émergence de nos compagnons à quatre pattes tels que nous les connaissons aujourd’hui. « Ce livre n’est ni de la vulgarisation scientifique, ni de la vulgarisation historique : il est solidement étayé par une grande variété de sources et complété par plusieurs centaines de notes. Mais il est également très distrayant et abondamment illustré – il contient même la recette de nourriture pour chien hautement nutritive de Dickens », commente Jacqueline Banerjee dans The Times Literary Supplement.
Invention des chiens de race
Avant l’époque victorienne, les chiens n’étaient pas classés selon leur race, mais selon les tâches auxquelles on les destinait. Au XIXe siècle, on se prit de l’envie de dénombrer, mesurer, catégoriser, et, in fine, d’améliorer toutes les choses de la nature. Les Britanniques se mirent donc à pratiquer l’élevage sélectif, de manière à donner naissance à des chiots présentant des caractéristiques bien définies. Certains, voyant-là un business juteux, se spécialisèrent dans l’élevage et la vente de chiens racés. Ils définirent une série d’attributs propres à chaque race, qui allaient conditionner leur valeur marchande.
Avec les races, apparurent les concours canins, dont le premier remonte à 1859. Il s’agissait initialement de festivités organisées par et pour les classes populaires, conçues comme des ersatz des combats de chiens, interdits quelques années plus tôt. Les considérations esthétiques devinrent progressivement les seuls critères d’évaluation des chiens, partant du principe que leur caractère et leur apparence étaient corrélés.
Chiens adaptés à l’homme
Aujourd’hui, si nous admettons bien volontiers que nos toutous sont dotés d’intelligence et d’émotions, nous ne remettons cependant pas en question les pratiques d’élevage sélectif, que les auteurs qualifient d’« eugénistes ». Nous avons conçu des chiens qui correspondent aux exigences de nos sociétés, soulignent les trois historiens. Nos animaux de compagnie sont doux avec les enfants, ne perdent pas trop leurs poils et supportent la vie en appartement : est-ce à dire que le chien est un produit comme un autre ?